Critique : Doctor Strange

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Doctor Strange

Etats-Unis, 2016
Titre original : Doctor Strange
Réalisateur : Scott Derrickson
Scénario : Jon Spaihts, Scott Derrickson & C. Robert Cargill
Acteurs : Benedict Cumberbatch, Chiwetel Ejiofor, Rachel McAdams
Distribution : Walt Disney Studios France
Durée : 1h55
Genre : Fantastique
Date de sortie : 26 octobre 2016

Note : 3/5

En termes de sophistication, le reflet filmique de l’univers Marvel n’a pas encore dit son dernier mot. Alors que l’on pouvait noter une fâcheuse tendance à l’uniformisation lénifiante lors des aventures de super-héros les plus récentes, celles des Avengers en tête, l’entrée en la matière de Doctor Strange, le plus cérébral des justiciers du futur, fait preuve d’une certaine originalité. Le film qui porte son nom n’est certes pas destiné à convertir les ultimes spectateurs réticents à succomber au culte Marvel, actuellement la plus grosse machine à sous d’Hollywood. Mais il s’agit néanmoins d’un spectacle rondement mené, qui diversifie suffisamment la recette éprouvée depuis bientôt dix ans pour ne pas nous faire tituber d’un déjà-vu à l’autre. A l’exception notable des effets spéciaux, qui ne font en fait que répéter à l’infini et avec une prouesse technique sans faille la déformation de la perception physique du monde ayant déjà fait sensation dans Inception de Christopher Nolan en 2010.

Synopsis : Le docteur Stephen Strange est un neurochirurgien aussi brillant qu’arrogant. Seules ses prouesses médicales l’intéressent, au détriment d’une vie privée inexistante, dans laquelle sa consœur plus altruiste Christine Palmer ne trouve par conséquent pas sa place. En route pour une soirée prestigieuse, Strange est victime d’un grave accident de la route. Il s’en sort par miracle, mais perd la faculté de bouger ses doigts tel que sa profession hautement spécialisée l’exigerait. Il est sur le point de perdre espoir, quand il apprend qu’un autre miraculé, Jonathan Pangborn, a su réapprendre à marcher, grâce à une mystérieuse thérapie apprise en Asie. Strange se rend immédiatement sur place et finit par être accepté comme disciple de l’Ancienne, la prêtresse d’une force mystique qui veille sur l’équilibre du monde.

Pas le temps de marchander

Le cinquième film du réalisateur Scott Derrickson s’emploie assez habilement à répondre aux attentes des fans inconditionnels de l’univers Marvel, abreuvés depuis des années à la même soupe en perte de saveur, tout en conférant une identité propre à son héros jusqu’à présent absent du grand écran. Les grosses ficelles de l’affrontement manichéen tardent ainsi à se faire sentir, grâce à une présentation du protagoniste certes assez schématique, quoique habitée du mélange séduisant entre l’intensité et l’espièglerie qui fait justement tout le charme de ce personnage tiraillé entre différentes formes d’excellence. Le conte moral du surdoué obnubilé par son propre talent, puis sans surprise puni sévèrement pour autant de mégalomanie, est vite relativisé par une plongée dans des mondes parallèles mystiques, qui tranchent agréablement avec les mythes et les légendes exploitées plutôt grossièrement par d’autres héros Marvel comme Thor ou Captain America. Le fond spirituel du récit relève bien évidemment du même genre de charabia approximatif qui exerce son influence sur le cinéma de science-fiction au plus tard depuis Matrix des frères Wachowski. Or, par le biais d’un peu de sérénité orientale, le ton du film échappe aux règles trop prévisibles du conflit archaïque entre le Bien et le Mal, qui avaient rendu les dernières productions Marvel si ennuyeuses de ce point de vue-là.

La cape de fer

A ses débuts prometteurs, le personnage de Doctor Strange n’est pas sans lien de parenté avec Iron Man. Tandis que les deux hommes se croient assez forts pour ne devoir dépendre de personne, un mauvais coup du sort les oblige à réviser leurs priorités. Cette courbe de l’apprentissage, le héros de ce film-ci, interprété avec une dose appréciable d’ironie par Benedict Cumberbatch, la suit avec une certaine désinvolture et surtout sans laisser présager d’emblée l’issue de sa transformation. Même si les camps antagonistes se sont formés à la fin de l’intrigue, le rôle de Doctor Strange a su préserver juste assez d’ambiguïté pour ne pas se ranger d’ores et déjà parmi l’armée de super-héros indéfinissable, au mode opératoire rébarbatif que sont devenus les Avengers au bout de quelques films seulement. Ce sont également la variété et la richesse des personnages secondaires, tels que Rachel McAdams dans l’emploi généralement peu valorisant, voire misogyne de la copine dépassée par les événements et Chiwetel Ejiofor dans celui de l’ami de moins en moins solidaire à la cause défendue par le nouveau gardien du temple, qui nous donnent l’espoir que les films de Doctor Strange sauront rester passablement à l’écart du moule Marvel. Précisément à l’encontre des exploits successifs de Iron Man qui, lui, incarne désormais à la perfection les excès narcissiques de cet univers de plus en plus aseptisé.

Conclusion

Il n’y a pas de quoi crier à la révélation, ni à la révolution de palais, face à cette deuxième production Marvel de l’année. Doctor Strange a néanmoins su nous convaincre par sa narration relativement élégante, ainsi que par ses effets efficaces, à défaut d’être originaux. Et puis, un film dans lequel deux de nos acteurs préférés, Tilda Swinton et Benjamin Bratt, tiennent des rôles plus ou moins substantiels ne peut pas être foncièrement mauvais !

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