Critique Express : Prima la vita

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Prima la vita

Italie : 2024
Titre original : Il tempo che si vuole
Réalisation : Francesca Comencini
Scénario : Francesca Comencini
Interprètes : Fabrizio Gifuni, Romana Maggiora Vergano, Anna Mangiocavallo
Distribution : Pyramide Distribution
Durée : 1h50
Genre : Drame
Date de sortie : 12 février 2025

3.5/5

Synopsis : Un père et sa fille habitent les mondes de l’enfance. Il lui parle avec respect et sérieux, comme à une grande personne, il l’entraine dans des univers magiques débordants de vie et d’humanité. Il est le grand cinéaste de l’enfance et travaille sur Pinocchio. Un jour, la petite fille devient une jeune femme et l’enchantement disparait. Elle comprend que la rupture avec l’enfance est inéluctable et a le sentiment qu’elle ne sera plus jamais à la hauteur de son père. Alors elle commence à lui mentir et se laisse aller, jusqu’au bord du gouffre. Le père ne fera pas semblant de ne pas voir. Il sera là pour elle, tout le temps qu’il faut.

La relation entre un père et sa fille

Il est certain que Francesca Comencini est très loin d’avoir la notoriété de son père, le grand réalisateur Luigi Comencini. On se demande souvent si le fait d’être « une fille de » ou « un fils de » représente un inconvénient ou un avantage lorsqu’on se lance sur les traces professionnelles d’un père ou d’une mère de grande notoriété. Lorsqu’on connait la très grande qualité de ses films, par exemple le documentaire Carlo Giuliani, Ragazzo (2002) ou le film de fiction J’aime travailler (2004), qui ont été loin de rencontrer le succès qu’ils méritaient, on pencherait plutôt pour voir un inconvénient dans l’état de « fille de » de Francesca Comencini. Alors que Luigi Comencini est décédé il y aura bientôt 17 ans, alors que Francesca a passé la barre des 60 ans, elle a en tout cas décidé de visiter dans un film les relations qu’elle a eues avec son père à différents âges de sa vie, les bonnes comme les moins bonnes. Ce film, elle le portait en elle depuis longtemps mais il lui fallait se sentir à la hauteur pour arriver à concrétiser cette intention. Le déclic est intervenu lors du confinement lié à la pandémie de Covid, alors que les salles de cinéma étaient fermés et que de nombreux augures prédisaient la mort du cinéma. Cette période si particulière lui a permis d’aller puiser dans ses souvenirs et de reconstituer sa propre vie auprès d’un père qui avait consacré la sienne au cinéma, comme réalisateur bien sûr, mais aussi comme fondateur de la Cinémathèque de Milan, comme restaurateur de films dans cette même cinémathèque et comme critique de cinéma. Un homme dont l’envie de faire du cinéma est née en 1932, à l’âge de 16 ans, à la vision de L’Atlantide de  Georg Wilhelm Pabst, alors qu’il résidait dans le Lot-et-Garonne avec sa famille.

Concentré sur cette relation père/fille, le film ne fait aucune mention de la mère de Francesca et de ses 3 sœurs qui, elles aussi, ont travaillé dans l’industrie cinématographique. Francesca Comencini  étant née en 1961, elle a été profondément marquée par la préparation, vécue aux côtés de son père alors qu’elle était encore un enfant, du feuilleton télévisé Les aventures de Pinocchio apparu en 1972 sur les écrans. Par ailleurs, la relation qu’elle a eue avec son père a traversé la période des années de plomb, avec, entre autre, le 12 décembre 1969, l’attentat de la piazza Fontana et, en 1978, l’enlèvement puis l’assassinat d’Aldo Moro, des évènements que la réalisatrice ne pouvait pas occulter. De même, l’importance prise par la consommation de drogue dans la jeunesse à l’époque où Francesca sortait de l’adolescence a forcément eu un impact sur sa relation avec son père. Hommage rendu par une fille à son père, Prima la vita n’est pas pour autant un portrait sans complaisance : Luigi Comencini n’est pas toujours présenté de façon très sympathique et sa fille convient que s’il a su être un excellent père quand elle était une petite fille, il a été en difficulté lorsque elle est devenue une femme. En tout cas, il est évident que Francesca a retenu au moins deux leçons données par son père : le principe « Prima la vita  e poi cinema », « La vie d’abord, le cinéma ensuite » et ce qu’il lui a dit à propos de l’échec, reprenant à sa façon une citation de Samuel Beckett : « Déjà essayé, déjà échoué. Echoue encore, échoue mieux ». Les films centrés sur la relation entre une fille et son père ne sont pas si fréquents. Se terminant par une scène poétique absolument superbe, celui ci est réussi !

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