Le scénariste américain Robert Towne est décédé avant-hier à Los Angeles. Il était âgé de 89 ans. Surtout connu pour ses scénarios au début des années 1970, comme La Dernière corvée et Shampoo de Hal Ashby, ainsi que le classique Chinatown de Roman Polanski, Towne était ensuite devenu l’un des script doctors les plus recherchés d’Hollywood. Plus tard, il avait collaboré sur de nombreux films avec Tom Cruise, Jours de tonnerre de Tony Scott, La Firme de Sydney Pollack et Mission : impossible de Brian De Palma. Par contre, ses quatre tentatives en tant que réalisateur – notamment Tequila Sunrise avec Michelle Pfeiffer et Mel Gibson – ont été couronnées de moins de succès.
A l’image de bon nombre de ses contemporains, Robert Towne avait fait ses premiers pas dans le monde du cinéma grâce au producteur mythique Roger Corman. En 1960, il avait à la fois écrit le scénario et tenu un second rôle dans La Dernière femme sur terre de Corman. L’année suivante, il avait de nouveau fait l’acteur dans La Créature de la mer hantée, toujours de Corman, avant d’offrir sa plume à la télévision jusqu’au milieu de la décennie. Après l’adaptation de Edgar Allan Poe La Tombe de Ligeia par Roger Corman, Robert Towne avait pour la première fois offert ses conseils au scénario d’un autre, en l’occurrence celui de Bonnie et Clyde, réalisé par Arthur Penn et écrit par David Newman et Robert Benton.
Une tâche plutôt alimentaire et non créditée qui allait lui réussir pendant les vingt ans à venir, grâce à ses collaborations avec les réalisateurs Jack Nicholson (Vas-y fonce), Robert Altman (John McCabe), Richard Fleischer (Les Flics ne dorment pas la nuit), Francis Ford Coppola (Le Parrain), Alan J. Pakula (A cause d’un assassinat), Arthur Penn (Missouri Breaks), Michael Anderson (Orca), Warren Beatty et Buck Henry (Le Ciel peut attendre), William Friedkin (Le Coup du siècle), Hal Ashby (Huit millions de façons de mourir) et Roman Polanski (Frantic).
Or, petit à petit, Robert Towne allait de même signer des scénarios à part entière, à commencer par Pancho Villa de Buzz Kulik en 1968. Cinq ans plus tard, il avait écrit coup sur coup l’histoire de trois films majeurs du Nouvel Hollywood : La Dernière corvée de Hal Ashby, Chinatown de Roman Polanski et Shampoo également de Ashby. Le tout entrecoupé de Yakuza de Sydney Pollack.
Curieusement, il fallait attendre ensuite près de dix ans, avant de revoir le nom de Robert Towne apparaître au générique d’un film pas réalisé par lui-même. Ce fut le cas de Greystoke La Légende de Tarzan de Hugh Hudson – une expérience si douloureuse que le scénariste y avait échangé son nom contre celui de son chien –, puis de quatre collaborations avec Tom Cruise dans Jours de tonnerre de Tony Scott, La Firme de Sydney Pollack, Mission : impossible de Brian De Palma et Mission : impossible 2 de John Woo.
Par ailleurs, Towne avait retrouvé en 1990 Jack Nicholson, à la fois acteur et réalisateur sur ce projet, pour la suite de Chinatown, The Two Jakes Piège pour un privé.
L’essentiel des vingt dernières années de sa vie active, Robert Towne l’avait passé à réaliser des films. Un changement de casquette guère probant, comme le démontre le faible nombre de ses longs-métrages. Après le drame sportif Un ticket pour les jeux avec Mariel Hemingway et Scott Glenn en 1982, puis le thriller Tequila Sunrise avec Michelle Pfeiffer et Mel Gibson en 1988, il fallait attendre dix ans avant la sortie de Without Limits, un autre drame sportif, cette fois avec Billy Crudup et Donald Sutherland et produit par Tom Cruise. Son dernier film, le drame romantique Demande à la poussière avec Colin Farrell et Salma Hayek, était de même passé plutôt inaperçu en 2006.
Robert Towne a été nommé à quatre reprises à l’Oscar du Meilleur scénario, côté adaptation pour La Dernière corvée et Greystoke La Légende de Tarzan, ainsi que côté original pour Chinatown et Shampoo. Il l’avait gagné en 1975 pour Chinatown. Ses confrères de la Writers Guild l’avaient nommé pour ces quatre mêmes films, avec des trophées supplémentaires pour Shampoo dans la catégorie comique, le prix honorifique en 1997 et en tant que l’un des producteurs de la série à succès « Mad Men » en 2016.