The Major
Russie : 2013
Titre original : maйop
Réalisateur : Youri Bykov
Scénario : Youri Bykov
Acteurs : Denis Shevod, Irina Nizina, Ilya Isaev, Youri Bykov
Distribution : Zootrope Films
Durée : 1 h 39
Genre : Drame
Date de sortie : 6 novembre 2013
Globale : [rating:3.5][five-star-rating]
La grande période du cinéma soviétique est morte et enterrée. Toutefois, depuis la Russie, l’Ukraine ou d’autres pays issus de l’ex-URSS, il nous arrive de temps des films qui prouvent que ces pays abritent toujours des réalisateurs de talent. Très probablement, ces réalisateurs ont beaucoup de mal à réunir le budget nécessaire pour la réalisation de leurs rêves et, quand ils y parviennent, c’est le plus souvent grâce aux divers Festivals de cinéma qu’ils arrivent à pénétrer dans notre monde de cinéphiles. Ce fut le cas récemment pour My Joy et Dans la brume, les 2 excellents films de l’ukrainien Sergei Loznitsa. Ce sera le cas le 20 novembre avec La maison à la tourelle de l’ukrainienne Eva Neymann, non moins excellent. Alors que ces 3 films ont la beauté formelle des grands films de l’ex-URSS, The Major, le deuxième film du russe Youri Bykov (le premier n’est jamais sorti en France), penche davantage vers le cinéma américain des années 70. C’est la Semaine de la Critique du Festival de Cannes 2013 qui a permis à ce film d’entrer sur notre territoire.
Synopsis : Un jour d’hiver, Sergey Sobolev, un commandant de police locale, est en route vers l’hôpital où sa femme s’apprête à accoucher. Surexcité, il conduit trop vite et renverse un enfant qui meurt à la suite de l’accident. Le commandant a deux options : aller en prison ou cacher le crime. Sobolev décide alors de compromettre sa conscience et appelle un collègue pour l’aider. Mais l’affaire se complique et quand Sobolev change d’avis et décide de se racheter, il est déjà trop tard…
Vous, que faites vous ?
Imaginez : vous foncez en voiture sur une route enneigée car on vient de vous téléphoner depuis l’hôpital pour vous prévenir que votre femme est en train d’accoucher. De loin, vous avez bien aperçu une femme et son enfant sur le bord de la route mais vous ne ralentissez pas pour autant. Lorsque l’enfant se met à traverser la route, c’est trop tard, vous ne pouvez pas l’éviter, l’enfant est tué sous les yeux de sa mère. Que faites vous ? Au fait, un détail à ne pas oublier : vous avez un grade important dans la police. Que faites vous ? Le premier réflexe de Sergueï Sobolev, capitaine dans la police, c’est de sauver sa peau ! La sauver avec l’aide de ses collègues qui vont faire boire la mère du gamin et qui vont arriver à lui faire signer un procès-verbal dans lequel elle admet être ivre. C’est donc elle qui a été négligente, la vitesse folle de Sergueï Sobolev est devenue anecdotique. Remettez vous toutefois dans la peau de cet assassin, accidentel certes, mais assassin quand même : franchement, vous n’avez aucune conscience ? Et si, finalement, vous en avez une, comment va-t-elle se confronter à celles des collègues que vous avez impliqués dans cette sombre histoire ?
La Russie, la corruption et la censure
The Major est avant tout un film sur la corruption et sur la conscience des individus. Il se trouve qu’on est en Russie, classée 133e pays le plus corrompu du monde dans le classement des 176 pays évalués par l’ONG Transparency International. On est en Russie et dans la police russe, bien connue pour être particulièrement corrompue. Des craintes de censure ? Que Nenni ! Pour le réalisateur, « la censure en Russie, c’est l’indifférence. …. Un film comme The Major ne rencontrera jamais un public suffisamment large pour lancer une discussion sérieuse sur ce type de sujets ou provoquer un réveil des consciences. Et le pouvoir en place a parfaitement compris cela ». Il peut donc montrer sans problème des flics qui vont de plus en plus loin dans les conséquences de la machine infernale qu’ils ont mis en route. Pour le spectateur, on peut même considérer qu’ils vont un peu trop loin dans ces enchaînements, ce qui nuit à la crédibilité du film, donc à sa force.
L’homme à tout faire
Dans The Major, Youri Bykov a pratiquement tout fait : écriture du scénario, mise en scène, montage, musique. Il arrive même à jouer un des rôles principaux ! Lui qui reconnaît l’influence qu’ont eu sur lui les grands films du cinéma américain des années 70, lui dont le réalisateur favori est Sidney Lumet, il a placé son film entre deux des genres les plus importants de ce cinéma, le thriller et le western. Le thriller pour le style de la réalisation, glacé, terrifiant. Le western pour l’aspect psychologique, pour les choix cornéliens que doit prendre un homme, des choix qui vont déterminer son avenir de façon irrémédiable.
Résumé
Après avoir vu The Major, on suivra la carrière de Youri Bykov avec attention : il n’a que 32 ans et, dans ce qui n’est que son 2ème film, il fait déjà preuve d’une maîtrise certaine même si on peut y trouver quelques défauts, en particulier au niveau du scénario.
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