Critique Express : El profesor

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El profesor 

Argentine : 2023
Titre original : Puán
Réalisation : Maria Alché, Benjamín Naishtat
Scénario : Maria Alché, Benjamín Naishtat
Interprètes : Marcelo Subiotto, Leonardo Sbaraglia, Julieta Zylberberg
Distribution : Condor Distribution
Durée : 1h51
Genre : Comédie, Drame
Date de sortie : 3 juillet 2024

3.5/5

Synopsis : Professeur terne et introverti, Marcelo enseigne depuis des années la philosophie à l’Université de Buenos Aires. Un jour, se présente enfin l’occasion de briller : suite au décès de son mentor, il est pressenti pour reprendre sa chaire. Mais voilà que débarque d’Europe un autre candidat, séduisant et charismatique, bien décidé à lui-aussi briguer le poste.

Une élection précipitée suite à un évènement imprévisible : non, il ne s’agit pas de ce à quoi vous pensez ! Nous sommes en Argentine et le professeur Caselli, titulaire de la chaire de philosophie politique à l’Université Puán de Buenos-Aires,  a succombé en faisant un jogging. Marcelo Pena, son adjoint, est a priori son successeur naturel, sauf qu’il s’agit d’un homme sans véritable charisme,  peu sûr de lui, un homme qui va jusqu’à hésiter à postuler à ce poste qui, pourtant, semble lui revenir de droit. Et voilà que revient en Argentine un concurrent sérieux, Rafael Sujarchuk. Tout le contraire de Marcelo cet homme plus jeune qui a fait carrière en Allemagne, un homme au physique avantageux, un homme qui sait se faire mousser et qui revient dans son pays d’origine du fait de sa relation amoureuse avec une actrice argentine très populaire. Aucune hésitation de sa part lorsqu’il s’agit de postuler au remplacement d’un homme avec lequel, contrairement à Marcelo, il n’avait jamais eu de véritables rapports professionnels ! Le monde est ainsi fait : même chez les philosophes, l’apparence peut l’emporter sur l’essence.  Toutefois, même si le film insiste sur le côté puéril de la lutte pour le pouvoir entre Marcelo et Rafael, on peut voir en filigrane le choix qui peut être fait dans un pays comme l’Argentine entre une philosophie aux accents européens et une philosophie davantage ancrée dans la pensée latino-américaine.

C’est pendant le confinement de 2020, passé ensemble dans un appartement de Buenos Aires,  que Maria Alché et Benjamín Naishtat ont eu l’idée de El profesor et ont commencé à travailler sur le scénario. Maria Alché a commencé sa carrière cinématographique comme comédienne, en 2004, dans un film de Lucrecia Martel, avant de réaliser Familia Sumergida en 2018. De son côté, Benjamín Naishtat avait réalisé 3 longs métrages, dont Rojo, avant de se lancer dans El profesor avec sa compagne. El Profesor ne ressemble à aucun de leurs films précédents : pour El profesor, film sur une lutte pour le pouvoir au sein d’une université, ils ont choisi le genre de la comédie et, pour être plus précis, la comédie grinçante. On y trouve donc des scènes pleines d’un humour ironique, mélange de moquerie et de bienveillance. Si le couple de réalisateurs fait tout pour nous attacher à Marcelo, il ne se prive pas pour autant d’insister sur ses failles, sur ses maladresses, que ce soit dans son combat avec Rafael, à l’intérieur de son couple ou dans ses rapports avec Decana, la grande bourgeoise octogénaire à qui il donne des cours de philo pour arrondir ses fins de mois. A l’inverse, Rafael, tout en étant le personnage a priori antipathique de l’histoire, est parfois amené à montrer de véritables côtés positifs. Par ailleurs, on ne peut qu’être intéressé par la peinture que donne le film de la situation sociale en Argentine, tout en se demandant dans quelle mesure de tels films pourront continuer à nous parvenir suite à l’élection de Javier Milei en novembre dernier. Que voit on dans El profesor ? Des professeurs d’université ne gagnant même pas de quoi vivre correctement au point d’être obligés de donner des cours particuliers pour améliorer l’ordinaire ; une grande université qui va fermer par manque de crédit et les professeurs qui décident d’aller faire cours dans la rue. En résumé, une situation dramatique et qui va empirer si le nouveau président arrive à dérouler son programme.

Afin de rendre hommage aux grands réalisateurs du burlesque des débuts du cinéma, un grand nombre de scènes se terminent par une fermeture à l’iris, moyen choisi par ces réalisateurs pour adresser un clin d’œil aux spectateurs. On notera que la belle photographie de ce film argentin est l’œuvre d’une française, Hélène Louvart, une directrice de la photographie que les réalisateurs du monde entier s’arrachent depuis des années.

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