Critique : Knit’s Island

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Knit’s Island

France : 2024
Réalisation : Ekiem Barbier, Guilhem Causse, Quentin L’Helgouac’h
Distribution : Norte Distribution
Genre : Documentaire
Durée : 1h38
Date de sortie (FR): 17 avril 2024

4,5/5

Rares sont les films qui sont une expérience vraiment unique. Knit’s Island, ainsi, représente pour moi une première incursion fascinante dans un territoire encore vierge. Il y aurait tant à dire sur la réflexion que ce documentaire provoque sur nos représentations et nos manières de consommer les images que je ne m’y risquerai pas ici. J’essaierai plutôt de vous donner envie de le voir.

Il y a une poésie subtile qui surgit de ces images de jeu vidéo, projetées sur l’écran de cinéma qui leur est d’ordinaire interdit. Le film, qui commence comme une enquête des réalisateurs, eux-mêmes avatars dans le jeu, auprès des joueurs qui arpentent encore les serveurs de DayZ, s’avère rapidement bien plus complexe que ça.

En effet, les motivations de ces avatars, sortes de coquilles vides habitées par des humains qu’on ne verra jamais, résonnent étrangement avec notre monde réel, comme s’il le révélait en quelque sorte.

Synopsis : Quelque part sur internet existe un espace de 250 km² dans lequel des individus se regroupent en communauté pour simuler une fiction survivaliste. Sous les traits d’avatars, une équipe de tournage pénètre ce lieu et entre en contact avec des joueurs. Qui sont ces habitants ? Sont-ils réellement en train de jouer ?

Le choix des réalisateurs de mener le film dans un “vieux jeu” en décor survivaliste a un impact fort sur l’impression de marginalité, de dérives de ces joueurs “survivants” qui errent dans un monde abandonné.

Dans le montage même du film, il y a un mélange entre des plans cinématographiques recréés dans le jeu et d’autres plans qui assument complètement le faux rythme, les saccades, les bugs mêmes de ce monde. On reste en permanence sur cette ambiguïté qu’on ne peut pas maîtriser.

A travers tous ces moments de pause, d’errance, presque de contemplation, le film va lui-même glisser vers l’abstraction. Les personnages se demandent pourquoi ils jouent encore, on découvre les limites du monde, on se questionne.

Qu’ est ce qui est mis en scène ? Qu’ est ce qui est vraiment la captation de quelque chose de tangible ? C’est ce doute sans réponse qui va ramener de la réalité dans le jeu vidéo. J’en tiens pour preuve la sensation terrifiante des coups de feu et des morts du film qui ont eu un impact bouleversant sur moi alors que l’imagerie habituelle des jeux vidéos aurait pu stériliser l’impact de la violence. Qui aurait pensé que je sois encore hanté par la mort d’un avatar ?

Conclusion

Le film le plus unique que j’ai vu depuis longtemps. Une histoire de mondes marginaux où des âmes à la dérive trouvent refuge ; une réflexion sur les images au cinéma qui ouvre la porte à une nouvelle esthétique baroque. Un drôle d’envoûtement qui me marquera longtemps !

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