Critique : Fais de beaux rêves

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Fais de beaux rêves

fais-de-beaux-reves-afficheItalie, France : 2016
Titre original : Fai Bei Sogni
Réalisation : Marco Bellocchio
Scénario : Valia Santella, Edoardo Albinati, Marco Bellocchio d’après « Fais de beaux rêves, mon enfant », roman autobiographique de Massimo Gramellini
Acteurs : Valerio Mastandrea, Bérénice Bejo, Guido Caprino
Distribution : Ad Vitam
Durée : 2h10
Genre : Drame
Date de sortie : 28 décembre 2016

3/5

A 77 ans, le natif de Piacenza Marco Bellochio est une figure incontournable du cinéma italien. Dès l’âge de 26 ans, sa notoriété a dépassé les frontières de son pays avec Les poings dans les poches, un film précurseur des mouvements de mai 1968. Fais de beaux rêves est son 25ème long métrage de fiction et cette adaptation cinématographique d’un livre autobiographique de Massimo Gramellini a été présentée en ouverture de la Quinzaine des Réalisateurs au Festival de Cannes 2016.

Synopsis : Turin, 1969.
Massimo, un jeune garçon de neuf ans, perd sa mère dans des circonstances mystérieuses. Quelques jours après, son père le conduit auprès d’un prêtre qui lui explique qu’elle est désormais au Paradis. Massimo refuse d’accepter cette disparition brutale.
Année 1990.
Massimo est devenu un journaliste accompli, mais son passé le hante. Alors qu’il doit vendre l’appartement de ses parents, les blessures de son enfance tournent à l’obsession…

Barbara Ronchi, Nicolo Cabras (Massimo enfant)

Hanté par le souvenir de sa mère

C’est lorsqu’il est âgé de 9 ans que nous faisons connaissance avec Massimo. Il vit à Turin dans un grand appartement et il voue à sa mère une affection sans borne. C’est avec elle qu’il aime danser le twist, jouer à cache-cache et regarder à la télévision les épisodes de la série Belphégor. C’est à ce moment que cette mère tant aimée décède dans des circonstances qui ne vont cesser de rester troubles pour Massimo. Infarctus foudroyant, lui a dit son père. Elle est dorénavant au Paradis, lui raconte un prêtre. Doit-il croire l’un ? Doit-il croire l’autre ? Toute sa vie, le souvenir de cette mère aimante et aimée  va le hanter, le perturber, l’empêcher d’aimer, d’autant plus que, manifestement, son père peine à gérer la situation. C’est ainsi qu’on le retrouve adolescent, affirmant à ses meilleurs amis que sa mère vit aux Etats-Unis. Professionnellement, il va devenir journaliste, d’abord dans le sport, lui le supporter du Torino, à l’image de son père. Sa présence, par hasard, sur les lieux d’un drame lié à un scandale financier et qui a secoué l’Italie, va le faire bifurquer vers le journalisme d’investigation puis il va embrasser la carrière de correspondant de guerre, ce qui va le rendre témoin des manipulations effectuées à Sarajevo par des photographes sans scrupules. Une réponse de sa part à un courrier de lecteur et la rencontre d’une femme médecin suite à une crise d’angoisse vont peut-être contribuer à le sortir du problème récurrent lié à la mort de sa mère, alors qu’il doit retourner dans l’appartement de sa jeunesse afin de le mettre en vente.

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Des longueurs, de la lourdeur

Avec une durée de 2 h 10, Fais de beaux rêves fait partie des films, trop nombreux malheureusement, qui auraient gagné à être raccourci de deux bonnes dizaines de minutes. Certes, on y trouve quelques scènes d’une très grande force, dégageant une grande émotion, mais, beaucoup trop souvent, cette émotion retombe lors de la scène qui suit, soit parce qu’elle est trop longue, soit parce qu’elle est traitée de façon trop lourde, soit parce qu’elle nage un peu trop dans le pathos. C’est ainsi que la façon dont est amenée la vérité sur les circonstances de la mort de la mère de Massimo manque cruellement de subtilité avec ces visions successives de plongeurs italiens aux JO, de Juliette Gréco qui se jette dans le vide dans Belphégor et d’Elisa, interprétée par Bérénice Bejo, qui monte tout en haut du tremplin et qui plonge. Si vous n’avez pas compris, il vous faut retourner au cours préparatoire, option cinéma ! On notera que ce film sur l’amour porté par un fils à sa mère s’avère, à partir du moment où Massimo apprend la vérité sur la mort de cette dernière, presque aussi malhonnête vis à vis d’elle que J’ai tué ma mère de Xavier Dolan, 

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Une excellente distribution

Si le film alterne scènes réussies et d’autres qui le sont beaucoup moins, on ne peut que couvrir de louanges l’ensemble de la distribution et la direction d’acteur de Marco Bellochio. Se succédant dans le rôle de Massimo, d’abord enfant, puis adolescent et adulte pour finir, Nicolò Cabras, Dario Dal Pero et Valerio Mastandrea apportent chacun à leur tour un côté poignant au personnage qu’ils incarnent avec, en plus, chez Nicolò Cabras, une très grand vigueur dans sa façon de tenir tête aux adultes et à s’inventer un ami imaginaire. Barbara Ronchi est une mère dont le beau visage trahit la fragilité et Guido Caprino un père dont on perçoit qu’il a beaucoup de mal à gérer la situation après la mort de sa femme. Co-production franco-italienne oblige, on retrouve deux comédiennes françaises dans ce film : Emmanuelle Devos, jouant une mère à qui son fils Enrico, un enfant super gâté copain de Massimo, trouve tous les défauts de la terre ; Bérénice Bejo, qui interprète le rôle d’Elisa, la femme médecin dont Massimo fait la connaissance lorsqu’il est pris par une crise d’angoisse. Quant à la construction du film, faisant appel à de nombreux sauts dans le temps, elle se situe de façon très heureuse au juste milieu entre une chronologie totalement linéaire et une structure totalement éclatée.

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Dans un film non exempt de qualités, on est quand même surpris que, malgré sa longue expérience,  Marco Bellochio puisse délivrer certaines scènes aussi lourdes et d’autres qui ne sont que maladroites ! Par contre, on ne dira que du bien de la construction du film, de la distribution et de la direction d’acteur.

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