Festival de Deauville 2015 : hommage à Orson Welles

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Le Festival du film américain de Deauville, édition 2015, rendra un hommage au réalisateur, comédien, scénariste & producteur Orson Welles (1915 – 1985).

« Il ne faut pas être timide avec la caméra. Il faut lui faire violence, la pousser jusque dans ces dernier retranchements, parce qu’elle est une vile mécanique. Ce qui compte, c’est la poésie. »

À l’occasion du centenaire de la naissance d’Orson Welles, le festival de Deauville proposera de (re)voir trois longs métrages du cinéaste, ainsi qu’un documentaire consacré à cette légende éternelle du cinéma mondial, qui, très jeune, a réinventé la grammaire de son art avec son chef-d’œuvre Citizen Kane. Truffaut disait combien Orson Welles avait déclenché des vocations cinématographiques, il a aussi marqué du sceau de l’innovation des films comme Falstaff, Dossier secret (Mr. Arkadin), ou encore La Soif du mal (Touch of Evil).

Dans le cadre de cet hommage, seront présentés : Citizen Kane, La Dame de Shanghai (The Lady from Shanghai), et La Soif du mal (Touch of Evil), ainsi que le documentaire This Is Orson Welles de Clara et Julia Kuperberg (Production I TCM Cinéma & Wichita Films).

Capture

FILMOGRAPHIE SÉLECTIVE

Réalisateur

1934 THE HEARTS OF AGE – court métrage

1938 TOO MUCH JOHNSON – moyen métrage

1939 THE GREEN GODDESS – court métrage

1941 CITIZEN KANE

1942 VOYAGE AU PAYS DE LA PEUR (Journey into Fear)

LA SPLENDEUR DES AMBERSON (The Magnificent Ambersons)

1943 THE STORY OF SAMBA – court métrage

1946 LE CRIMINEL (The Stranger)

1948 MACBETH

LA DAME DE SHANGHAI (The Lady from Shanghai)

1950 LE MIRACLE DE SAINTE ANNE (The Unthinking Lobster)

1952 OTHELLO (The Tragedy of Othello: The Moor of Venice)

1955 DOSSIER SECRET (Mr. Arkadin)

TROIS MEURTRES (Three Cases of Murder)

