L’acteur suisse Bruno Ganz est décédé le 16 février à Zürich des suites d’un cancer. Il était âgé de 77 ans. L’un des plus grands acteurs du cinéma européen de ces quarante dernières années, Ganz avait su jongler adroitement entre des chefs-d’œuvre du Septième Art, comme Les Ailes du désir de Wim Wenders et L’Éternité et un jour de Theo Angelopoulos, et des productions plus commerciales, tels que Un crime dans la tête de Jonathan Demme et Sans identité de Jaume Collet-Serra. Son interprétation de Adolf Hitler dans La Chute de Oliver Hirschbiegel avait fait couler beaucoup d’encre en 2004/05.
Les quinze premières années de la carrière de Bruno Ganz, de 1960 à ’75, étaient essentiellement consacrées au théâtre et à la télévision. Ce n’est qu’en ’76 qu’il s’impose au cinéma, d’abord dans Lumière de Jeanne Moreau et Le Canard sauvage de Hans W. Geissendörfer, puis surtout dans La Marquise d’O de Éric Rohmer. Il enchaîne rapidement sur des films marquants, tels que L’Ami américain de Wim Wenders et Nosferatu Fantôme de la nuit de Werner Herzog, ainsi que La Femme gauchère de Peter Handke, Ces garçons qui venaient du Brésil de Franklin J. Schaffner et Le Couteau dans la tête de Reinhard Hauff. Alors que les deux sommets de sa filmographie des années ’80 sont indubitablement Dans la ville blanche de Alain Tanner – César du Meilleur Film francophone en 1984 – et son rôle emblématique de l’ange déchu Damiel dans Les Ailes du désir de Wim Wenders, il collabore également pendant cette période avec Claude Goretta (La Provinciale), Mauro Bolognini (La Dame aux camélias), Jerzy Skolimowski (Haut les mains), Volker Schlöndorff (Le Faussaire) et Rudolf Thome (La Main dans l’ombre).
Dans les années ’90, il allait retrouver Wim Wenders pour un troisième film, Si loin si proche, la suite des Ailes du désir en 1993. Auparavant, on a pu le voir dans Les Enfants de la nature de Fridrik Thor Fridriksson et L’Absence de Peter Handke, puis dans Saint-Ex de Anand Tucker, L’Éternité et un jour de Theo Angelopoulos – Palme d’or au Festival de Cannes en 1998 –, Pain tulipes et comédie de Silvio Soldini et Un crime dans la tête de Jonathan Demme. En 2004, La Chute de Oliver Hirschbiegel et son interprétation terrifiante de Hitler allaient donner un second souffle à sa carrière, désormais ponctuée de L’Homme sans âge de Francis Ford Coppola, La Bande à Baader de Uli Edel, La Poussière du temps de Theo Angelopoulos, The Reader de Stephen Daldry, Sans identité de Jaume Collet-Serra, Sport de filles de Patricia Mazuy, Michael Kohlhaas de Arnaud Des Pallières, Cartel de Ridley Scott et Refroidis de Hans Petter Moland. Ces dernières années, il a entre autres collaboré avec Barbet Schroeder (Amnesia), Atom Egoyan (Remember), Jacob Berger (Un juif pour l’exemple), Sally Potter (The Party), Matti Geschonneck (In Zeiten des abnehmenden Lichts), Germinal Roaux (Fortuna) et Lars von Trier (The House that Jack built). Il faisait partie de la distribution du prochain film de Terrence Malick, Radegund.
Bruno Ganz a été nommé à deux reprises au European Film Award du Meilleur acteur, pour Pain tulipes et comédie et La Chute. Il avait reçu le prix honorifique de l’Académie du cinéma européen en 2010. Entre 1976 et 2017, il a été nommé cinq fois aux Lolas, les prix du cinéma allemand, pour La Marquise d’O, Le Faussaire, Les Ailes du désir, La Chute et In Zeiten des abnehmenden Lichts. Il l’avait gagné pour le premier.