Hiver à Sokcho
France, Corée du Sud : 2024
Titre original : –
Réalisation : Koya Kamura
Scénario : Koya Kamura, Stéphane Ly-Cuong d’après le roman de Elisa Shua Dusapin
Interprètes : Roschdy Zem, Bella Kim, Park Mi-hyeon
Distribution : Diaphana Distribution
Durée : 1h45
Genre : Drame
Date de sortie : 8 janvier 2025
3/5
Synopsis : A Sokcho, petite ville balnéaire de Corée du Sud, Soo-Ha, 23 ans, mène une vie routinière, entre ses visites à sa mère, marchande de poissons, et sa relation avec son petit ami, Jun-oh. L’arrivée d’un Français, Yan Kerrand, dans la petite pension dans laquelle Soo-Ha travaille, réveille en elle des questions sur sa propre identité et sur son père français dont elle ne sait presque rien. Tandis que l’hiver engourdit la ville, Soo-Ha et Yan Kerrand vont s’observer, se jauger, tenter de communiquer avec leurs propres moyens et tisser un lien fragile.
Commençons par planter le décors : Sokcho, 80 000 habitants environ, une ville au nord est de la Corée du Sud, très proche de la frontière avec la Corée du Nord dont elle a fait partie jusqu’en 1953, date de la fin de la guerre de Corée. Des activités portuaires liées à la pêche et une plage réputée. C’est dans cette ville que vit Soo-Ha, une jeune femme dont le père, qu’elle ne connait pas, est français : sa mère et sa tante lui ont toujours dit que cet homme, venu en tant que spécialiste en ingénierie de la pêche, était reparti en France sans rien savoir de l’état de la mère. Sans doute pour tisser un lien invisible avec ce père inconnu, Soo-Ha a appris le français. Par ailleurs, elle partage sa vie entre sa mère, poissonnière, son petit ami Jun-Oh avec qui elle doit prochainement se marier et qui aspire à percer comme mannequin à Séoul et son travail dans une petite pension, où elle est, entre autre, chargée d’accueillir les clients. C’est ainsi qu’un jour, en plein hiver, arrive dans cette pension Yan Kerrand, un touriste français qui va s’avérer être scénariste et dessinateur de BD. Une arrivée qui va réveiller chez Soo-ha le désir de savoir qui était son père.
Entre un Yan pas très causant et qui est loin de se montrer chaleureux et une Soo-Ha aux petits soins avec lui, lui faisant découvrir la cuisine coréenne, l’aidant à trouver du papier et de l’encre afin qu’il puisse travailler, l’emmenant en voiture vers la zone coréenne démilitarisée, une certaine complicité va-t-elle réussir à se créer ? Et nous, spectateurs, allons nous pouvoir nous empêcher de nous faire un film, voire deux : Yan ne serait il pas le père de Soo-Ha ? Une histoire d’amour entre Yan et Soo-Ha peut elle être envisagée, d’autant plus quand cette dernière rompt avec Jun-Oh ? Lui même de mère française et de père japonais, le réalisateur Koya Kamura avoue ne pas se sentir complètement français en France et, encore moins, complètement japonais au Japon et il a souhaité interroger la notion d’identité dans un film. Comment est définie l’identité d’une personne ? Par la langue qu’elle pratique ? Par son héritage culturel ? Par son apparence physique ? Un peu à la peine dans l’écriture de ce premier long métrage, la lecture du roman d’Elisa Shua Dusapin, qui parlait d’identité et de métissage, lui a retiré une épine du pied, et il a très vite décidé d’en faire l’adaptation cinématographique. Toutefois, quand on adapte un roman au cinéma, peuvent surgir certaines difficultés. Pour Koya Kamura, la difficulté principale résidait dans le choix de la façon de retranscrire à l’écran les explications fournies par des mots de ce qui se passait dans la tête de Soo-Ha. Se refusant l’utilisation de la voix off qui, pour lui, impliquait que l’émotion ait déjà été analysée alors qu’il la souhaitait brute de décoffrage, il a fini par opter pour l’utilisation d’interludes d’animation réalisés par Agnès Patron. Tantôt figuratifs, tantôt abstraits, ils amènent aux spectateurs l’état du subconscient de Soo-Ha, son imaginaire et ses émotions. Sans trop y croire, Koya Kamura avait pensé au Roschdy Zem de Roubaix, une lumière pour interpréter le rôle du taiseux et mystérieux Yan Kerrand. Pour son plus grand bonheur, le comédien a accepté sa proposition. Concernant le choix de l’interprète de Soo-Ha, le réalisateur avait de telles exigences que le choix s’est vite limité à 4 candidates : il voulait une femme métisse parlant couramment coréen et français et qui soit grande pour ne pas apparaître en position de faiblesse par rapport à Yan Kerrand. Les choix de Roschdy Zem et de Bella Kim, ancien mannequin et débutante à l’écran, s’avèrent totalement réussis mais ils ne suffisent pas à masquer totalement quelques maladresses dans la réalisation de ce film sur les différences de culture, par ailleurs plein de délicatesse.