Critique Express : L’agneau

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L’agneau

France : 2025
Titre original : –
Réalisation : Cheyenne Carron
Scénario : Cheyenne Carron
Interprètes : Johnny Amaro, Leslie Tompson, Cécilia Assoun
Distribution : Hésiode
Durée : 1h33
Genre : Drame
Date de sortie : 16 avril 2025

4/5

Synopsis : Le Père Paul, jeune prêtre solaire et charismatique, mène son ministère avec enthousiasme. Souvent sollicité, il ne ménage pas ses efforts pour être disponible et répondre aux multiples sollicitations des paroissiens. Jusqu’au jour où sa vie bascule ; le Père Paul est accusé d’avoir eu des gestes déplacés envers une jeune fille. Il devra se battre pour démontrer son innocence.

 Une vérité difficile à obtenir mais qu’il est indispensable de rechercher

Quiconque connait un tant soit peu le cinéma de Cheyenne Carron ne pourra être surpris par les sujets qu’elle traite dans L’agneau, son 16ème long métrage : les accusations d’abus sexuels portés contre des prêtres et la façon dont l’église catholique réagit face à ce problème et à la présomption d’innocence. On connait l’attirance de la réalisatrice pour tout ce qui touche à la foi, on connait son goût pour les sujets difficiles à aborder, on connait aussi la sincérité avec laquelle elle les traite et, pour tout dire, avant même de voir son film, sachant qu’il allait forcément nous amener à réfléchir, on se félicitait à l’avance qu’elle ait pris le risque d’affronter deux familles de critiques, celles venant de personnes ou d’institutions qui se refusent à croire à l’existence de prêtres prédateurs ou qui, du moins, souhaitent qu’on en parle le moins possible et celles venant de personnes qui vont voir dans l’importance donnée dans le film à la présomption d’innocence un retour en arrière par rapport aux avancées obtenues par le mouvement #MeToo. En fait, concernant ce dernier point, il n’en est rien, Cheyenne Carron n’étant en rien opposée à #MeToo, qu’elle considère au contraire comme étant un mouvement utile et libérateur car il permet enfin de donner la parole aux victimes d’abus. Elle souhaite seulement que la parole soit également donnée aux hommes qui sont accusés et qui, dans certains cas, sont innocents A partir de là, il est certain que la recherche de la vérité est difficile mais elle est indispensable, la souffrance d’un innocent injustement accusé étant certes différente de celle d’une victime mais tout aussi difficile à vivre.

Dans L’agneau, deux accusations d’attouchements sont lancées, la première contre un père de famille et qui concerne Joséphine, sa fille la plus jeune, la seconde contre le père Paul, un jeune prêtre très engagé dans son ministère, par Mathilde, une adolescente, la grande sœur de Joséphine. De façon très intelligente, permettant ainsi de montrer combien il est difficile d’accéder à la vérité, Cheyenne Carron confronte ces deux accusations, nous montrant à plusieurs reprises le père de famille qui vient voir le père Paul en insistant avec ce qu’on pense être une grande sincérité sur le sentiment d’injustice qu’il affirme ne pas pouvoir supporter et, a contrario, le père Paul, qu’on a vu à l’œuvre et dont on est certain de l’innocence, qui est tellement choqué par l’accusation portée contre lui et par le manque de soutien qu’il ressent de la part de sa hiérarchie qu’il n’arrive pas à se montrer convaincant dans sa défense. En parallèle avec les visites du père de famille, le film déroule une autre histoire impliquant le père Paul et qui montre sa profonde humanité. Elle concerne une prostituée d’origine ivoirienne tombée amoureuse d’un client et qui vient le voir en confession. Cette prostituée, le père Paul se refuse à la juger, se contentant de lui conseiller d’arrêter son « travail ». Par ailleurs, dans le cours du film, on assiste à la création et au fonctionnement d’une cellule d’écoute au sein d’un diocèse avec mise en œuvre d’un protocole d’accord avec un procureur qui engage cette cellule. Un moment très fort voit Louise, une femme de 76 ans venir témoigner de ce qu’elle avait vécu à l’âge de 10 ans et qu’elle n’avait pas pu raconter à l’époque pendant plusieurs mois tellement elle avait honte.

Comme toujours pour Cheyenne Carron, qui travaille toujours sans rien recevoir du CNC, elle a dû réaliser son film avec un budget très serré et on doit rendre grâce à Canal+ d’avoir permis la réalisation de L’agneau en apportant une contribution non négligeable à ce budget. Malgré ce manque de moyens financiers, auquel, à force, Cheyenne Carron est habituée, L’agneau est également une belle réussite au niveau de la forme, avec une image de très belle qualité, un jeu tout à fait convaincant de la part des interprètes, qu’ils soient professionnels ou amateurs, avec une mention particulière pour Johnny Amaro, l’interprète du père Paul, présent pour la 3ème fois consécutive dans un film de Cheyenne Carron, et une fin de film qui présente un suspens digne des meilleurs thrillers.

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