De retour en salles au mois de février 2022

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Lettre d’une inconnue © 1948 Bert Anderson / William Dozier Productions / Rampart Productions / Universal Pictures /
Les Bookmakers Tous droits réservés

Il n’en a peut-être pas l’air comme ça, mais on peut considérer le programme des reprises de ce mois de février globalement parfait ! Son grand oublié est hélas une fois de plus le cinéma français. Et le nombre raisonnable de films de nouveau à l’affiche – une quinzaine – risque de laisser sur leur faim les cinéphiles nostalgiques les plus boulimiques. Dans l’ensemble, les quatre mercredis du mois le plus court de 2022 présentent toutefois un mélange savamment dosé entre raretés sous forme de deux rétrospectives dédiées à Kinuyo Tanaka et Jiri Menzel d’un côté et grands classiques signés Fritz Lang, Marco Ferreri, Max Ophüls, Federico Fellini, Alexander Mackendrick et Francis Ford Coppola de l’autre.

La Lune s’est levée © 1955 Nikkatsu / Carlotta Films Tous droits réservés

Rétrospective Kinuyo Tanaka en six films

Les spectateurs les plus férus de cinéma nippon la connaissent sans doute pour ses interprétations dans les films récemment ressortis de Mikio Naruse (La Mère) et de Kenji Mizoguchi (Cinq femmes autour d’Utamaro). Pourtant, en dehors de sa carrière brillante devant la caméra, Kinuyo Tanaka (1910-1977) a également marqué l’Histoire du cinéma en tant que première réalisatrice d’envergure au Japon. A l’image de sa contemporaine Ida Lupino – si tant est qu’il faut toujours ramener tout à la référence du cinéma américain –, elle avait réalisé une poignée de films dans les années 1950 et ’60, tout en poursuivant sa carrière d’actrice dans des films tels que Les Contes de la lune vague après la pluie et L’Intendant Sansho de Kenji Mizoguchi.

L’intégrale de ses six longs-métrages sera visible pour la première fois sur grand écran à partir du 16 février grâce à Carlotta Films. L’histoire de cette rétrospective est à elle seule déjà passionnante, puisqu’il aura fallu les forces réunies des festivals de Locarno, de Cannes et du festival Lumière de Lyon pour la mener à bien. Pouvoir découvrir cette filmographie éclectique relève donc indubitablement du privilège, à la fois par sa rareté et par la qualité des films proposés dans de nouvelles restaurations. Sans occulter le fait que Kinuyo Tanaka était en quelque sorte une cinéaste féministe avant l’heure, par le biais de ses portraits saisissants de personnages féminins tels que Maternité éternelle, La Nuit des femmes ou encore Mademoiselle Ogin.

Une blonde émoustillante © 1981 Jiri Kucera / Filmové Studio Barrandov / Malavida Films Tous droits réservés

Rétrospective Jiri Menzel en trois films

Une semaine plus tard, à partir du 23 février donc, c’est un réalisateur à peine moins confidentiel que Kinuyo Tanaka qui est mis à l’honneur : le Tchèque Jiri Menzel (1938-2020). Deux de ces films ont beau avoir déjà été ressortis en France au cours de la première moitié des années 2010, dont Trains étroitement surveillés – Oscar du Meilleur Film étranger en 1968 – par l’infatigable distributeur de perles du cinéma de l’est européen Malavida Films, on découvrira toujours avec le même plaisir l’esprit décalé de Jiri Menzel, par ailleurs également acteur chez ses confrères Juraj Herz (L’Incinérateur de cadavres) et Costa-Gavras (La Petite apocalypse).

L’histoire joliment érotique des Trains a beau débarquer sur les écrans de vos salles de répertoire préférées un peu après la Saint-Valentin, ce premier long-métrage de Jiri Menzel constitue un beau point de départ à la découverte de l’univers du réalisateur. Situé quelque part entre une irrévérence saine et une compréhension caustique du monde, surtout du temps du Rideau de fer, son regard est plus que représentatif d’un cinéma tchèque auquel appartenait presque à la même époque Milos Forman, parti aussitôt en exil aux États-Unis.

Menzel, lui, est resté. Quitte à voir l’une de ses œuvres maîtresses, Alouettes Le Fil à la patte, interdite pendant plus de vingt ans, jusqu’à sa première triomphale au Festival de Berlin, où elle avait gagné l’Ours d’or en 1990. En parlant de Berlin, ce film-là y est inclus cette année dans la sélection Berlinale Classics et sera visible en France dans la même belle copie fraîchement restaurée !

