Festival Cinémas Différents et Expérimentaux de Paris 2016 : L’Humour est la politesse du désespoir

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Centre Pompidou, le mercredi 5 octobre 2016. Dans le cadre du festival des cinémas différents et expérimentaux, le spectateur a pu découvrir un choix de courts-métrages à la fois loufoques et cocasses, absurdes et nonsensiques. Sélectionnés par Mark Tascano, restaurateur de films à l’American Film Archives de New-York, ces différentes œuvres sont une manière d’aller à l’encontre d’une idée reçue communément admise, à savoir que les films dits « expérimentaux » se définissent par un esprit de sérieux trop appuyé. A la vision de ce corpus de films, dont une place de choix est accordée aux dessins animés, difficile de ne pas nier l’aspect comico-régressif d’une partie de ces courts-métrage qui, en effet, contredit le cliché tenace du caractère soi-disant sévère, ou austère, de ce pan cinématographique.

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A cet égard, le premier court-métrage (Century, Kevin Jerome Everson, 2012) est assez révélateur de cette disposition à faire éclater l’imperturbabilité du cinéma avant-gardiste en une démonstration primaire. Au sein d’une décharge de carrosserie, une voiture vaguement décatie, se fait réduire en miettes par une mâchoire en métal. Spectacle jouissif filmé intégralement en plan fixe. Le bruit de la tôle concassé ajoute à la fascination de ce tableau apocalyptique. Dans le dessein d’aplatir le véhicule, la grue fait choir sur celui-ci, et à plusieurs reprises, un objet métallique au poids conséquent. Ainsi, c’est dans la répétition du geste de la grue, dans son hésitation également, que s’éprouve une certaine absurdité, un brin surréaliste par ailleurs, ajoutant à la drôlerie de la situation. Le tout sans se départir d’un certain esprit anarchique jubilatoire où la gratuité de la destruction, sans aucun motif apparent, s’accompagne d’un dispositif filmique minimaliste : le film n’est réductible qu’à ce simple motif scopique : observer la destruction et l’aplanissement d’une voiture.

Le deuxième film (Deep Westurn, Robert Nelson, 1974), diffusé lors de cette rétrospective, est un exercice de montage aux accents burlesques particulièrement réjouissant. Quatre personnes se laissent, continuellement, tomber de chaises, tout en prenant des poses sérieuses lors de leurs diverses chutes. Activité infantile et puérile qui pourrait évoquer, dans une moindre mesure, certains artistes du muet, tels Buster Keaton ou Laurel et Hardy, bien que la scansion des gags ne soit pas aussi bien rythmé que ceux du muet. Au contraire, une impression plus brute, spontanée, se dégage de ce court-métrage pétillant. Importe, au final, le geste régressif de la chute filmé plusieurs fois, accompagné d’un montage différent et illogique à chaque fois.

Au sein de ce choix d’œuvres contemporaines, ou plus anciennes, se faisait remarquer un court-métrage de Gus Van Sant (My Friend, 1982). Au cours de diverses situations, devant une affiche composée d’un mannequin bellâtre par exemple ou durant un repas mondain, Gus Van Sant se tourne vers la caméra, en déclamant quelques aphorismes et remarques au laconisme exagéré sans se départir d’un esprit sérieux ajoutant à l’humour pince-sans-rire du film.

Dans North Korean Pop (Gabe Mangold, 2015), l’on trouve Kim Jong-Un dans des postures provocantes et univoques : lécher les fesses d’une chèvre, joueur de basket-ball… Dessiné sous des traits incisifs, le chef suprême joue aux jeux vidéo avec une hargne peu commune. Le réalisateur retourne l’image pompière du dictateur nord-coréen et transforme celui-ci en un être puéril et pervers. Et soyons gré à Dennis Rodman de nous donner cette opportunité d’observer le chef suprême de la Corée du Nord dans ces postures transgressives.

https://vimeo.com/150386558

The Last Interview with P. Passolini (Chris Langdon, 1975) est à la fois une parodie et une caricature de feu Pier Paolo Pasolini. Dans cette œuvre, l’on retrouve le metteur en scène d’Accatone, engoncé dans son fauteuil, et répondant à une série de questions dont le caractère incompréhensible est en fait une manière de se moquer de l’intellectualisme de Pasolini. Ainsi, nous le voyons dans sa chaise, adoptant des poses hiératiques d’un artiste concerné, tout en répondant de façon absconse aux questions tout aussi sibyllines. Caché intégralement dans la pénombre, l’artiste n’est pas un être comme les autres, trop important pour être vu par le commun des mortels.

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