Créé dans le but de défendre les voix féminines du cinéma jusque là souvent absentes des grands festivals, ou au moins trop peu suffisamment représentées dans les sélections et encore pire dans les palmarès, le Festival International de Films de Femmes de Créteil a présenté en quarante éditions des films de femmes venus de tous les continents et de toutes les époques. Cette quarantième édition événement reste ancrée dans les films d’aujourd’hui et les auteurs de demain mais repensera également à sa longue histoire. La fondatrice Jackie Buet, toujours en charge de la programmation,
Plusieurs réalisatrices marquantes seront présentes durant ces jours de festival. Margarethe Von Trotta, une habituée de Créteil, est l’invitée d’honneur du Festival. Elle présentera deux inédits : Le Long Silence sur le quotidien d’un magistrat et de sa femme face à la mafia et Vision, évocation biographique de la mère abbesse Hildegarde Von Bingen, une nonne hors norme du XIe siècle, érudite, compositrice et féministe avant la lettre, interprétée par Barbara Sukowa qu’elle a notamment dirigée dans Hannah Arendt en 2013. Ce samedi 10 mars elle donnera une master class à 16h30, suivie d’une lecture de textes. Dans le cadre d’un hommage à son parcours, il sera également possible de voir ou revoir Trois Soeurs, Rosa Luxemburg, Le Long Silence, Rosenstrasse et Hannah Arendt dont elle est la réalisatrice, ainsi que Le Coup de grâce de Volker Schlöndorff dont elle est l’actrice principale et la co-réalisatrice.
Trop méconnue, Márta Mészáros, la première réalisatrice hongroise, primée à Cannes en 1984 (Grand prix pour Journal à mes enfants) et Ours d’or à Berlin pour Adoption en 1975 est invitée avec son dernier film, Aurora Borealis : Northern Lights le jeudi 15 mars à 18h30. Ce drame aborde, à travers l’histoire d’une jeune femme, les blessures irréparables causées par les guerres dans une Europe brisée. La réalisatrice sera présente ce soir à 19h30 dans un autre cadre (Toute la mémoire du monde) pour présenter à la Filmothèque du Quartier latin avec Marina Vlady Elles deux (1978) film où une directrice de foyer pour ouvrières, insatisfaite de sa vie, et une jeune mère en quête d’un refuge deviennent proches, en dépit de leurs différences. Cette soirée se fera donc en concurrence avec la soirée d’ouverture de Créteil qui permettra de découvrir un film qui a fait ses débuts à la Quinzaine des Réalisateurs l’an dernier : Marlina, la tueuse en 4 actes de l’indonésienne Mouly Surya qui avait présenté en 2014 à Créteil en compétition son deuxième film, What They Don’t Talk About When They Talk About Love. Son nouveau long-métrage est une sorte de croisement entre le western et le «rape and revenge movie». There will be blood…
La soirée officielle des quarante ans aura lieu le avec une autre avant-première, celle de Spoor d’Agnieszka Holland, en compétition à Berlin en 2017. Une fantaisie policière qui évoque les feuilletons télé de style Top of the Lake, avec en tête de distribution un personnage féminin fort et bougon, une ermite sexagénaire qui réunit petit à petit, bien malgré elle, une sympathique communauté qui la ramène vers une humanité qu’elle fuyait. Le final réussi rattrape les quelques défauts de ce film à l’écologie radicale. Ce que l’on retient surtout de ce drame, plus que la partie policière franchement convenue, ce sont ses rencontres avec d’autres solitaires attachants dont ses amoureux bien différents et un informaticien qui ne s’autorise que 80 objets dans son lieu de vie.
Autre réalisatrice à ne pas manquer, l’italienne Lorenza Mazzetti, 93 ans, seule cinéaste du Free cinema, qui n’a tourné que deux moyens-métrages dont Together (dont vous pouvez retrouver la critique en cliquant sur ce lien) autour de deux dockers sourds-muets qui pourraient être des cousins de Laurel et Hardy si leur histoire n’était si tragique. Rencontre le vendredi 16 mars à 18h30 après la projection de ce film et de K, tiré de La Métamorphose de Kafka, un récit d’aliénation très autobiographique tourné clandestinement. Un hommage sera également rendu à la réalisatrice suédoise Maï Zetterling avec le film Flickorna qui révéla Bibi Anderson, Harriet Anderson et Gunnel Lindblom, un autre à Delphine Seyrig avec Sois belle et tais-toi le dimanche 11 à 16h.
