Driving mum
Islande : 2022
Titre original : Á ferð með mömmu
Réalisation : Hilmar Oddsson
Scénario : Hilmar Oddsson
Interprètes : Thröstur Leó Gunnarsson, Kristbjörg Kjeld, Hera Hilmar
Durée : 1h53
Genre : Comédie noire
Date de sortie sur UniversCiné : 17 février 2025
3.5
Un retour à la réalisation pour Hilmar Oddsson
Film en noir et blanc : Driving mum s’avère pourtant très coloré. Roadmovie, comédie, drame : Driving mum est tout cela à la fois. Un film découpé en plusieurs chapitres aux titres plus improbables les uns que les autres. La présence de Brejnev, un chien qui aurait pu prétendre à la Palm Dog si le film avait été sélectionné à Cannes. Kaurismäki, Jarmush, Fellini : les réalisateurs à qui l’on pense en voyant ce film pourtant si … personnel ! Un film dont l’action se déroule en 1980 : pas de téléphones portables, pas d’internet, beaucoup de routes qui ne sont pas goudronnées en Islande. Dans la péninsule de Vestfirdir, au nord-ouest du pays, Jón habite dans un endroit très isolé avec sa mère et Brejnev. De temps en temps, un homme vient en barque apporter des lots de cassettes audio racontant une actualité passée et repart avec les lainages destinés à la coopérative locale que Jon et sa mère ont tricotés en écoutant ces cassettes. Jón a raté sa vie, mais il n’en a pas encore vraiment conscience. Il va falloir que sa mère meurt, peu de temps après avoir clairement exprimé ses souhaits pour la suite des évènements (être photographiée près des cascades de Gullfoss, ne pas être incinérée, être enterrée, habillée de ses plus beaux habits, dans son village d’origine, Eyrarbakki, complètement de l’autre côté de l’île) pour que Jón comprenne petit à petit qu’il a vécu toute sa vie auprès d’une mère toxique qui n’a jamais voulu qu’il ait une vie à lui, sans elle, et qui l’a empêché de vivre auprès de Bergdís, l’amour de sa vie.
A la mort de sa mère, Jón ne se pose pas de question : il entend honorer à la lettre les dernières volontés de sa mère. Il installe le corps de sa mère sur le siège de la vieille Ford Cortina, il embarque Brejnev et il se dirige vers le sud. Diverses rencontres vont montrer un Jón désemparé face à un monde qu’il ne connait pas, ne l’ayant jamais pratiqué, mais elles ont quand même avoir le mérite de lui permettre de s’adonner à sa passion, la photographie, et de lui donner un semblant de sociabilisation en lui permettant de parler avec des inconnu(e)s. Au cours de ce périple, deux femmes l’accompagnent. Tout d’abord Bergdis qu’il croit reconnaitre dans toutes les charmantes jeunes filles qu’il est amené à voir depuis sa voiture. Et puis aussi, et puis surtout, sa mère qui, bien que morte, continue à régenter sa vie, prenant la parole pour affirmer que Bergdis aurait fini par le tromper, pour lui ordonner de tourner à droite, ou à gauche un peu plus loin, etc.. Une emprise de la part de sa mère qui continue à fonctionner tant que les paysages sont escarpés mais contre laquelle, l’horizon se dégageant autour de lui dans la traversée de l’Islande, Jón va finir par réagir, se permettant enfin de tourner à droite alors que sa mère lui avait dit de tourner à gauche. La fin de ce film parfois incommode et souvent plein de poésie, c’est à vous de la découvrir. Avec ce film, Hilmar Oddsson, aujourd’hui âgé de 68 ans, renoue avec la réalisation qu’il avait abandonnée depuis une vingtaine d’années pour l’enseignement du cinéma et on ne peut que s’en féliciter. Pour l’interprétation des 3 rôles principaux, il a fait appel à des valeurs sures du cinéma islandais, dont sa propre fille, Hera Hilmar, dans le rôle de Bergdis. On reconnait aussi dans le petit rôle d’un touriste français le franco-islandais Tomas Lemarquis qui, il y 22 ans, avait le rôle principal de Nói albínói. On remercie UniversCiné d’accueillir ce beau film tout en regrettant qu’il n’ait pas bénéficié d’une sortie en salle.