Enfin, le titre de Une blonde émoustillante, présenté au Festival de Venise en 1981, se suffit à lui-même, tant il dégage un humour, une vitalité et un optimisme simplement irrésistibles.

Le Parrain © 1972 Jack Stager / Alfran Productions / Paramount Pictures France Tous droits réservés

A few crime stories – quelques histoires criminelles

Le cinéma anglophone, principalement américain quoique aussi britannique, est avant tout représenté ce mois-ci à travers des histoires de bandits mythiques. Le film de gangster ultime, Le Parrain de Francis Ford Coppola – Oscar du Meilleur Film en 1973 –, s’est offert une cure de jouvence sous forme de restauration en 4K que son distributeur historique Paramount ressortira dès le 23 février en Dolby Cinema.

Sept jours plus tôt, c’est une bande de malfrats infiniment plus amatrice, quoique également plus attachante, qui fait son grand retour avec le magistral Tueurs de dames de Alexander Mackendrick. Parions que Alec Guinness et comparses vous feront définitivement oublier le remake inutile des frères Coen sorti en 2004 !

Enfin, chez le même distributeur, Swashbuckler Films, sort dès aujourd’hui l’un des films les plus sombres du maître cynique Fritz Lang. Grâce à J’ai le droit de vivre, vous pourriez parfaire votre connaissance de la filmographie du réalisateur de Metropolis, particulièrement rendue accessible ces dernières années.

Nous l’avons déjà mentionné plus haut, le mois de février est le mois des amoureux avec la fête de la Saint-Valentin en plein milieu. La semaine de la fête romantique, le mercredi 9 février pour être exact, ressortiront deux films marquants, destinés a priori à des générations complémentaires d’adeptes d’histoires à l’eau de rose. Avec désormais trois films, dont assez récemment en 2016 Bridget Jones Baby de Sharon Maguire, l’univers de cette éternelle célibataire contre son gré nous paraît à bout de souffle. Pourquoi ne pas remonter à sa source presque innocente alors, à Le Journal de Bridget Jones de Sharon Maguire, déjà elle, et le coup de foudre à retardement entre Renée Zellweger et Colin Firth ? Personnellement, on optera certainement pour le sublimement mélodramatique Lettre d’une inconnue de Max Ophüls, l’un des plus beaux films sur l’amour impossible, porté par le couple d’amants empêchés Joan Fontaine et Louis Jourdan !

Dillinger est mort © 1969 Pegaso Cinematografica / Movie7 Media / Tamasa Distribution Tous droits réservés

La décadence à l’italienne

Il ne reste que deux films, et pas des moindres, avant de terminer notre tour d’horizon des ressorties du mois. Deux films profondément imprégnés de la douce folie iconoclaste de nos chers voisins transalpins. A partir d’aujourd’hui, Tamasa Distribution poursuit son admirable retour sur la filmographie aux forts accents d’absurde de Marco Ferreri. Après Le Lit conjugal en décembre et Le Mari de la femme à barbe en janvier, le tour est désormais à Dillinger est mort, une drôle de farce conjugale avec Michel Piccoli et Annie Girardot, présentée en compétition au Festival de Cannes en 1969. A noter qu’en parallèle, la rétrospective intégrale des films du réalisateur continue à la Cinémathèque Française à Paris jusqu’au lundi 28 février inclus, et que rendez-vous est d’ores et déjà pris auprès du distributeur pour la prochaine ressortie d’un film de Marco Ferreri. Ce sera La Petite voiture à partir du 6 avril.

Enfin, dans Fellini Satyricon, de ressortie à partir de la semaine prochaine, le maître fantaisiste s’égare un peu dans le microcosme de la débauche romaine au premier siècle de notre ère. C’est une œuvre à part dans la filmographie de Federico Fellini et néanmoins essentielle pour mieux comprendre son imagination formelle et morale débordante. En tout cas, on y est loin de la mise en cause presque pudique du statu quo de la société italienne après la Deuxième guerre mondiale, sur laquelle se rejoignaient en quelque sorte les deux derniers films de Fellini ressortis en France en 2020 : Le Cheik blanc et Les Vitelloni avec Alberto Sordi.

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