Critique : Hijo de sicario

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Hijo de sicario

Mexique : 2024
Titre original : Sujo
Réalisation : Astrid Rondero, Fernanda Valadez
Scénario :  Astrid Rondero, Fernanda Valadez
Interprètes : Juan Jesús Varela, Yadira Pérez, Karla Garrido, Sandra Lorenzano
Distribution : Damned Distribution
Durée : 2h07
Genre : Drame
Date de sortie : 21 août 2024

3.5/5

Synopsis : Après l’assassinat d’un sicario dans une petite ville mexicaine, Sujo se retrouve orphelin et échappe de justesse à la mort grâce à sa tante qui l’élève à la campagne. À l’adolescence, la rébellion s’éveille en Sujo et il rejoint le cartel local. L’héritage de son père semble alors rattraper son destin.

Est il possible de changer de vie ?

Alors que Sujo, le titre original de ce film, se contentait de faire référence à son personnage principal dont le nom, donné par son père, était à l’origine celui d’un cheval, le titre choisi pour la distribution française, Hijo de sicario, est beaucoup plus explicite : fils de tueur à gages. On est au Mexique, dans la portion de l’état de  Michoacán faisant partie de la région de Tierra Caliente, au sud-ouest du pays. Josué, le père de Sujo, « travaille » donc en tant que tueur à gages dans un des nombreux cartels du pays liés au trafic de drogue et son surnom, « El ocho », le huit, est un nombre suffisamment petit pour prouver qu’il s’agit d’un des hommes les plus dangereux au sein de son cartel.  Astrid Rondero et Fernanda Valadez, les deux scénaristes et réalisatrices, ont découpé leur film en 4 parties, chacune portant le nom d’un ou de deux personnages. Pour la première partie, c’est le nom de Josué « El ocho » qui a été retenu. « El ocho », un père qui a perdu la mère de son fils lors de l’accouchement et qui n’hésite pas à amener ce gamin de 4 ans lorsqu’il va régler ce qui, pour lui, fait partie des affaires courantes. Ce comportement, Nemesia, sa belle-sœur, ne l’apprécie pas du tout, elle qui va donner son nom à la deuxième partie et qui aimerait que Sujo ne suive pas les traces d’un père qui va se voir accusé de trahison et être abattu comme un chien. Beaucoup moins intéressée que son amie Rosalia par le fait de retrouver l’argent que Josué avait probablement mis de côté,  elle tient avant tout, avec l’aide de Rosalia, à mettre Sujo à l’abri, « le temps qu’il faudra pour qu’ils l’oublient », car elle est persuadée que ceux qui ont tué Josué vont craindre une future vengeance de son fils et n’hésiteraient pas une seconde à l’éliminer de façon préventive.

Dans la 3ème partie, on retrouve Sujo plusieurs années plus tard, lui qui continue de vivre coupé du monde dans la bicoque en plein désert que sa tante avait choisie comme refuge pour l’éloigner du danger qui le guettait. Les seuls contacts avec le monde extérieur, c’est avec Jai et Jeremy, les 2 fils de Rosalia, qu’il les a, lors des visites que cette dernière fait à Nemesia. Les 3 adolescents passent du temps à remettre en état la voiture que Josué avait abandonnée et qui n’avait pas roulé depuis de nombreuses années, voiture qui pourrait permettre à Nemesia de se rendre facilement au village, à condition, bien sûr, d’apprendre à conduire. Mais quel peut être l’avenir de Sujo, lui qui a toujours eu soif d’apprendre, que ce soit « les noms de tous les animaux ou ceux de tous les objets », mais pour lequel, malgré les efforts de sa tante, l’environnement semble tracer la même voie que celle suivie par son père. Est il possible de s’opposer à la fatalité ? Est-il possible de changer de vie ? Ce sont les questions que se pose Sujo ? Ce sont les questions que se posent également les spectateurs ? La rencontre avec Susan, une professeure d’université d’origine argentine qui donne son nom à la 4ème partie, peut elle contribuer à apporter les réponses que Sujo et nous attendons ?

Lorsque, il y a 4 ans, Fernanda Valadez a réalisé Sans signe particulier, son premier long métrage, Astrid Rondero était sa coscénariste. Cette fois ci, pour Hijo de sicario, c’est ensemble qu’elles en ont écrit le scénario et c’est ensemble qu’elles l’ont réalisé. Un film qui évolue dans ce que la société mexicaine a sans doute de plus sombre, de plus dramatique, le monde des cartels liés aux trafics de drogue. Un film qui interroge sur la possibilité, pour un jeune, de sortir de la voie que son origine familiale et son environnement ont tracée pour lui, un exercice particulièrement difficile lorsqu’on est le fils d’un tueur à gages mexicain. Un film qui  montre que si, au Mexique comme dans de nombreux autres pays, la spirale de la violence est tellement bien enclenchée qu’il parait presque impossible d’en stopper le mécanisme, tous les espoirs ne sont pas perdus à condition de prendre davantage en considération ce que proposent les femmes, qu’elles soient mères, tantes, enseignantes ou autres. Pour maintenir le plus haut possible le degré de tension dans leur film, les 2 réalisatrices ont choisi d’utiliser de nombreuses ellipses et de passer brutalement d’une séquence à la suivante. Le choix de Ximena Amann comme Directrice de la photographie s’avère très judicieux, les plans qu’elle nous propose étant le plus souvent de toute beauté. Par ailleurs, on est en Amérique latine, et ce film, pourtant bien ancré dans le réel, flirte de temps en temps avec le réalisme magique propre à cette région du monde. Dans la très solide distribution, on remarque une curiosité : Sandra Lorenzano qui interprète le rôle de Susan, professeure d’Université à Mexico et originaire d‘Argentine, est elle-même professeure d’Université à Mexico et originaire d’Argentine. Poétesse, également !

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