Le prince oublié
France, Belgique : 2020
Réalisation : Michel Hazanavicius
Scénario : Noé Debré, Michel Hazanavicius, Bruno Merle
Acteurs : Omar Sy, Bérénice Bejo, François Damiens
Editeur : Pathé
Durée : 1h41
Genre : Comédie, Fantastique
Date de sortie cinéma : 12 février 2020
Date de sortie VOD : 8 avril 2020
Note : 3/5
Synopsis : Sofia, 8 ans, vit seule avec son père. Tous les soirs, il lui invente une histoire pour l’endormir. Ses récits extraordinaires prennent vie dans un monde imaginaire où l’héroïne est toujours la princesse Sofia, et son père, le Prince courageux. Mais trois ans plus tard, quand Sofia rentre au collège, elle n’a plus besoin de ces histoires. Désarmé, son père va devoir accepter que sa fille grandisse et s’éloigne de lui. Dans leur Monde imaginaire, le Prince va alors devoir affronter la plus épique de toutes ses aventures pour conserver une place dans l’histoires…
Les univers féeriques et les récits de « coming of age » font souvent bon ménage. Passage à l’âge adulte, rapport aux autres, acceptation de soi et découverte de la sexualité demeurent, pour tout un chacun, des notions nimbées de mystères en tous genres, et le fait de les illustrer au cinéma en ayant recours à des symboles allant chercher du côté du conte et du fantastique est une belle idée, pleine de poésie. Avec Le prince oublié, Michel Hazanavicius décide cependant d’inverser le postulat habituel du coming of age, en nous proposant de découvrir le passage de l’âge adulte de la jeune Sofia à travers les yeux de son père, Djibi. Quand sa fille lui demande de ne plus lui raconter la traditionnelle histoire pour l’endormir, le monde de Djibi s’écroule : quel sera son rôle auprès d’elle s’il n’a plus d’histoires à lui inventer ? De ce fait, le brave prince de son monde imaginaire, qui chaque soir sauvait sa princesse des pires dangers, se retrouve également au chômage technique.
Le prince oublié alterne les passages dans un univers de contes de fées avec la réalité de cette jeune fille qui passe de l’enfance à l’adolescence. Ces nombreux allers et retours entre le monde réel et le monde imaginaire, prenant la forme d’un grand plateau de tournage aux couleurs vives et rempli de personnages improbables, pourront peut-être dérouter les spectateurs, notamment les plus jeunes. L’idée bien sûr est de faire comprendre que ce père, protecteur et aimant, ne parvient pas tout à fait à réaliser que sa fille n’est plus une « petite fille », dont l’existence est régie par les jeux, les bonbons et les histoires mettant en scène un héroïque prince de conte de fées. Le cocon familial, resserré autour du couple père / fille après la mort prématurée de la mère, est aussi finement que joyeusement représenté, sans misérabilisme ni pathos excessif ou tire-larmes.
Grand spectacle familial, aux couleurs vives et aux effets spéciaux nombreux et réussis, Le prince oublié tire sa réussite de la chaleur exprimée par la relation père / fille, portée par le jeu sensible d’Omar Sy et Sarah Gaye. Le film met par ailleurs progressivement en évidence le fait que l’existence toute entière de Djibi et Sofia va se retrouver chamboulée par le passage de la jeune fille à l’âge adulte. Leur existence ainsi que celle du monde imaginaire qui les relie, dont les personnages oubliés, errant sans fin dans les grottes de leur mémoire, finissent littéralement par disparaître…
Bien sûr, comme dans tous les films de Michel Hazanavicius, la bonne fée qui aidera le héros à surmonter ces épreuves prendra la forme d’une femme, incarnée par Bérénice Béjo – l’épouse du réalisateur. Sa folie douce parviendra à calmer l’humour mélancolique de notre Omar Sy national, toujours formidable, même quand il ne force pas son talent. A leurs côtés, dans le rôle de Pritprout (sic), on trouvera le toujours impeccable François Damiens. Version inversée de l’histoire de « Peter Pan » au cœur duquel un père (donc un adulte) devra décider d’abandonner le monde de l’enfance afin de laisser grandir sa fille à la réalité, Le prince oublié s’impose au final comme un objet cinématographique hybride, étrange, tendre et coloré, et comme un récit de coming of age un peu particulier. Particulier parce qu’il en dit au final probablement bien d’avantage sur les angoisses d’un père que sur le passage à l’âge adulte d’une jeune fille.
Sorti dans les salles obscures le 12 février 2020, Le prince oublié a subi de plein fouet la crise sanitaire du COVID-19, dont il fut une des victimes collatérales les plus spectaculaires. Même si le film de Michel Hazanavicius avait déjà réuni 862.000 français dans les salles obscures quand les cinémas ont du fermer leurs portes, le fait de se voir « privé » d’exploitation durant les vacances scolaires de pâques a probablement coûté au film des centaines de milliers d’entrées. Mais les nombreuses familles désireuses de découvrir le film ont pu se rattraper en VOD : la loi du 23 mars 2020, dite « d’urgence pour faire face à l’épidémie du Covid-19 », a en effet autorisé Pathé (et les autres distributeurs) à réduire le délai d’accès à la VOD pour les œuvres cinématographiques qui faisaient encore l’objet d’une exploitation en salles au 14 mars.
Le prince oublié est de ce fait disponible depuis le 8 avril en VOD à l’acte et en téléchargement définitif sur la majorité des plate-formes de Vidéo à la demande : MyTF1, Orange, FilmoTV, Canal VOD, UniversCiné… La sortie du film en Blu-ray / DVD est programmée au 17 juin.