Critique Express : Le village aux portes du paradis

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Le village aux portes du paradis

Autriche, France, Allemagne, Somalie : 2024
Titre original : The Village Next To Paradise
Réalisation : Mo Harawe
Scénario : Mo Harawe
Interprètes : Ahmed Ali Farah, Anab Ahmed Ibrahim, Ahmed Mohamud Saleban
Distribution : Jour2Fête
Durée : 2h12
Genre : Drame
Date de sortie : 9 avril 2025

4/5

Synopsis : Un petit village du désert somalien, torride et venteux. Mamargade, père célibataire, cumule les petits boulots pour offrir à son fils Cigaal une vie meilleure. Alors qu’elle vient de divorcer, sa sœur Araweelo revient vivre avec eux. Malgré les vents changeants d’un pays en proie à la guerre civile et aux catastrophes naturelles, l’amour, la confiance et la résilience leur permettront de prendre en main leur destinée.

 

Pour peu que vous soyez bien au fait de l’actualité internationale, vous ne manquerez pas d’être surpris par l’utilisation du mot « paradis » dans le titre d’un film dont l’action se déroule en Somalie : un pays très pauvre, en proie à des guerres civiles depuis des décennies, un pays dans lequel une grande partie de la population manque de nourriture pour des raisons principalement climatiques. Jeune réalisateur somalien qui a passé sa jeunesse dans son pays d’origine et dorénavant installé en Autriche, Mo Harawe ne partage pas complètement cette vision pessimiste de son pays. Pour lui, il y a déjà en Somalie des endroits qu’on peut qualifier de paradisiaques et le pays lui-même est une sorte de paradis en puissance dont, pour diverses raisons, l’énorme potentiel n’arrive pas à se concrétiser. Il n’a donc pas hésité à donner le nom de Paradis au village de pêcheurs dans lequel va se dérouler l’action de son premier long métrage, présenté en mai dernier dans la sélection Un Certain Regard du Festival ce Cannes, et il a décidé de montrer ce qu’est vraiment la Somalie à travers ses habitants. S’il commence son film par la perception que l’occident a de son pays, avec un bulletin d’information de la chaîne britannique Channel 4 montrant une attaque de drones en Somalie, il poursuit très vite en nous invitant dans la communauté qui habite à Paradis et, plus particulièrement, dans une famille constituée de  Mamargade, un homme célibataire, de Cigaal, qu’il considère comme étant son fils, et de Araweelo, sa sœur, une femme qui vient de divorcer.

Mamargade est un homme qui ne sait jamais dire non quand on lui demande un service. C’est ainsi que lorsqu’une jeune femme de son voisinage s’est retrouvée enceinte d’un homme de passage, il a accepté de l’épouser afin de protéger son honneur, tout en s’engageant à divorcer dès la naissance. Sauf que la jeune femme est morte dans un accident de voiture peu après l’accouchement et c’est lui, Mamargade, qui a élevé Cigaal. En plus de travailler comme fossoyeur, Mamargade ne refuse jamais d’assurer des transports de marchandises vers la ville sans vraiment savoir quelle est la nature de ces marchandises et en désobéissant systématiquement aux ordres de ceux qui utilisent ses services. Le problème principal de Mamargade, c’est que cet homme généreux et serviable ne réfléchit jamais aux conséquences de ses actes et il arrive souvent que sa générosité se retourne contre lui. Araweelo, sa sœur, a davantage les pieds sur terre et elle sait forcer le destin même quand les us et coutumes de son pays voudraient qu’elle ne puisse pas réaliser son rêve. Ce rêve, c’est d’ouvrir son propre commerce, ce qui nécessite un emprunt, particulièrement difficile à obtenir dans la mesure où elle n’est plus mariée. Ces difficultés,  Araweelo est à même de les surmonter ! Quant à Cigaal, c’est un enfant très brillant à l’école, un enfant qui aime raconter ses rêves à ses copains. Malheureusement pour lui, l’école du village va fermer, un des professeurs étant malade, l’autre s’étant évaporé dans la nature. Un difficile changement de vie, pas forcément agréable à vivre, va devenir obligatoire pour lui. Au travers de ces 3 personnages, Mamargade, Araweelo et Cigaal, Mo Harawe dresse un portrait sensible de la Somalie, des problèmes rencontrés dans l’éducation des enfants, de son système judiciaire, de l’importance des clans et de la cohésion qui règne chez ses habitants, cohésion qui leur permet de surmonter les épreuves qu’ils rencontrent dans la vie de tous les jours. Ce film dont le fond est très fort fait également preuve d’une très grande qualité dans sa forme : dans ce film où l’on observe très peu de mouvements de caméra, la photo et les lumières de l’égyptien Mostafa El Kashef sont absolument magnifiques. Pas de musique d’accompagnement dans le film mais une bande son qui fait appel à des chansons venant de Mauritanie, d’Ethiopie et et, bien sûr, de Somalie.

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