Critique : Omar

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Omar afficheOmar

Palestine : 2013
Titre original : Omar
Réalisateur : Hany Abu-Assad
Scénario : Hany Abu-Assad
Acteurs : Adam Bakri, Waleed Zuaiter, Leem Lubany, Samer Bisharat, Eyad Hourani
Distribution : Pretty Pictures
Durée : 1 h 37
Genre : Drame
Date de sortie : 16 octobre 2013

Globale : [rating:4.5][five-star-rating]

Parmi tous les films d’un Festival de Cannes 2013 particulièrement décevant, très rares étaient ceux qui soulevaient l’enthousiasme. Omar, Prix du Jury de la sélection Un Certain Regard, fait partie de la poignée de réussites marquantes de ces deux petites semaines cannoises. En fait, on peut se demander pourquoi ce film n’a pas été sélectionné dans la Compétition Officielle.

Synopsis : Omar vit en Cisjordanie. Habitué à déjouer les balles des soldats, il franchit quotidiennement le mur qui le sépare de Nadia, la fille de ses rêves et de ses deux amis d’enfance, Tarek et Amjad. Les trois garçons ont décidé de créer leur propre cellule de résistance et sont prêts à passer à l’action. Leur première opération tourne mal. Capturé par l’armée israélienne, Omar est conduit en prison. Relâché contre la promesse d’une trahison, Omar parviendra-t-il malgré tout à rester fidèle à ses amis, à la femme qu’il aime, à sa cause ?

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De part et d’autre du mur

Années après années, le conflit israélo-palestinien ne cesse d’apporter son lot de malheurs sur cette région du monde et même ailleurs. Rares sont celles et ceux qui ne le regrettent pas amèrement. Il faut toutefois reconnaître qu’en matière de sujet cinématographique, ce conflit est, depuis des années, une véritable mine d’or. Pour des raisons avant tout économiques, la production israélienne sur ce sujet est beaucoup plus importante que la production palestinienne. Pourtant, celle-ci existe ! C’est ainsi qu’il y a 8 ans, un film absolument remarquable et exempt de tout manichéisme nous avait permis de nous introduire pendant 1 heure ½ dans la peau de deux kamikazes palestiniens, non pas pour nous amener à excuser leur action, encore moins pour la glorifier, mais pour nous permettre de comprendre comment des jeunes tout à fait ordinaires pouvaient arriver à de telles extrémités. Ce film, c’était Paradise Now, Golden Globe du meilleur film étranger en 2006 ; son réalisateur était le palestinien Hany Abu-Assad, déjà remarqué auparavant avec Le Mariage de Rana, un jour ordinaire à Jérusalem. Après avoir commis The Specialist, un thriller américain jamais sorti en salle dans notre pays mais apparemment assez calamiteux, Hany Abu-Assad, qui vit aux Pays-Bas depuis 1980, revient dans son pays et nous parle à nouveau de ce qu’il connaît bien, la souffrance d’un peuple de plus en plus en voie de colonisation. Deux sentiments, deux stratagèmes et une construction sont au cœur du film : l’amour, la confiance, le chantagela manipulation des individus et le mur de séparation, ce fameux mur qu’Israël a commencé à construire en Palestine en 2002 et qui arrive à couper en deux des familles et à mettre des paysans d’un côté et leurs champs de l’autre côté.

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Amour, confiance, chantage, manipulation

Dans une petite ville de Cisjordanie coupé en deux par le mur, Omar vit d’un côté du mur mais celle qu’il aime, Nadja, une jeune lycéenne, vit de l’autre côté. Pour rejoindre Nadja, Omar est contraint d’escalader régulièrement ce mur très élevé, au péril de sa vie. Nadja a un frère plus âgé qu’elle, Tarek, ami d’enfance d’Omar tout comme Amjad, qui, comme par hasard, est également amoureux de Nadja. Un jour, les trois amis tuent un soldat israélien, une action qui, quelques jours plus tard, conduit Omar en prison, après une scène de poursuite dans les rues de la ville, scène filmée avec beaucoup d’élégance et de sens du rythme. Alors que déjà se pose la question de savoir qui l’a dénoncé, les policiers israéliens, manifestement très bien informés, jouent sur l’amour qu’éprouvent Omar et Amjad pour Nadja pour monter les 2 hommes l’un contre l’autre et peaufinent un chantage astucieux pour que, une fois retourné parmi les siens, il devienne, du moins l’espèrent-ils, un agent double chargé d’espionner ses complices. Une fois le quatuor reconstitué, il est certain que la confiance n’est plus là, Nadja et Amjad se demandant pourquoi Omar n’est plus en prison, Omar voyant en Amjad un traitre qui était prêt à tout pour conquérir Nadja. Avec une pointe de perversité, le réalisateur introduit alors, de temps en temps, des éléments qui introduisent le doute dans l’esprit des protagonistes et il s’amuse à nous montrer comment chacun réagit. En fait, il y a parmi les policiers israéliens, un homme qui tire les ficelles, l’agent Rami, extrêmement dur ou arrangeant selon les moments. De par ses actions, l’agent Rami est un peu le pivot de ce film, s’immisçant dans des histoires d’amour, brisant des relations de confiance, pratiquant le chantage et la manipulation.

Omar 3Une fiction vraisemblable

Même si son film est une fiction, Hany Abu-Assad s’est manifestement efforcé de peindre de la façon la plus juste possible la vie que mènent de jeunes palestiniens dans les territoires occupés. Concernant les pièges tendus aux prisonniers retenus dans les geôles israéliennes, on peut penser que, là aussi, ce qu’il nous montre est proche de la réalité. C’est ainsi que lors du premier séjour d’Omar en prison, au moment de la promenade, un codétenu se présente comme étant un dirigeant des martyrs d’Al-Aqsa et met en garde Omar contre le mouton qu’on ne manquera pas de mettre dans sa cellule, qui lui racontera sa vie pour gagner sa confiance et arrivera ainsi à lui tirer les vers du nez. Sauf que c’est en fait ce codétenu qui est le mouton et qu’il a enregistré toute la conversation. Confiance … Manipulation … La crédibilité du film est renforcée par les lieux de tournage et par les interprètes : une semaine à Naplouse, six semaines à Nazareth, une semaine à Bisan ; Omar, Nadja, Tarek et Amjad interprétés par de jeunes acteurs ayant l’âge de leurs personnages et qui apparaissent pour la première fois à l’écran. Etant donné leurs prestations, on ne peut que souhaiter les revoir au plus vite ! En fait, seul l’agent Rami est interprété par un acteur professionnel qui réussit, heureusement, à être aussi bon et crédible que les « amateurs ». Quant à la façon de filmer de Hany Abu-Assad, on retrouve, selon le rythme qu’il veut leur donner, des scènes à base de champs-contrechamps et d’autres utilisant le plan séquence, des montages parfois très nerveux et des scènes davantage sur la durée. Chaque fois, les choix sont judicieux.

Résumé

Lors de la sortie de Paradise now, il s’était trouvé une minorité de spectateurs pour mettre en cause l’objectivité du film et y voir un déferlement de propagande pro-palestinienne. C’était bien sûr totalement faux. Il faut malheureusement s’attendre à revoir ou réentendre de tels jugements à l’emporte-pièce à propos de Omar. Cela ne doit pas empêcher ce film très juste et d’une très grande force de rencontrer le succès qu’il mérite, bien au contraire.

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