Critique : La Fin de l’agent W4C par l’intermédiaire du chien de Monsieur Foustka

Fin de l’agent W4C par l’intermédiaire du chien de Monsieur Foustka

Tchécoslovaquie, 1967
Titre original : Konec Agenta W4c Prostrednictvim Psa Pana Foustky
Réalisateur : Václav Vorlícek
Scénario : Václav Vorlícek, Oldrich Danek
Acteurs : Jan Kacer, Kveta Fialová, Jiri Sovak
Distribution : Malavida (dvd)
Durée : 1h27
Genre : Comédie
Date de sortie : 2012 (en dvd)

Alors que la comédie délirante Qui veut tuer Jessie ?, un double parfait du Batman des années 60, ressort en salles en version restaurée, le cinéma parisien le Reflet Medicis propose de redécouvrir trois autres films du réalisateur tchécoslovaque Václav Vorlícek, Comment noyer le docteur Mracek, Monsieur, vous êtes veuve et ce joyeux pastiche de cinéma d’espionnage qu’est La Fin de l’agent W4C par l’intermédiaire du chien de Monsieur Foustka. Tout un programme !

Synopsis : L’agent W4C, un super agent destiné aux missions les plus périlleuses, doit récupérer les plans ultra-sensibles d’un projet d’installation militaire sur Vénus, contenus dans une… salière de l’hôtel Savoy de Prague. Le comptable Foustka se voit confier la mission de le surveiller, lors de son arrivée sur place. Avec sa chienne Pif, il se retrouve embringué dans des aventures… dont il n’a pas l’habitude…

Une parodie si ô tchèque ô slovaque de James Bond

Ce film tchèque est une parodie burlesque des codes du cinéma d’espionnage déjà mis en place en cette année 1967. Le titre a le mérite de révéler un important élément de l’intrigue et de dire qui sont les vedettes : l’agent W4C, Monsieur Fouska (un comptable devenu espion malgré lui) et son chien, aussi malin que Milou. D’une folie furieuse communicative, comme peuvent l’être les comédies des pays de l’est, en particulier à cette époque, comme Le Départ de Jerzy Skolimowski, voilà une comédie hilarante, dont l’humour repose autant sur les mots, les situations qu’un réel génie visuel. Les Marx de l’autre côté du mur en somme…

L’action démarre dans un champ, sur l’image d’un animal tenu en joue et l’homme au fusil ne tire pas : il s’agit pas d’un chasseur, mais de l’agent W4C (Cyril Juan de son petit nom), accompagné d’une jolie brune et d’un valet de pied (voir la définition de ce métier dans C’est le Bouquet de Jeanne Labrune). «Pourquoi j’aime tant les animaux ?» se dit-il et après une attaque d’adversaires qui se plaignent de ne pas parvenir à l’abattre (il n’hésite pas à se cacher derrière sa partenaire, le vilain…) on se retrouve ensuite dans une «agence d’une grande puissance non désignée» en français dans le texte. Une plante malencontreusement jetée à travers la fenêtre révélera une Tour bien connue mais mystère, quelle est cette puissance amie ? Pour compliquer le mystère, on évoque une mission à ‘ Pr.. ‘ ville dont on on prononce pas le nom complet (c’est Prague… chut…). Et le MacGuffin est typique : les enchères montent autour des plans d’un projet d’installation militaire secret sur la planète Vénus et évidemment, c’est un piège…

Monsieur Foustka, la grâce de Pierre Richard

Le scénario joue sur les faux-semblants de mystères absurdes des intrigues d’espions en pleine guerre froide : en gros, bon c’est une mission avec un microfilm caché dans une salière, on sait où mais on va dire qu’on ne sait pas comment on le sait et on va se compliquer la tâche pour raconter une histoire farfelue. Mais ici le décalage est assumé. Est-ce une parenthèse enchantée en République tchèque, juste avant le sinistre Printemps 1968 ? C’est tout de même un peu osé, même si la comédie est essentiellement inoffensive et se moque surtout de James Bond, de son nom de code 007, de ses comparses (un ersatz de Q évidemment maladroit qui impose à un agent SECRET de se promener avec un très gros réveil ou un autre de Miss Moneypenny évidemment enamourée) et de ses ennemis très bêtes ici aussi. Personne ne comprend vraiment tous les enjeux et c’est bien ce qui en fait le charme.

Pour mener l’enquête face à W4C, l’autre grand héros : le Monsieur Foustka du titre qui n’en demandait pas tant. Heureux dans son bureau de comptable, il espère au mieux passer chef comptable. Et ce grand costaud moustachu qui a la grâce de Pierre Richard dans les aventures du Grand Blond ou de l’inspecteur Clouseau face à la Panthère Rose va déchaîner une série de numéros comiques qu’il vaut mieux ne pas trop trahir. J’en ai déjà trop dit mais c’est un festival, donc pas de souci. Un jeu de poursuites, des bagarres absurdes avec photos mal utilisées, cabines téléphoniques insonorisées, un violon mitraillette et sa réparation compliquée ou un délire dans une piscine avec suspense d’électrocution et des dizaines d’espions rivaux, une broche sur une robe reliée à une fermeture éclair, du tricot qui permet des messages codés en morse. L’intrigue a la rigueur nécessaire pour éviter de n’être qu’un étalage de gags qui sont excellents et variés mais qui pourraient lasser. Heureusement, Vaclav Vorlicek est un réalisateur doué et il sait mettre en scène les idées saugrenues qui lui sont passées par la tête. C’est fou, délirant et on ne s’ennuie pas du tout. Le meilleur gag est peut-être celui où W4C se cache… en s’allongeant par terre !!!!!!! Et ça marche !!!!!!! Mais le chef du comptable qui cherche la définition du mot ‘ inconnu ‘ dans le dictionnaire ou le champion tchéco-équatorien qui gagne étrangement un championnat ne sont pas mal non plus.

Conclusion