Critique : Hiding Saddam Hussein

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Hiding Saddam Hussein

Norvège : 2023
Titre original : –
Réalisation : Halkawt Mustafa
Scénario : Halkawt Mustafa
Interprètes : Alaa Namiq, Yassin Hamad Amin, Saidulla Faizulla, Barzan Qabil Ibrahim
Distribution : Golden Afrique Ciné
Durée : 1h44
Genre : Documentaire, Drame, Histoire
Date de sortie : 6 novembre 2024

3.5/5

Synopsis : Un fermier irakien reçoit un invité inattendu. Un invité qu’il doit cacher à sa famille, à ses amis et à 150 000 soldats américains. Cet invité est le président Saddam Hussein.

Rien ne destinait Alaa Namiq, modeste fermier habitant Aldor, une localité située à 140 kilomètres au nord de Bagdad, père de 3 enfants avec un 4ème en route, à accueillir puis à cacher Saddam Hussein lorsque la guerre d’Irak a entraîné la chute de son régime. Même si le lieu de naissance de Saddam Hussein n’est qu’à quelques kilomètres de Aldor, cela s’est fait par hasard et ce qui, au départ, devait durer l’espace d’une nuit a duré pendant 235 jours. Comme le dit Alaa Namiq, « dans la culture arabe, on ne demande jamais à un invité combien de temps il va rester. Saddam a demandé s’il pouvait rester pour une nuit, au final, cela a duré 235 nuits », jusqu’à son arrestation par les américains, le 13 décembre 2003.  235 jours, le temps d’apprendre à se connaître, le temps de passer d’une relation de sujet à maître à une relation d’amitié entre les deux hommes. Lorsque Saddam Hussein s’est présenté à lui, Alaa Namiq ne connaissait du monde extérieur que ce que lui racontait la seule chaîne de télévision qu’il recevait, une chaîne bien entendu contrôlée par l’état. Il ne savait pas que Saddam Hussein était un dictateur, qu’il avait utilisé des armes chimiques contre le peuple kurde et qu’il avait persécuté les musulmans chiites de son pays. Pour lui, Sadam Hussein était toujours le Président de l’Irak et il avait besoin d’aide. Pour nous, rajoute-t-il, il était parfait.

Alors que quelques semaines auparavant, ils ne se connaissaient pas, Alaa Namiq est devenu tout à la fois, en peu de temps, le docteur, le coiffeur, le chauffeur et le garde du corps de Saddam Hussein et les deux hommes, si éloignés l’un de l’autre au départ, ont fini par pouvoir avoir des conversations d’égal à égal.  C’est Alaa qui a eu l’idée de creuser un trou dans le jardin, sous un massif de fleurs, pour servir de cachette dans des situations d’urgence. C’est de ce trou que Saddam sortira le 13 décembre 2003, à l’arrivée de l’armée américaine. Alors qu’au début du séjour de Saddam Hussein chez Alaa Namiq, les risques étaient faibles  dans la mesure où seules 7 personnes savaient où il était, des personnes sûres, membres de sa famille ou gardes du corps, la situation a changé le jour où Paul Bremer, l’administrateur américain en Irak, a annoncé que les Etats-Unis s’engageaient à offrir une récompense de 25 millions de dollars pour les informations conduisant à la capture de Saddam Hussein et 15 millions de dollars pour les informations permettant l’arrestation de l’un de ses deux fils. Dorénavant, il n’était plus possible de faire confiance à quiconque, même les plus proches.

Originaire de la partie kurde de l’Irak et ayant fui la dictature de Saddam Hussein avec sa famille pour s’installer en Norvège, la chasse à l’homme organisée par les américains pour mettre la main sur le dictateur ne pouvait qu’intéresser au plus au point le réalisateur Halkawt Mustafa. Ce dernier s’est montré particulièrement intrigué par le fait que Saddam Hussein ait été découvert sortant d’un trou par l’armée américaine : était ce plausible et, si c’était vrai, comment ce président tout puissant avait il pu finir dans ce trou ? La vérité au sujet de ce trou, un homme et un seul pouvait la raconter : celui qui l’avait creusé ! Ce n’est qu’en 2012, grâce à un article du Washington Post, que Halkawt Mustafa a eu connaissance du nom de cet homme. Il a fallu ensuite réussir à le rencontrer, puis à le convaincre de raconter son histoire et, enfin, procéder à la réalisation du film tout en gardant pendant 14 ans, jusqu’au bout, le plus grand secret sur le projet, ne serait ce que pour assurer au mieux la sécurité d’Alaa. Présenté en tant que documentaire, Hiding Saddam Hussein est en fait un docu-fiction plein de suspens mais … dont on connait la fin. En effet, si, de façon régulière, on voit Alaa Namiq qui, face caméra, raconte son histoire, le plus souvent, on l’entend en fait commenter des scènes  puisées dans ce qui s’était passé durant les 235 jours du séjour de Saddam à Aldor, des scènes par ailleurs muettes interprétées par des comédiens s’étant glissés dans la peau qui d’Alaa, qui de Saddam, qui de Mohammad Ibrahim, un officier de l’Organisation spéciale de sécurité de Saddam Hussein et ami de ce dernier, un homme qui était dans le secret et qu’on voit venir rendre visite au dictateur à plusieurs reprises, etc. 

Pour  Halkawt Mustafa, la situation était délicate, lui qui faisait partie de la communauté kurde tant maltraitée par le régime baasiste irakien et dont la mère était originaire de la région bombardée par les armes chimiques de Saddam : l’amitié qui s’était nouée entre Alaa et Saddam ne risquait elle pas de donner finalement dans son film une image très humaine, trop humaine, du personnage du dictateur ? Et pourtant, très honnête dans ses choix, il a décidé de laisser Alaa raconter l’histoire exactement comme il le souhaitait. De toute façon, l’histoire a retenu tous les crimes commis par Sadam Hussein et il n’est pas inintéressant, bien au contraire, de rencontrer un homme qui plaisante sur son statut de bombe à retardement, un homme profondément attristé par la mort de ses 2 fils. Par ailleurs, l’histoire a également retenu qu’en 2003, il n’y avait pas d’armes de destruction massive en Irak et que l’invasion militaire de ce pays, lancée le 20 mars 2003 par George W. Bush, a entrainé la mort de centaines de milliers d’irakiens (le film parle de 108 000, mais d’autres sources montent le curseur jusqu’au million), en a délogé 15.4 millions, a causé la mort de 4 486 soldats américains et des blessures chez 32 226 soldats.

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