France, 2015
Titre original : –
Réalisateur : Kheiron
Scénario : Kheiron
Acteurs : Kheiron, Leïla Bekhti, Gérard Darmon
Distribution : Gaumont Distribution
Durée : 1h42
Genre : Comédie dramatique
Date de sortie : 4 novembre 2015
Note : 3/5
Réalisé par Kheiron Tabib, humoriste populaire qui a fait ses début au Jamel Comedy Club, Nous trois ou rien réunit Leïla Bekhti, Gérard Darmon, Zabou Breitman, Alexandre Astier, le créateur de la série Kaamelott et Kyan Khojandi, le créateur de la mini série Bref. Nous trois ou rien raconte le parcours des parents de Kheiron, qui ont fui l’Iran pour s’installer en France, après s’être battus contre la tyrannie. Kheiron, qui joue dans le film le rôle de son propre père, a décidé de se lancer dans ce projet pour rendre hommage à ses parents et à leur histoire.
Synopsis : D’un petit village du sud de l’Iran aux cités parisiennes, Kheiron nous raconte le destin hors du commun de ses parents Hibat et Fereshteh, éternels optimistes, dans une comédie aux airs de conte universel qui évoque l’amour familial, le don de soi et surtout l’idéal d’un vivre-ensemble.
Une première partie vive et inspirée
Le long métrage commence en Iran où Kheiron fait une présentation rapide de sa famille nombreuse (douze enfants), de ses aïeux et de la condition de vie de son père. Très vite il met en avant les engagements politiques et idéologiques de son père, une vision des choses qui allait à l’encontre de sa famille et surtout qui le mettait en danger vis-à-vis du pouvoir en place. D’événements en événements, rapidement présentés, le père se retrouve en prison pour une durée de sept ans après avoir défié le pouvoir. Le réalisateur raconte cette première partie en Iran avec beaucoup d’humour, une manière d’alléger le film qui expose pourtant un sujet grave et important. Les dialogues sont vifs et bien écrits. Les répliques, réfléchies, fusent entre les interprètes, engagés dans leurs rôles. L’écriture est belle, le scénario va à l’essentiel avec des situations à la fois drôles, cocasses et édifiantes. Le casting est terriblement attrayant. Au-delà de Kheiron lui-même, tout en retenue et en spontanéité, Leïla Bekhti s’affirme et interprète son rôle avec énormément de conviction. Les rôles secondaires sont bien travaillés, le couple Darmon/Breitman s’avère être touchant, drôle et très attachant. Quant à Astier et Khojandi, leurs courtes apparitions mettent du rythme et dédiabolisent l’ennemi, tournant en dérision leurs préceptes pseudo religieux haineux venus d’un autre temps. Nous trois ou rien semble prendre la direction d’une comédie, pourtant Kheiron prend un virage de ton pour entrer dans le vif du sujet.
Un film qui tend ensuite vers le social
Kheiron laisse ensuite la comédie au second plan. Tout en offrant de subtiles ruptures de ton par des instants drôles et joliment mis en images, Nous trois ou rien devient plus sérieux. Porté par l’importance du sujet, Kheiron partage l’histoire de ses parents sans en cacher les aspects sombres. L’hypocrisie mise de côté, Kheiron, n’omet pas de parler du danger constamment présent qui plane au dessus de ses ascendants. Il n’oublie pas de mentionner les morts, les disparitions des collègues, des amis, des frères politiques de ses parents. Ainsi Kheiron met en scène la fuite de ses protagonistes. Une fuite longue, éprouvante, qui va s’achever par un établissement en France. Le couple s’y installe et décide de ne jamais repartir. Kheiron en profite pour se concentrer sur l’intégration des immigrés en France, sur la condition précaire avec laquelle ils doivent vivre à leur arrivée. Il parle de sujets sociaux éloignés dans le temps mais toujours d’actualité. Il met en avant le jugement des occidentaux, la difficile intégration de ces immigrés considérés comme des étrangers néfastes, des parasites. Il veut démontrer le manque d’action de l’état, son absence total d’aide et de subventions dans certains quartiers difficiles. Il avance que les changements doivent venir du peuple lui-même, de l’entraide et de la volonté d’évoluer, de sortir de la précarité. La fin, touchante, affirme que seul cette entraide permet de créer, de produire et de relancer la culture, l’emploi, la volonté de vivre et non de survivre.
Conclusion
Optimiste, spontané, honnête, parfois naïf et utopique, toujours relevé par une réalisation maîtrisée et des interprétations sans faille, Nous trois ou rien est une réussite au message lourd de sens et très actuel, une œuvre pour la tolérance et le respect mutuel, essayant de mettre en avant la complexité des relations entre des individus délaissés et un état occupé ailleurs, aveugle quant à ces problèmes internes. Kheiron ne juge pas, ne prend pas parti, tente simplement d’expliquer, d’exprimer des idées, une réflexion, des sentiments devant une société dépassée par des problèmes continuellement renouvelés. Nous trois ou rien est aussi un film faisant preuve d’insouciance, jovial et indispensable en ces temps sombres.