Critique Express : Only the rivers flow

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Only the rivers flow

Chine : 2023
Titre original : He bian de cuo wu
Réalisation : Shujun Wei
Scénario : Kang Chunlei, Shujun Wei d’après l’œuvre de Yu Hua
Interprètes : Yilong Zhu, Zeng Meihuizi, Tianlai Hou
Distribution : Ad Vitam
Durée : 1h42
Genre : Policier, Drame, Thriller
Date de sortie : 10 juillet 2024

3.5/5

Synopsis : En Chine, dans les années 1990, trois meurtres sont commis dans la petite ville de Banpo. Ma Zhe, le chef de la police criminelle, est chargé d’élucider l’affaire. Un sac à main abandonné au bord de la rivière et des témoignages de passants désignent plusieurs suspects. Alors que l’affaire piétine, l’inspecteur Ma est confronté à la noirceur de l’âme humaine et s’enfonce dans le doute…

 

Ce n’est pas toujours bon signe lorsqu’un film passé à Cannes met beaucoup de temps pour sortir en salles. C’est ce qui arrive pour Only the rivers flow, un film qui faisait partie de la sélection Un Certain Regard lors de l’édition … 2023 du Festival de Cannes. Eh bien, cette fois-ci, pas de crainte à avoir : certes, ce film chinois du jeune réalisateur Shujun Wei a mis plus d’un an pour arriver sur nos écrans mais il s’agit bien d’un film de qualité. On notera que les 2 premiers longs métrages de ce jeune réalisateur avaient déjà été retenus dans des sélections cannoises mais ne sont encore jamais sortis en salle dans notre pays : pour le premier, Courir au gré du vent, c’était dans la sélection officielle de 2020, pour un Festival qui n’a pas eu lieu du fait de la pandémie ; quant au suivant, Ripples of life, il faisait partie de la sélection de la Quinzaine des Cinéastes en 2021. On espère que Only the rivers flow aura suffisamment de succès pour inciter des distributeurs à rattraper ce retard.

Only the rivers flow est une adaptation très libre d’un roman de Yu Hua, l’auteur de Vivre !, adapté au cinéma en 1994 par Zhang Yimou. On peut qualifier Only the rivers flow de polar, mais, ce faisant, on se montrera très réducteur. Oui, une des facettes de ce film est bien d’être un film noir, et même un film noir très classique, avec un chef de la police qui, face à ce qui s’apparente à des crimes en  série, est très vite persuadé que l’enquête est bouclée alors que le policier Ma Zhe est intimement persuadé du contraire. Toutefois, l’enquête en tant que tel n’est pas l’élément le plus important de ce polar. Ce qui fait avant tout le sel de ce film, ce sont toutes les métaphores qui sont distillées avec finesse tout au long du film et la peinture qui est faite de Ma Zhe et de son environnement. Dès la première scène du film, on devine le genre de message que Wei Shujun veut nous adresser : des enfants sont en train de jouer au gendarme et au voleur dans une maison abandonnée. Alors que la poursuite l’a amené au premier étage, un enfant-gendarme ouvre une porte qui débouche sur … le vide. Autre exemple : plus tard, on verra un cinéma désaffecté transformé en poste de police.

Comme dans le roman dont il est l’adaptation, l’action du film est censée se passer en 1995, une période où la police scientifique était loin d’être aussi performante qu’aujourd’hui rendant beaucoup plus difficiles les enquêtes menées par Ma Zhe. En plus, remonter presque 30 ans en arrière était sans doute moins risqué pour un réalisateur qui, manifestement, tenait à montrer, dans un film finalement très politique, que la vie en Chine est loin d’être toujours rose. Il s’est retrouvé particulièrement bien aidé en cela par la pluie qui tombe sans arrêt tout au long du film, le district de Shapingba étant connu pour être une des régions les moins ensoleillées de Chine, avec en plus une lourde pollution de l’air qui lui a valu le surnom de « capitale brouillard ». Quant à Ma Zhe, on le voit, côté pile, très engagé dans son travail, très déterminé, très méticuleux, et, côté face, souvent désabusé face à sa hiérarchie. En plus, des soucis familiaux ont tendance à le ronger avec une épouse enceinte chez qui une échographie a annoncé que l’enfant à venir avait une probabilité non négligeable de rencontrer un problème de développement cognitif. Lui voudrait que son épouse avorte, elle s’y refuse !

Voulant retrouver dans son film l’atmosphère cinématographique des années 90, Wei Shujun s’est « battu » avec la production pour arriver à tourner son film sur pellicule 16 mm. On notera que le montage du film est l’œuvre d’un français, Matthieu Laclau, qui travaille en Chine et à Taïwan depuis 2008.

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