Critique : Wicked

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Wicked

US – 2024
Réalisateur: Jon M. Chu
Scénariste: Winnie Holzman ; Dana Fox
Casting: Cynthia Erivo ; Ariana Grande ; Jeff Goldblum
Distributeur: Universal Pictures International France
Genre : Fantastique ; Comédie Musicale
Durée : 2h40 min
Sortie FR: 4 Décembre 2024

1/5

“Qu’est ce que c’est bête !”, me disais-je après 20 minutes de Wicked dans lesquelles Ariana Grande ouvrait de grands yeux éberlués sur le monde d’Oz, tout en chansons et en chorégraphies aussi naïves que colorées. Je ricanais, je ricanais, qu’est-ce que je ricanais !

Synopsis : La Méchante Sorcière de l’Ouest, Elphaba, porte les stigmates de l’infamie de sa mère: une peau verte et des pouvoirs de sorcellerie. Rejetée par tous, y compris par son père gouverneur, elle supporte les humiliations avec courage en rêvant d’être purifiée par le Magicien d’Oz. Elle partage sa chambre à l’université avec la belle et ambitieuse Galinda, la sorcière du Nord.

La moquerie n’est pas le sentiment le plus noble que je puisse produire, certes, pourtant je n’ai aucun complexe à vous conseiller Wicked. C’est que, sous l’enrobage fast food dégoulinant de gros capitalisme bien écoeurant, il y a l’héritage américain pas seulement du monde d’OZ mais de presque 100 ans de savoir-faire des comédies musicales pleines de pirouettes. Et je vous mets au défi de ne pas sourire (au moins) devant quelque chose d’aussi ouvertement ridicule. Ma petite suffisance, c’est bien celle qui m’accompagnait déjà derrière l’épaule de ma grande sœur, il y a 20 ans, devant Grease premier du nom.

Après une demi-heure de métrage, je me suis rendu compte que le film n’avait aucune prétention à me prouver son intelligence. Il célébrait même sa naïveté confondante dans des sommets d’humour qui déclenche une chanson quand on ouvre une porte, et puis une autre en fermant la fenêtre, une autre en se lavant les mains etc. etc.

Il y a sûrement quelque chose à dire sur la sensation de physicalité que provoque le spectacle de la danse. Le didactisme qui doit être de mise à notre époque ou le moindre sous entendu est traquée et la moindre subtilité vite effacée pour souligner et sursouligner une fable volontairement niaise sur l’acceptation de la différence. Les tensions raciales qui ont forgé le 20ème siècle aux états unis se voient ici réduites et retournées quand la blanche colombe Grande n’a aucun talent et ne réussit qu’en exploitant le talent des autres alors que la paria, Cynthia Erivo, sans cesse renvoyée à sa couleur de peau, ne peut récolter les fruits de son talent naturel, surpassant pourtant celui de tous les autres.

Plus j’y pense, plus je me dis qu’il n’est pas si étonnant que tout le monde autour de moi y trouve son compte. Il y a cette valeur patrimoniale (oz, musicale), il y a cette dimension familiale de films “que vos enfants peuvent voir” et puis une naïveté surjouée qui se prête à une longue moquerie rendue politiquement correcte par la bouffonnerie de Jeff Goldblum, qui est tellement devenu un laisser passer humoristique que j’en oublierai presque qu’il a une place importante dans deux films aussi importants pour moi. (la mouche et Jurassic park).

Une autre question (allez je me lance): est-ce que les enfants méritent mieux ? C’est une question complexe. L’on peut jouer les chefs de chantier et montrer, sur le devis, le coût des matières premières du cirque qu’on a bâti pour eux. D’autres se demanderont plutôt si les plus jeunes ne préfèreraient pas une poésie un peu plus subtile. Je ne tranche pas. Ici, se joue certainement le challenge financier du grand divertissement de studios américains pour séduire un public qui ne va plus beaucoup en salles. Le succès du film semble témoigner que ça tient encore.

J’ai la sensation qu’en fait, sans doute contre lui, le film ne sait pas cacher sa boursouflure, sa grande tumeur, sa maladie amnésique, épuisée par un grand numéro de danse qui brille d’une  lueur mourante. Qu’on se laisse séduire par sa bien pensance ou qu’on éclate de rire devant son didactisme, Wicked fût pour moi un divertissement bête et méchant. Objet d’étude intéressant, je ne pousserai pas le vice jusqu’à sa suite.

Bref. C’est tellement bas de plafond et plutôt entraînant musicalement que vous pourrez bien oublier la demi heure de trop tellement on a besoin que les Etats-Unis et leur longue tradition d’amnésie collective produisent en 2025 un spectacle un peu réjouissant.

Conclusion

C’est exactement ce que le médecin vous a prescrit. A défaut de traiter votre mal dans le détail, un grand antidépresseur dosé pour assommer un cheval !

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