SAINT-GERMAIN-DES-PRÈS – court métrage

LA PELOTE BASQUE (Basque Pelota) – court métrage

CORRIDA À MADRID – court métrage

ORSON WELLES’ SKETCH BOOK – TV

MOBY DICK REHEARSED – TV

1956 ORSON WELLES AND PEOPLE – TV

1958 LA SOIF DU MAL (Touch of Evil)

THE FOUNTAIN OF YOUTH – court métrage/short

ORSON WELLES AT LARGE: PORTRAIT OF GINA – doc

1961 TEMPO – TV

1962 LE PROCÈS (The Trial)

NO EXIT

1964 NELLA TERRA DI DON CHISCIOTTE – doc,

1965 FALSTAFF (Campanadas a medianoche)*

TREASURE ISLAND – court métrage

1967 UNE HISTOIRE IMMORTELLE (The Immortal Story) – TV

1968 VIENNA – court métrage

1969 L’ÉTOILE DU SUD (The Southern Star)

LE MARCHAND DE VENISE (The Merchant of Venice) – TV

1970 THE DEEP

THE GOLDEN HONEYMOON – court métrage

1971 LONDON – court métrage

1972 THE OTHER SIDE OF THE WIND

1975 VÉRITÉS ET MENSONGES (F for Fake) – doc

1978 FILMING « OTHELLO » – doc

1979 THE ORSON WELLES SHOW – TV

1981 FILMING « THE TRIAL » – doc

1982 ORSON WELLES’ THE DREAMERS – doc

1984 THE SPIRIT OF CHARLES LINDBERGH – court métrage*

1985 ORSON WELLES’ MAGIC SHOW – TV

Comédien

1937 TERRE D’ESPAGNE (The Spanish Earth) Joris Ivens

1944 JANE EYRE Robert Stevenson

1946 DEMAIN VIENDRA TOUJOURS (Tomorrow Is Forever) Irving Pichel

DUEL AU SOLEIL (Duel in the Sun) King Vidor

1949 CAGLIOSTRO (Black Magic) Gregory Ratoff

ÉCHEC À BORGIA (Prince of Foxes) Henry King

LE TROISIÈME HOMME (The Third Man) Carol Reed

1950 LA ROSE NOIRE (The Black Rose) Henry Hathaway

1953 L’AFFAIRE MANDERSON (Trent’s Last Case) Herbert Wilcox

SI VERSAILLES M’ÉTAIT CONTÉ (Royal Affairs in Versailles) Sacha Guitry

1954 NAPOLÉON Sacha Guitry

1956 MOBY DICK John Huston

1957 LE SALAIRE DU DIABLE (Man in the Shadow) Jack Arnold

1958 LE GÉNIE DU MAL (Compulsion) Richard Fleischer

LES FEUX DE L’ÉTÉ (The Long Hot Summer) Martin Ritt

LES RACINES DU CIEL (The Roots of Heaven) John Huston

LES VIKINGS Richard Fleischer

1959 DRAME DANS UN MIROIR (Crack in the Mirror) Richard Fleischer

FERRY TO HONG KONG Lewis Gilbert

1960 AUSTERLITZ Abel Gance

DAVID ET GOLIATH (David e Golia) Ferdinando Baldi & Richard Pottier

1961 LA FAYETTE Jean Dréville

LE ROI DES ROIS (The King of Kings) Nicholas Ray

1963 HOTEL INTERNATIONAL (The VIPs) Anthony Asquith

LA RICOTTA Pier Paolo Pasolini – moyen métrage

ROGOPAG (Ro.Go.Pa.G.) Roberto Rossellini, Jean-Luc Godard, Pier Paolo Pasolini & Ugo Gregoretti

1965 A KING’S STORY Harry Booth

LA FABULEUSE AVENTURE DE MARCO POLO Denys de La Patellière & Noël Howard

1966 PARIS BRÛLE-T-IL ? René Clément

UN HOMME POUR L’ÉTERNITÉ (A Man for All Seasons) Fred Zinnemann

1967 CASINO ROYALE John Huston, Ken Hughes, Val Guest, Robert Parrish & Joseph McGrath

LE MARIN DE GIBRALTAR (The Sailor of Gibraltar) Tony Richardson

1968 QU’ARRIVERA-T-IL APRÈS ? (I’ll Never Forget What’s His Name) Michael Winner

UN CRI DANS L’OMBRE (House of Cards) John Guillermin

1969 LA BATAILLE DE LA NERETVA (Bitka na Neretvi) Veljko Bulajic

TROIS POUR UN MASSACRE (Tepepa) Giulio Petroni

1970 ATTENTION AU LAPIN (Get to Know Your Rabbit) Brian De Palma

CATCH-22 Mike Nichols

COMMENCEZ LA RÉVOLUTION SANS NOUS (Start the Revolution Without Me) Bud Yorkin

LA LETTRE DU KREMLIN (The Kremlin Letter) John Huston

WATERLOO Serguei Bondartchouk

1971 LA DÉCADE PRODIGIEUSE Claude Chabrol

MALPERTUIS Harry Kumel

UN COIN TRANQUILLE (A Safe Place) Henry Jaglom

1972 L’ILE AU TRÉSOR (Treasure Island) John Hough

1974 DIX PETITS NÈGRES (Ein Unbekannter rechnet ab) Peter Collinson

1976 LE VOYAGE DES DAMNÉS (Voyage of the Damned) Stuart Rosenberg

1978 LA GRANDE BATAILLE (Il Grande Attacco) Umberto Lenzi

1979 LES MUPPETS, ÇA C’EST DU CINÉMA (The Muppet Movie) James Frawley

THE DOUBLE MCGUFFIN Joe Camp

1981 BUTTERFLY Matt Cimber

LA FOLLE HISTOIRE DU MONDE (History of the World: Part I) Mel Brooks

1982 SLAPSTICK (OF ANOTHER KIND)Steven Paul

Scénariste

1947 MONSIEUR VERDOUX Charles Chaplin

1966 LA BIBLE (The Bible – In the Beginning) John Huston

 

Orson Welles est le réalisateur, scénariste et comédien principal du film Citizen Kane qui demeure jusqu’à aujourd’hui l’un des chefs-d’œuvre incontestables du 7e art. Né le 6 mai 1915 à Kenosha dans le Wisconsin (États-Unis), Orson Welles fait figure de pionnier dans l’industrie du cinéma et de la radio. Grâce à son père, un inventeur qui fait fortune en commercialisant des lampes à carbure pour vélo, il côtoie des comédiens et des sportifs, tout en apprenant à jouer du piano et du violon auprès de sa mère, une pianiste concertiste. Mais l’enfance d’Orson Welles est loin d’être un long fleuve tranquille… À l’âge de quatre ans, ses parents se séparent et, cinq ans plus tard, sa mère disparaît des suites d’une jaunisse. Son père, devenu alcoolique lorsque son entreprise, jadis lucrative, décline, décède alors que son fils est âgé de treize ans.

Orson Welles trouve une forme de stabilité grâce à la bienveillance de Maurice Bernstein, qui le prend sous tutelle dans sa quinzième année. Bernstein décèle les talents créatifs du jeune homme et l’inscrit à la Todd School de Woodstock, dans l’Illinois, où il se découvre une passion pour le théâtre. Son maigre héritage en poche, il se rend ensuite en Irlande. À Dublin, il se présente comme une vedette de Broadway, et il suscite l’intérêt du public avec sa mise en scène du Juif Süss au Gate Theatre. À dix-neuf ans, sûr de lui et plein d’audace, le jeune acteur fait ses premiers pas à Broadway en interprétant le rôle de Tybalt dans une adaptation de Roméo et Juliette. Sa performance retient l’attention du réalisateur John Houseman qui lui propose de travailler avec lui dans le cadre du Federal Theatre Project. C’est le début d’une longue collaboration. En 1937, alors âgé de vingt-et-un ans, Orson Welles, qui vient de mettre en scène une libre adaptation de Macbeth avec des acteurs noirs, s’associe à Houseman pour fonder le Mercury Theatre. Leur première production, Jules César, dans une mise en scène évoquant le fascisme de Mussolini, est un triomphe. Le Mercury Theatre, après ses nombreux succès sur scène, aborde la radio avec une émission hebdomadaire intitulée The Mercury Theatre on the Air diffusée sur les ondes de la CBS entre 1938 et 1940, puis en 1946.

