Critique : Toni Erdmann

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1984

Toni Erdmann

toni erdmann afficheAllemagne, Autriche : 2016
Titre original : –
Réalisatrice : Maren Ade
Scénario : Maren Ade
Acteurs : Peter Simonischek, Sandra Hüller, Michael Wittenborn
Distribution : Haut et Court
Durée : 2h42
Genre : Comédie, drame
Date de sortie : 17 août 2016

2/5

Voilà un film dont les avis entendus ou lus à droite et à gauche laissent perplexe. Lorsqu’on le présente comme étant la Palme du Public et de la Presse, force est de reconnaître la véracité d’une moitié de l’affirmation : en effet, rarement a-t-on vu à Cannes une presse, qu’elle soit étrangère ou hexagonale, aussi unanimement enthousiaste à propos d’un film ; par contre, il y a des contre-vérités qu’il faut dénoncer : à la fin de la projection de ce film dans la salle de la Licorne, à Cannes La Bocca, la salle où se pressent les cinéphiles, la salle qui réunit un public proche de celui qu’on peut trouver toute l’année dans les salles de cinéma autres que celles des multiplexes, l’enthousiasme était loin d’être de mise, la plupart des spectateurs ayant trouvé le film beaucoup trop long et souvent répétitif.

Synopsis : Quand Ines, femme d’affaire d’une grande société allemande basée à Bucarest, voit son père débarquer sans prévenir, elle ne cache pas son exaspération. Sa vie parfaitement organisée ne souffre pas le moindre désordre mais lorsque son père lui pose la question « es-tu heureuse? », son incapacité à répondre est le début d’un bouleversement profond. Ce père encombrant et dont elle a honte fait tout pour l’aider à retrouver un sens à sa vie en s’inventant un personnage : le facétieux Toni Erdmann…

 

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Père facétieux, fille sérieuse

« Tel père, tel fils », dit le dicton. Tel père, pas telle fille, affirme le film de Maren Ade. Le sexagénaire Winfried Conradi est un professeur à la retraite, à l’esprit soixante-huitard affirmé, tendance écolo, grand blagueur, aimant se déguiser et prendre d’autres identités que la sienne. Ines, sa fille, est une consultante ambitieuse, particulièrement sérieuse dans tous les domaines de sa vie, une vie qui tourne presque exclusivement autour de son travail et des promotions qu’elle ambitionne. Le père et la fille se voient peu, Ines travaillant le plus souvent à l’étranger. A la suite d’une visite éclair d’Ines auprès de sa famille, visite ponctuée de coups de téléphone professionnels et qui ne lui laisse même pas le temps d’aller voir sa grand-mère, Winfried décide d’aller à Bucarest, où sa fille doit discuter avec le PDG d’une société à propos du bien fondé de l’externalisation de la maintenance. Autant dire qu’elle ne voit pas d’un bon œil le fait que son père s’incruste à ses côtés, venant contrarier son travail avec ses déguisements, ses fausses dents et ses blagues de potache. Heureusement, son séjour est de courte durée. Sauf que, dans la foulée, le voilà qui revient, cette fois ci sous une fausse identité, celle de Toni Erdmann.

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Dommage !

Une comédie en compétition au Festival de Cannes, c’est plutôt rare. Une comédie en provenance d’Allemagne, c’est plutôt rare, du moins en ce qui concerne les films qui franchissent le Rhin pour arriver dans nos salles. Voilà déjà deux raisons qui, a priori, donnent de l’intérêt à ce film. Sans parler du thème du film, ce père, plutôt désespéré de voir sa fille oublier de vivre en ne consacrant son temps et son énergie qu’à sa seule carrière et, persuadé qu’elle n’est pas vraiment heureuse, décidant de venir sur son lieu de travail, afin de la « guérir » à sa façon. Il faut avouer que le film démarre très fort, avec cette livraison d’un colis chez Winfried, lequel disparaît quelques secondes pour, dit-il, aller chercher son frère qui sort de prison, puis revient déguisé en frère friand de colis piégés. Dans la foulée, pendant près d’une heure, le film fait mouche, le film fait rire, le film intéresse. Et puis, petit à petit, les gags à base de fausses dents et de faux cheveux commencent à lasser, et, quand bien même on souscrit à cette dénonciation en demi-teinte du mode de vie d’Ines et de ses semblables, la maladresse de la réalisation fait que l’intérêt s’étiole et que l’ennui s’installe. A Cannes, le bruit avait couru que le film avait été présenté dans une version montée en catastrophe, ce qui pouvait expliquer sa longueur (2 h et 42 minutes!) et son côté souvent répétitif. On en avait déduit qu’il sortirait en salles dans une version plus courte, une version bénéficiant d’un montage mieux maîtrisé. Malheureusement, il n’en est rien. Regrettons le : le film qui sort en salles va garder son côté bancal, plutôt jouissif pendant près d’une heure, perdant de sa superbe au fil du temps qui passe. Dommage !

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Du talent

Toni Erdmann est le 3ème long métrage de la réalisatrice allemande Maren Ade. The Forest for the trees, le premier n’est jamais sorti sur les écrans de notre pays. Le 2ème, Everyone Else, avait eu une sortie assez confidentielle. Et voici qu’avec Toni Erdmann, une très grande partie de la presse s’enflamme, porte des jugements dithyrambiques sur l’interprétation, pousse les spectateurs à venir s’entasser dans les salles qui le présentent. In fine, qu’en sera-t-il ? Quel jugement porteront les spectateurs « normaux » ? Nous nous sommes exprimés sur le côté bancal du film. Que dire de l’interprétation ? Que dire du comédien autrichien Peter Simonischek qui interprète le rôle de Winfried / Toni Erdmann et qui, à 70 ans, a partagé sa carrière entre théâtre, cinéma et télévision ? Que dire de la comédienne de théâtre et de cinéma Sandra Hüller, l’interprète d’Ines, née il y a 38 ans dans l’ex Allemagne de l’Est ? On reconnaîtra qu’il y a du talent dans leurs interprétations, lui, le facétieux, elle, ce parangon de sérieux. De là à sortir la dithyrambe, il y a un pas que nous ne franchirons pas !

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Conclusion

Maren Ade avait tout pour faire de Toni Erdmann un très bon film : un thème très peu abordé au cinéma, une aptitude certaine à faire intervenir la farce dans un film dont le sujet est, par ailleurs, très sérieux, etc. Elle avait tout, sauf un « détail » important : la science du montage, l’art de couper une scène  au bon moment, l’art, surtout, d’éviter de se répéter. Toni Erdmann n’est pas un mauvais film. Il est même très bon pendant près d’une heure. Malheureusement, il est trop long et très souvent répétitif.

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