Le Festival européen du film fantastique de Strasbourg 2012 (on peut dire FEFFS aussi) s’est déroulé du 14 au 22 septembre dernier. J’ai eu l’occasion de me rendre à cette 5ème édition présidée par Mick Garris. Même si, faute de temps, je n’ai pu voir l’ensemble de la programmation proposée, je vous laisse découvrir un compte-rendu des 4 jours passés à Strasbourg :
Après une édition 2011 réussie, nous attendions impatiemment le mois de septembre pour nous rendre à Strasbourg manger de la choucroute et voir défiler des zombies dans les rues de la capitale alsacienne. C’est donc avec plaisir que je me suis rendu à la 5ème édition de ce festival dirigé par le passionné Daniel Cohen.
Robot and Franck : L’ouverture du festival c’est faite le vendredi 14 septembre avec la projection de Robot and Franck, une comédie dramatico-fantastique réalisée par Jake Schreier (lire la critique). Un film qui n’a rien de révolutionnaire mais qui saura plaire à tous ceux qui recherchent un divertissement simple, humain et attendrissant, porté par des acteurs plein de justesse (avec une mention spéciale à Franck Langella).
[rating:3.5]
Les zombies débarquent !
La journée du samedi était consacrée aux zombies, en effet comme chaque année une Zombie Walk s’est abattue dans les rues du centre ville de Strasbourg. Un moyen spectaculaire de faire parler du festival car en ce samedi 15 septembre, il était difficile pour les strasbourgeois de ne pas voir déferler les zombies. Ils étaient des milliers, après s’être fait maquiller place Broglie par les élèves de l’école de maquillage Candice-Mack, a défiler dans les rues du centre-ville accompagnés par des groupes de musique. La Zombie Walk s’est achevée une heure plus tard, place de la Bourse, avec l’Apéro Zombie.
Scalene : À peine la Zombie Walk terminée, je me débarbouille le visage couvert de sang (au passage, merci à la jolie zombie qui m’a fait un bisou très sanguinolent…) et je fonce à la projection de Scalene. Ce thriller horrifique sorti le 11 octobre dernier en DVD aux États-Unis était encore totalement inédit dans nos contrées. Scalene est basé sur un schéma narratif à triple entrée, trois personnages se chargeant de raconter, avec des points de vue totalement différents, une sombre histoire de vengeance. On y suit en effet une mère qui voit son fils autiste accusé de viol par une jeune étudiante censée le garder. Puni pour son geste, le fils est séparé de sa mère, qui décide de se venger de la jeune femme. Scalene est une œuvre qui se veut originale et n’essaie à aucun moment de singer des œuvres plus friquées. Le film de Zack Parker se crée une propre légende, une manière délicate d’aborder un sujet pourtant plombant, une belle réussite !
[rating:4.0]
She’s a maniac, maniac on the floor
Maniac : Projet en gestation depuis un moment sous la houlette du producteur Alexandre Aja, le remake de Maniac était diffusé le samedi soir. On avait quelques raisons d’avoir peur du résultat de ce remake, Maniac étant un film culte, surtout lorsqu’on a appris que le rôle principal était tenu par Elijah Wood… Au final, Maniac est une excellente surprise, Franck Khalfoun respecte le ton violent et urbain du film original et se démarque en travaillant plus profondément la personnalité du meurtrier et avec cette vue subjective prenante. C’est prenant, violent et diablement efficace.
[rating:4.5]
Sunday Bloody sunday
Elfie Hopkins : La journée de dimanche nous a permis de découvrir Elfie Hopkins, un film fantastique pour adolescent présenté hors compétition qui nous embarque dans le village de la jeune Elfie, une punk-détective menant de pseudo enquêtes sur un crime perpétré lors de l’arrivée d’une nouvelle famille dans son voisinage. Elfie Hopkins ne se prend jamais au sérieux et heureusement, l’intrigue ne porte que peu d’intérêt et les différentes péripéties sont toujours prévisibles, mais les ados (et c’est clairement le public visé) pourront facilement s’attacher à ce personnage rafraîchissant qui se veut tour à tour émouvant et drôle.