Les critiques ne tarissent pas d’éloge sur l’émission, mais l’audimat est faible. Le 30 octobre 1938, tout bascule lorsqu’Orson Welles diffuse son émission librement adaptée du livre La Guerre des mondes d’H.G. Wells. Orchestrant une interruption exceptionnelle des programmes, Wells annonce à l’antenne, avec force détails et le souffle court, que les Martiens ont envahi le New Jersey. La réalisation très réaliste de l’émission, entrecoupée de bulletins d’alerte et de témoignages en direct à l’antenne, provoque un mouvement de panique et de frayeur chez les auditeurs qui croient à une véritable invasion…

La colère de certains de ces derniers n’empêchera pas Orson Welles d’être reconnu comme un génie, lui ouvrant ainsi les portes d’Hollywood. En 1940, il signe un contrat de 225 000 dollars avec le studio RKO qui lui commande le scénario, la réalisation et la production de deux longs métrages. Ce contrat, qui laisse à un jeune réalisateur débutant – Orson Welles est alors âgé d’à peine vingt-quatre ans –une entière liberté ainsi qu’un pourcentage sur les bénéfices, est une première sans précédent pour les studios.

Le succès n’est pourtant pas immédiat. Welles se penche d’abord sur une adaptation cinématographique du roman Au cœur des ténèbres de Joseph Conrad. Il interrompt ce projet ambitieux pour ce qui deviendra son vrai premier long métrage, Citizen Kane. S’inspirant de la vie du magnat de la presse William Randolph Hearst, Citizen Kane retrace l’ascension et la chute du journaliste Charles Foster Kane, interprété par Orson Welles lui-même. Hearst, fou de rage, refuse que la moindre ligne sur le film paraisse dans ses journaux, participant ainsi à un box-office en salles décevant. Le film sera pourtant nommé à neuf Oscars et permettra à Orson Welles de remporter celui du Meilleur Scénario original. Welles y déploie de multiples innovations techniques : le recours à la profondeur de champ – procédé permettant de capturer tous les éléments d’un plan dans ses moindres détails –, plongées/contre-plongées, une multitude de points de vue dans la narration… Citizen Kane est désormais considéré comme l’un des plus grands films de tous les temps.

La Splendeur des Amberson, son deuxième long métrage, est moins ambitieux sur le plan technique que Citizen Kane. Son tournage est interrompu par une escapade à Rio de Janeiro pour qu’Orson Welles y tourne un documentaire. À son retour, il s’aperçoit, furieux, que la RKO a fait un nouveau montage de la fin de son film. S’ensuivent de multiples règlements de compte entre le réalisateur et la RKO, laquelle laisse entendre que Welles est incapable de travailler en équipe ou même de tenir un budget.

Bien que très affecté par la polémique, Welles continue à vivre à Hollywood pendant plusieurs années. Il épouse la « déesse de l’amour » Rita Hayworth en 1943, puis réalise Le Criminel (1946) et Macbeth (1948). Mais il semble avoir fait son temps en Californie, il décide de se séparer de Rita Hayworth et s’impose un exil de dix ans à l’écart du système hollywoodien. Il réapparaît plus tard à l’écran, notamment dans Le Troisième Homme de Carol Reed (1949), et il réalise plusieurs longs métrages dont Othello (1952) et Dossier secret (1955). Il fait son retour à Hollywood en 1958 avec La Soif du mal, qui enregistre peu de recettes, mais renoue avec le succès commercial avec l’adaptation du roman de Franz Kafka, Le Procès (1962). Au cours des années 1970, Orson Welles accumule les difficultés, et notamment des problèmes de santé dus à son obésité.

Il reste cependant très actif durant les dix dernières années de sa vie, multipliant les projets : porte-parole des vins californiens Paul-Masson, comédien dans la série télévisée d’ABC Clair de lune, réalisateur du documentaire Filming « Othello », consacré au making-of de son film de 1952.

Vers la fin de sa vie, Welles renoue finalement avec Hollywood. En 1975, il reçoit le Lifetime Achievement Award de L’American Film Institute, et, en 1985, le D.W. Griffith Award, la plus haute distinction décernée par le syndicat des Réalisateurs américains (Directors Guild of America). Il donne sa dernière interview lors de l’émission du Merv Griffin Show du 10 octobre 1985, deux heures à peine avant son décès, suite à un infarctus, dans sa maison de Los Angeles.

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