Parmi les autres éléments de programmation : une table ronde sur le rapport de la critique cinématographique aux études de genre et études féministes le 14 mars à 18h ; un colloque «états générEux du cinéma des femmes» le jeudi 15 mars de 10h à 13h30 autour d’autres festivals de films de femmes dans le monde, ainsi qu’un échange sur la dimension historique des personnages de femmes dans les films de réalisatrices ; une thématique Femmes / Genre / Cinéma et comme chaque année une opportunité de rattrapage de quelques films de réalisatrices sortis dans l’année dont La Fille de Brest d’Emmanuelle Bercot, M de et avec Sara Forestier et Western de Valeska Grisebach.
Le Jury de la compétition fiction est composé des réalisatrices Blandine Lenoir (le court Monsieur l’abbé, les longs Zouzou et Aurore) et Nadia El Fani (Laïcité Inch’allah !), de la directrice de la photo Sarah Blum (le court Vers la tendresse d’Alice Diop, César du court 2017), de la critique Iris Brey (le livre Sex and the Series) et de Damien Truchot qui programme le Cinéma L’Archipel à Paris.
La compétition
Longs-métrages de fiction
Alanis d’Anahí Berneri (Argentine)
Birds are singing in Kigali de Joanna Kos-Krauze et Krzysztof Krauze (Pologne)
I Am truly a drop of sun on earth d’Elene Naveriani (Suisse/Géorgie)
Medea d’Alexandra Latishev Salazar (Costa Rica/Chili)
Pin Cushion de Deborah Haywood (Royaume-Uni)
Le Viol du routier de Juliette Chenais de Busscher (France)
Longs-métrages documentaire (Prix Anna Politkovskaïa)
Almost Heaven de Carol Salter (Grande-Bretagne)
Droit devant de Marie Clements (Canada/Québec)
El Pacto de Adriana de Lissette Orozco (Chili)
I Realized I never wrote you a letter, mom de Masa Hilcisin (République tchèque)
Orione de Toia Bonino (Argentine)
See you tomorrow god willing ! d’Ainara Vera (Espagne/Norvège)
Cinémas en mouvement – réalisatrices européennes
Beyond Dreams de Rojda Sekersöz (Suède)
Beyond Words d’Urzsula Antoniak (Pays-Bas/Pologne)
The Miner de Hanna Slak (Slovénie/Croatie)
Miracle d’Eglė Vertelytė (Lituanie/Bulgarie/Pologne)
Quit staring at my plate de Hana Jušić (Croatie/Danemark)
Le Roi des Belges de Jessica Woodworth et Peter Brosens (Belgique/Pays-Bas/Bulgarie)
Courts-métrages
A River Twice d’Audrey Lam (Australie)
Bakyt de Meerim Dogdurbekova (Kirghizistan)
The Burden de Niki Lindroth von Bahr (Suède)
Calamity de Séverine de Streyker et Maxime Feyers (Belgique)
Call of cuteness de Brenda Lien (Allemagne)
Dans la cour de Vivianne Gauthier de Marie-Claude Fournier (Québec)
Dog Meat de Kseniya Tischenko (Russie)
Fry Day de Laura Moss (Etats-Unis)
Heimat d’Emi Buchwald (Pologne)
I Will Always Love You, Conny d’Amanda Kernell (Suède)
Kiem Holijanda de Sarah Veltmeyer (Pays-Bas)
Larsen de Margot Gallimard (France)
L’Ombre de la mariée d’Alessandra Pescetta (Italie)
Salvation de Thóra Hilmarsdóttir (Islande/Suède)
Sea Monster de Kassandra Tomczyk et Daniel Rocque (Canada)
Spring de Laurel Parmet (Etats-Unis)
Tudo o que imagino de Leonor Noivo (Portugal)
Un peu après minuit de Anne-Marie Puga et Jean-Raymond Garcia (France)