Ma vie de courgette
Suisse, France : 2016
Titre original : –
Réalisation : Claude Barras
Scénario : Céline Sciamma, Germano Zullo, Claude Barras, Morgan Navarro, d’après un roman de Gilles Paris
Voix :
Distribution : Gebeka Films
Durée : 1h06
Genre : Animation, Drame
Date de sortie : 19 octobre 2016
4/5
A 43 ans, le réalisateur suisse Claude Barras n’est pas un nouveau venu dans le monde du cinéma, ayant déjà à son actif un grand nombre de court-métrages d’animation. Ma vie de courgette est son premier long métrage et il s’agit, bien sûr, d’un film d’animation. Réalisé en stop motion, ce film est une adaptation libre de Autobiographie d’une courgette, roman de Gilles Paris et il a été fait appel à Céline Sciamma (Tomboy, Bande de filles) pour l’écriture du scénario. Alors que le roman s’adressait plutôt aux jeunes adultes et aux parents, Claude Barras a souhaité que l’adaptation en film d’animation permette d’ouvrir Ma vie de courgette au public enfantin. Ce film a reçu un accueil unanimement favorable lors de sa présentation à la Quinzaine des Réalisateurs de Cannes 2016 et il a été couronné 2 fois au Festival du film d’animation d’Annecy 2016 : par le jury et par le public.
Synopsis : Courgette n’a rien d’un légume, c’est un vaillant petit garçon. Il croit qu’il est seul au monde quand il perd sa mère. Mais c’est sans compter sur les rencontres qu’il va faire dans sa nouvelle vie au foyer pour enfants. Simon, Ahmed, Jujube, Alice et Béatrice : ils ont tous leurs histoires et elles sont aussi dures qu’ils sont tendres. Et puis il y a cette fille, Camille. Quand on a 10 ans, avoir une bande de copains, tomber amoureux, il y en a des choses à découvrir et à apprendre. Et pourquoi pas même, être heureux.
La vie dans un foyer
Pas facile pour un enfant de 10 ans de se sentir responsable de la mort accidentelle de sa mère, quand bien même cette dernière était tout à la fois violente et portée sur la boisson. Et voilà Icare, appelé Courgette par sa mère, emmené au foyer des Fontaines par Raymond, un policier au grand cœur avec lequel le courant passe très vite. Pour Courgette, l’arrivée dans le foyer ne se fait pas dans la douceur, surtout du fait de Simon, un des 5 gamins qui y résident déjà, Simon le leader, Simon le dur à cuire qu’il va falloir apprivoiser pour s’en faire un ami. Petit à petit, sous la tutelle bonhomme de l’équipe du foyer et auprès de celles et ceux qui, tous, sont devenus des amis, Simon, Alice, Ahmed, Béatrice et Jujube, la vie de Courgette va devenir plus douce d’autant plus que Raymond, qui s’est attaché à Courgette, passe régulièrement au foyer pour le voir. Une vie qui devient encore plus douce lorsque Camille, une fille qui pratique le foot avec talent, arrive au foyer et entre illico dans le c
ur de Courgette. Sauf que Camille a une tante cupide qui la maltraite et qui aimerait en avoir la garde pour pouvoir toucher sa pension.L’espoir triomphe
En seulement 66 minutes, Ma vie de courgette s’intéresse à une quantité importante de sujets, chacun d’entre eux étant habilement traités de façon à pouvoir intéresser à la fois les adultes et les enfants, du moins les petites filles et les petits garçons de 8 à 9 ans minimum. C’est ainsi qu’il est question de deuil, d’abandon, de misère sociale, des rapports entre enfants et adultes, d’empathie, de la maltraitance, de la cruauté enfantine, des sujets qui sont traités sans lourdeur et sans mièvrerie. Dans la lignée de nombreux contes pour enfants, Ma vie de courgette n’hésite pas à témoigner de la dureté de la vie, mais il le fait avec de l’humour et beaucoup de tendresse et, en insistant avec sobriété sur l’importance de l’amitié, du « vivre ensemble », de la solidarité et de l’entraide, ce film finit par donner une bonne dose d’espoir aux spectateurs, qu’ils soient petits ou grands.
Travail et patience
Il y a 9 ans, Luc Béraud avait réalisé C’est mieux la vie quand on est grand, un téléfilm adapté du roman de Gilles Paris, Autobiographie d’une courgette. Sous la direction de Claude Barras, voici donc une nouvelle adaptation de ce roman, cette fois-ci sous la forme d’un film d’animation utilisant la technique de l’animation en volume, une technique qui demande énormément de travail et de patience : confection des décors, des marionnettes, des costumes, tournage image par image au rythme de moins de 3 secondes de film par animateur et par jour, assemblage des prises sur fond vert sur les différents décors. La réussite est totale, avec ses figurines à la tête ronde et hypertrophiée, aux grands yeux ronds et aux bras très fins, avec un sens du rythme proche de la perfection, avec ses dialogues dont la justesse n’est pas la moindre des qualités. Ces dialogues ont été mis dans la bouche d’enfants pour ce qui est des enfants et dans celle d’acteurs professionnels pour les adultes. Parmi ceux-ci, on peut reconnaître Michel Vuillermoz pour la voix de Raymond. La musique joue également un rôle important dans ce film, avec les compositions souvent proches du folk de Sophie Hunger, avec le « Salut à toi » de Bérurier Noir que Simon écoute sur son baladeur, avec, sur le générique de fin, la magnifique reprise de « Le vent nous portera » de Noir Désir par Sophie Hunger.
Conclusion
Il y a 40 ans, le psychologue et pédagogue Bruno Bettelheim avait démontré dans La psychanalyse des contes de fées, que les contes n’étaient pas qu’un simple divertissement pour les enfants et qu’ils avaient un rôle important dans leur structuration psychique, leur permettant de mieux comprendre et accepter ce que la vie peut avoir de cruel. Dans un contexte contemporain, sans roi, sans reine, sans fée, c’est également le rôle que peut jouer Ma vie de courgette, avec l’espoir qui finit par triompher. En tout cas, parents qui cherchez un film qui vous passionnera tout autant que vos enfants, aucune raison de barguigner : allez ensemble voir Ma vie de courgette. Et, si vous n’avez pas d’enfant à portée de la main, pas de raison de vous priver de voir ce film : allez y seul(e) ou en couple !