Le chanteur et acteur français Johnny Hallyday est décédé ce matin dans sa maison de Marnes-la-Coquette, près de Paris, d’un cancer du poumon. Il était âgé de 74 ans. Cette disparition marque la fin d’un long calvaire de maladie, vécu quasiment en direct ces dernières semaines, par le biais d’une couverture médiatique qui transmettait le moindre témoignage des proches qui se succédaient à son chevet. Car Johnny Hallyday, c’était un monument national, une vedette de la scène et accessoirement du cinéma, qui avait accompagné la vie de millions de Français au cours de sa carrière en dents de scie, pendant près de soixante ans. L’émotion nationale de voir cet Elvis Presley national nous quitter est donc logiquement à son comble : les chaînes de télévision et les radios passent en boucle les chansons de ce rockeur hors pair, compagnon de route de Eddy Mitchell et de Jacques Dutronc, qui a su se réinventer sans cesse et renouer ainsi avec ses innombrables fans. On évoque déjà la possibilité d’obsèques nationales, c’est dire à quel point Johnny Hallyday était un pilier de la culture populaire française, avec ses plus de 120 millions de disques vendus et une présence ininterrompue sur scène, comme encore l’été passé lors de la tournée des Vieilles Canailles, qui implique, d’un point de vue statistique, qu’un Français sur deux l’aurait vu de la sorte.
Nous ne prétendons nullement être un spécialiste de la chanson française et notre découverte tardive de Johnny Hallyday, à notre arrivée en France au milieu des années 1990, nous a sans doute laissé passer à côté de ce phénomène typiquement français. Cette nécrologie se limitera donc à son travail pour le cinéma, qui ne constitue certes pas le gros de son œuvre, mais qui s’inscrit dans un subtil travail de continuation, voire de mise en abîme, de son aura de bête de scène incommensurable. Ses premières apparitions sur grand écran dans les années ’60 et ’70 se résument essentiellement à des passages en tant que double direct de lui-même, contribuant à la création de sa propre légende dans des films vaguement autobiographiques comme D’où viens-tu Johnny ? de Noël Howard. Il tient ensuite des rôles progressivement plus importants dans des films mineurs tels que Cherchez l’idole de Michel Boisrond, A tout casser de John Berry, Le Spécialiste de Sergio Corbucci, Point de chute de Robert Hossein, L’Aventure c’est l’aventure de Claude Lelouch et L’Animal de Claude Zidi.
C’est la rencontre improbable avec Jean-Luc Godard en 1985 pour Détective, grâce à laquelle commence le véritable travail d’acteur de Johnny Hallyday. Il fait désormais équipe à intervalle irrégulier avec des réalisateurs tels que Costa-Gavras (Conseil de famille), Pierre-William Glenn (Terminus), Hervé Palud (La Gamine), Stéphane Giusti (Pourquoi pas moi ?) et Laetitia Masson (Love me), avant de décrocher son premier grand rôle de vieillesse en 2002 dans L’Homme du train de Patrice Leconte aux côtés de Jean Rochefort, décédé il y a deux mois, suivi sept ans plus tard par un deuxième tour de force dans Vengeance de Johnnie To, présenté en compétition au Festival de Cannes en 2009. Entre-temps et depuis, on a également pu le voir dans Wanted de Brad Mirman, Les Rivières pourpres 2 Les Anges de l’apocalypse de Olivier Dahan, Quartier V.I.P. de Laurent Firode, Jean-Philippe de Laurent Tuel, La Panthère rose 2 de Harald Zwart, Salaud on t’aime et Chacun sa vie de Claude Lelouch, ainsi que Rock’n Roll de Guillaume Canet.
Même si son premier mariage avec la chanteuse Sylvie Vartan pendant quinze ans entre 1965 et ’80 avait surtout donné un coup de pouce à son statut de chanteur débutant, c’est sa liaison avec l’actrice Nathalie Baye au milieu des années ’80, qui est importante d’un point de vue filmique, puisqu’elle a produit sa fille Laura Smet, elle aussi devenue actrice. Coïncidence étrange de calendrier oblige, le nouveau film où Baye et sa fille partagent l’affiche, Les Gardiennes de Xavier Beauvois, sort aujourd’hui même sur les écrans français.