[rating:2.5]
The Pact : Le soir nous avons découvert The Pact qui est l’une des grosses claques de la semaine. L’histoire fait suite au décès de la mère de Nicole et Annie, qui se voient dans l’obligation de retourner à la maison familiale pour quelques jours, question de régler certains trucs. Lorsqu’Annie arrive sur place, sa sœur a mystérieusement disparu sans laisser de traces. Mais ce n’est pas tout. Une présence inquiétante et violente hante maintenant les lieux. The Pact, de Nicholas McCarthy, est un film de fantômes lent, silencieux et terriblement intriguant. Le film nous plonge directement dans la peur. The Pact cherche à inventer quelque chose, travaille de front l’immersion du spectateur, contourne toutes les facilités.
[rating:4.0]
C’est sur cette bonne note que j’achève mon premier week-end de festivités.
We Need A Resolution
Résolution : Vendredi 22 septembre me voilà de retour à Strasbourg pour la clôture du festival. C’est avec de bons retours que je me rends à la projection de Resolution, film d’horreur réalisé par Justin Benson et Aaron Moorhead. Michael découvre dans sa boîte e-mail une vidéo de son vieil ami Chris où ce dernier semble être sous dépendance de drogues et surtout potentiellement en danger de mort. Inquiet, il décide de prendre une semaine de congés pour rejoindre son ami et le remettre d’aplomb. Constatant l’état lamentable de Chris en arrivant – qui manque de peu de lui tirer dessus – Michael décide de le séquestrer chez lui, sous sa surveillance, durant cinq jours. Le but de la démarche étant de le convaincre d’aller par la suite faire une cure de désintox. Mais voilà, quelques individus peu fréquentables et une étrange présence vont compliquer la tâche de Michael et le mettre, lui aussi, en péril.
Resolution est un film solide : un concept solide, une idée farfelue, de bons acteurs et une réalisation dynamique font de ce film une franche réussite. On se retrouve devant une idée réellement originale (ça fait vraiment plaisir), un duo d’acteurs en parfaite harmonie usant de répliques faisant souvent mouche et une réalisation privilégiant l’efficacité.
[rating:3.0]
Excision : J’enchaine avec Excision , film fantastique réalisé par Richard Bates Jr. On y suit Pauline, une ado franchement pas comme les autres. Ses diverses fascinations (comme son fantasme d’effectuer des opérations chirurgicales sur des inconnus) effraient ses parents. Il n’y a que sa jeune soeur, souffrant de mucoviscidose, qui la comprenne. Mais lorsque Pauline décide de perdre sa virginité, c’est là que les choses vraiment étranges commencent…
Excision joue la carte de la comédie grotesque mais pousse évidemment à la mise en perspective. Le rire jaune cache quelque chose de plus noir. Bates Jr fait preuve d’une grande maturité en ne limitant pas Excision à un film-choc. Son personnage principal, pas la loque passive qu’on imagine, au contraire un personnage fort, dur, opiniâtre, est un des plus marquants de l’année. Ce qui rend encore plus puissant un finale hallucinant, où la violence contenue devient alors totalement folle. Coup d’essai, coup de maître.
[rating:4.0]
New Kids On The Block
New Kids Nitro : Le film du soir est des plus attendus, il s’agit de New Kids Nitro, la suite de New Kids Turbo, un des grands succès de la comédie fantastique de l’an dernier. Soyons clairs dès le départ, les zombies ne sont qu’un prétexte (plus ou moins inutile) pour nous ressortir la même formule que Turbo. Bref, cela ne sert à rien de parler de la réalisation, New Kids Nitro est un film gras à l’humour absurde et totalement assumé. Des coupes mulets, des insultes fantastiques et un bon goût assumé, on retrouve les ingrédients qui ont fait le succès du premier épisode mais un brin affadis par l’absence d’effet de surprise.
