La petite venise
France, Italie : 2011
Titre original : Io sono Li
Réalisateur : Andrea Segre
Acteurs : Zhao Tao, Rade Serbedzija, Marco Paolini
Distribution : Haut et court
Durée : 1h38
Genre : Drame
Date de sortie : 13 juin 2012
3,5/5
Le nouveau film d’Andrea Segre, déjà plusieurs fois récompensé à la dernière Mostra de Venise, nous fait voyager dans la périphérie de Venise et de ses canaux. Sur fond d’immigration, le film nous touche pourtant là où on ne s’y attend pas…
Synopsis :
Sur une île de la lagune vénitienne, un pêcheur fait la connaissance d’une jeune chinoise récemment immigrée. Une douce amitié naît peu à peu entre ces deux êtres que tout semble séparer. Mais leurs sentiments dérangent deux communautés qui se rejettent : Italiens et Chinois voient d’un mauvais œil leur complicité naissante…
Une histoire lente et belle
Le moins que l’on puisse dire de ce long métrage, c’est qu’il prend son temps. Pourtant d’une durée presque standard, La Petite Venise risque de vous donner l’impression de durer 3h. Certains abandonneront alors facilement, tandis que d’autres se laisseront porter par ce rythme suivant la marée.
De plus, le film est plutôt avare en parole, puisque les personnages principaux ne parlent pas la même langue, et communiquent donc par d’autres moyens que les mots. C’est d’ailleurs là que la beauté du long métrage se révèle, et où les personnages deviennent touchants. Le spectateur se retrouve transporté sur les flots, à regarder la vie des habitants d’un petit village, au rythme des saisons et du travail. Peu de choses sont révélées sur tous les personnages, notamment sur la deuxième chinoise qui aidera Shun Li. Il est alors à la fois difficile de s’accrocher à ce personnes mais aussi tellement difficile de ne pas se poser de questions sur eux et d’avoir envie de plus les connaître. Car La Petite Venise fait bien plus que de parler d’une petite chinoise obligée de fuir son pays pour s’en sortir…
Un film qui explore de nombreux sujets
En suivant le personnage de Shun Li, une chinoise venu travailler en Italie pour subvenir aux besoins de sa famille (et surtout de son fils) restée en Chine, Segre livre une histoire passionnante sur la force de l’amitié, de la culture et de l’identification. Qui ne s’est jamais senti étranger dans son propre pays ? Qui n’a jamais eu le mal du pays ou ressenti le manque d’un être cher ? Qui sait à quel moment vous faites ou ne faîtes plus partie des étrangers pour les autres?
Avec peu de mots, le réalisateur dépeint parfaitement la société actuelle, dans tout ce qu’elle a de plus individualiste et mesquin. Sans une once d’agressivité, on comprend toute la tristesse et le mal-être de Shun Li et de Bépi, son nouvel ami italien d’origine étrangère lui aussi. Les deux personnages qui se rapprochent naturellement livrent alors une performance toute en douceur et en poésie, abordant le multiculturalisme, la quête d’identité, l’immigration, le communautarisme, le chômage et l’isolation. Quel programme !
Pour couronner le tout, le réalisateur parvient à capturer les mentalités persistantes dans les petites bourgades, à savoir la peur de l’étranger et la soif de rumeurs qui contrent l’ennui total de ces travailleurs pauvres se sentant menacés par l’immigration. Le film prend alors une dimension universelle. Pour nous émouvoir encore plus, outre la fin toute en beauté et en simplicité poignante, le spectateur a droit aux mots prononcés par l’acteur et poète Rade Serbedzija, ainsi qu’a des plans presque marins d’une beauté simple et naturelle. Au bout du compte, on se rend compte que l’on s’est laissé transporté par la barque de la petite Venise sans s’en apercevoir, et que l’on est prêt à continuer le voyage avec eux jusqu’en chine s’il le faut.
Résumé
Une histoire poétique sur l’immigration, le partage des cultures, l’amitié, l’amour et les rumeurs. Une fable magique dans la lagune qui nous émeut par son économie de paroles et un jeu d’acteur parfait. Une petite pépite que cette petite Venise.
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