Critique : Girls will be girls

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Girls will be girls

Inde : 2023
Titre original : –
Réalisation : Shuchi Talati
Scénario : Shuchi Talati
Interprètes : Preeti Panigrahi, Kani Kusruti, Kesav Binoy Kiron
Distribution : Nour Films
Durée : 1h58
Genre : Drame, Romance
Date de sortie : 21 août 2024

3.5/5

Synopsis : Mira, 16 ans, mène une vie d’élève modèle dans un pensionnat d’élite au nord de l’Inde. Alors que les examens approchent, sa mère Anila revient s’installer dans la région pour la soutenir et veiller sur elle. Mais la rencontre de Mira avec un nouvel élève, Sri, va semer le trouble dans la relation entre les deux femmes, chacune se retrouvant confrontée à ses propres désirs.

L’éducation sentimentale et sexuelle d’une jeune indienne

A la fin des années 90, le lycée d’élite du nord de l’Inde dans lequel Girls will be girls nous introduit continuait d’observer des règles très proches de celles des établissement anglais similaires, comme celle, par exemple, de procéder à la désignation d’un « head prefect », chargé pour une année scolaire d’un rôle de tampon entre ses condisciples et le corps enseignant dans son ensemble. Cette année là, pour la première fois, c’est une fille qui est désignée : Mira, élève de terminale, une élève brillante habituée à recevoir les meilleures notes de sa classe. Sa première tâche : procéder à la lecture du serment que l’ensemble des élèves doit reprendre avec elle. Dans ce lycée, on ne rigole pas avec la discipline et, concernant les rapports entre les garçons et les filles, si les garçons semblent ne recevoir aucune directive précise,  il n’en est pas de même pour les filles à qui on explique plutôt deux fois qu’une qu’elles doivent se méfier des garçons avec qui les échanges doivent être réduits au strict minimum. Quant aux jupes, elles doivent impérativement descendre jusqu’aux genoux et les chaussettes doivent être bien remontées ! La « promotion » obtenue par Mira vient s’ajouter à la forme de rejet dont elle était déjà l’objet de la part de certains de ses condisciples masculins du fait de ses brillants résultats scolaires. Les choses ne vont pas s’arranger lorsqu’elle pense devoir dénoncer à la Principale du lycée 3 élèves au comportement humiliant pour les filles. Cela étant, Mira, toute bonne élève qu’elle est, n’est pas pour autant ce qu’on a coutume d’appeler une oie blanche et elle ne se prive pas de faire ses propres recherches personnelles en matière de sensualité, s’entraînant à embrasser en embrassant une de ses mains et se caressant intimement en utilisant un ours à peluche. Et puis, il y a Sri, un nouvel élève dont le père est diplomate et la mère danseuse spécialisée dans cette danse si particulière qu’est le bharata natyam, Sri qui a déjà vécu dans de nombreux pays et dont le lycée précédent était à Hong-Kong, Sri à qui il est arrivé de sortir avec une jeune fille plus âgée que lui, Sri auquel Mira a du mal à résister même si cela risque de nuire à ses résultats scolaires, même si cela entre en contradiction avec ses fonctions de « head prefect ».

Une mère que l’on sent chamboulée

A sa grande surprise, arriver à convaincre Anila, sa mère, que Sri est un ami et rien d’autre, s’avère pour Mira plus facile que prévu. Anila est une ancienne élève du lycée où étudie sa fille, du temps où il y avait un lycée pour les filles et un lycée pour les garçons et où garçons et filles n’étaient censés se rencontrer que deux fois par an, une fois pour la fête du sport et une autre fois pour la fête des professeurs. Venue de Haridwar où se trouve son domicile principal, elle s’est installée dans la résidence secondaire de la famille pour veiller au bon déroulement des études de sa fille. Pour Anila, Sri sera toujours le bienvenu chez elle si sa relation avec Mira reste du domaine de l’amitié et si elle ne nuit en rien à ses résultats scolaires. Si ce qu’on voit de l’éducation sentimentale et sexuelle de Mira présente un intérêt certain, la peinture que la réalisatrice fait de Anila avec énormément de talent s’avère par certains côtés d’un intérêt encore plus grand. Anila est une femme qui s’est mariée jeune, une femme passablement immature, une femme dont tout laisse penser qu’elle n’est pas sexuellement satisfaite, une femme qui ne travaille pas et qui est donc financièrement totalement dépendante de son mari. Tout au long du film, on ne cesse de se demander ce que Sri représente pour elle : le fils qu’elle n’a pas eu ? Le jeune homme dont elle aurait aimé tomber amoureuse dans sa jeunesse, voire même un jeune homme plus jeune qu’elle dont elle est aujourd’hui amoureuse mais dont elle n’ose pas faire son amant ? Vit elle par procuration la relation amoureuse enchanteresse qu’elle n’a pas eue au travers de ce que vit sa fille ? Ces questions que nous nous posons, Mira en arrive à se les poser elle aussi de son côté, se demandant jusqu’où Sri peut être capable d’aller lorsqu’il lui dit qu’il est indispensable de se montrer concilient avec Anila pour qu’elle continue à accepter leurs rencontres.

Concernant ce que le film peut nous apprendre sur l’Inde, il parait nécessaire de garder en tête qu’il s’agit d’une vision déjà vieille d’un quart de siècle et, surtout, que cette vision ne concerne que la couche la plus aisée et la plus culturellement avancée de la société indienne. Girls will be girls est le premier long métrage de Shuchi Talati, une jeune réalisatrice indienne dont les deux court-métrages qu’elle avait déjà réalisés auparavant montraient déjà son intérêt pour la remise en question des idées préconçues sur le genre, la sexualité et l’identité de son pays. Girls will be girls a rencontré un grand succès dans tous les festivals où il a été présenté, tout particulièrement à Sundance où, il y a 6 mois, il a obtenu le Prix d’interprétation féminine pour Preeti Panigrahi et le Prix du public dans la compétition « World Cinema Dramatic ». Si Preeti Panigrahi s’avère en effet remarquable dans son interprétation de Mira, il en est de même pour Kani Kusruti, l’interprète de Anila, actrice beaucoup plus expérimentée, et pour Kesav Binoy Kiron, l’interprète de Sri.

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