Le coté auto-dérision est permanent, on assiste à la fois à une auto-parodie, souvent bien amenée par des ressorts scénaristiques, et dans une autre mesure à une parodie de film de zombies avec un soupçon de Fast and Furious (le tuning, avec la friterie, il est vrai, est une des passions nationales). Rythmé avec une bande-son mémorable, New Kids Nitro continue à porter haut les couleurs de Maskandje de par le monde et le premier qui dira le contraire sera un gros HOMO! (prononcez HowMow pour faire couleur (orange) locale).
[rating:2.5]
Sound of my Voice :Le samedi 22 septembre marque la fin du Festival européen du film fantastique de Strasbourg 2012. Je commence la journée par le film Sound of my Voice. Ce drame suit un journaliste et sa copine qui décident de s’infiltrer dans une secte. Ces petits malins mènent une enquête sur Maggie, le gourou, qui, depuis son antre de sous-sol, prétend venir du futur. Ainsi, malgré quelques maladresses apparaissant davantage comme des erreurs de début de parcours que comme un piètre usage des rouages narratifs, il finit par ressortir de Sound of My Voice un étonnant exercice de manipulation. Un coup fumant dans lequel Batmanglij et Marling (les scénaristes), plutôt que d’y aller d’une dénonciation typique de ce genre de pratiques en traçant une ligne claire entre le bien et le mal – comme tenteront de le faire leurs protagonistes -, auront préféré imprégner le spectateur de l’état d’esprit de ces individus, nous laissant en bout de ligne avec un portrait aussi flou que limpide de la situation.
[rating:3.5]
Viva Espana !
Insensibles : Le festival s’achève pour moi sur le visionnage d’Insensibles, un film d’horreur espagnol (tiens encore eux !). Le film nous transporte à la veille de la guerre civile espagnole. Un groupe d’enfants insensibles à la douleur est interné dans un hôpital au cœur des Pyrénées. De nos jours, David Martel, brillant neurochirurgien, doit retrouver ses parents biologiques pour procéder à une greffe indispensable à sa survie. Dans cette quête vitale, il va ranimer les fantômes de son pays et se confronter au funeste destin des enfants insensibles.
Insensibles a beau être le premier long-métrage de Juan Carlos Medina, il n’en demeure pas moins une œuvre complexe, profonde et maîtrisée, avec comme point de départ l’histoire de jeunes enfants insensibles à la douleur sur fond d’Espagne franquiste. Si le film est aussi remarquable, c’est en grande partie grâce à son rythme qui, à travers un habile montage alternant allers/retours temporels, réussit à nous tenir en haleine sans rémission. D’un point de vue scénaristique, la copie rendue par Juan Carlos Medina est brillante : le scénario, pourtant hyper dense, s’avère parfaitement lisible et compréhensible tout en parvenant à mêler des faits réels et fantastiques. Seule ombre au tableau, un final quelque peu extravagant, qui jure avec le reste de l’œuvre. Ce qui n’enlève rien à la réussite de ce film grave, ambitieux, impressionnant.
[rating:4.0]
C’est sur ce dernier film que s’achève mon périple à Strasbourg. Je reste frustré de ne pas avoir pu visionner l’ensemble des films en compétition pour me faire une idée plus juste de la programmation, mais les films que j’ai pu voir était de très bonne facture. Le festival de Strasbourg réussit à se démarquer de ses principaux concurrents : le PIFFF (Paris International Fantastic Film Festival), L’Étrange Festival et le Festival fantastique de Gérardmer, grâce à une programmation originale et rafraîchissante. On regrette qu’il n’y ait pas eu plus d’exclusivités et de gros films à l’image de L’Étrange Festival qui projetait Dredd en avant-première internationale la même semaine. Mais le FEFFS est encore jeune et gageons qu’à l’avenir Daniel Cohen et son équipe réussiront à attirer des stars d’envergure internationale et projeter des films en exclusivité.
Totalement d’accord avec toi pour Insensibles! Et tu me donnes décidément très envie de découvrir Maniac!