Critique : Emilia Perez

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Emilia Perez

France, Mexique : 2024
Réalisation : Jacques Audiard
Scénario : Jacques Audiard, Thomas Bidegain
Acteurs : Zoe Saldana, Karla Sofia Gascon, Selena Gomez
Distribution : Pathé Distribution
Genre : Comédie musicale, Thriller
Durée : 2h10
Date de sortie (FR): 21 Août 2024

4/5

Je vis une histoire d’amour complexe avec le cinéma de Jacques Audiard. Il fut à l’origine de certains de mes premiers émois cinématographiques, une ouverture vers un cinéma français stylisé et puis, peu à peu, le symbole d’une idéologie un peu confuse, bradant parfois sa morale sur l’autel du spectaculaire.

Il m’a fallu du temps pour déconstruire à quel point Audiard s’inscrivait dans une réécriture assez évidente d’un certain thriller à l’américaine qu’il assaisonne de sa science du dialogue et d’une grande maîtrise de la caméra portée.

Avec Dheepan, il me semblait qu’il avait atteint un point de non retour, en se détachant tellement d’un cadre réaliste que le film trahissait une volonté de contrôle obsessionnelle.

Avec un vrai western américain, ‘Les frères Sisters’ et un vrai petit film français avec ‘Les Olympiades’, l’on pourrait croire qu’il a cherché à retrouver un peu de légitimité. Peu importe, en fait, mais je trouvais ces essais plutôt réussis, plus sobres aussi, comme s’il récoltait un peu les leçons de certains excès.

Emilia Perez, c’est à la fois le retour au fantasme mais aussi à la maîtrise. En affichant par la forme de la comédie musicale le décalage de son spectacle, Audiard réussit à accomplir un très joli scénario en piochant encore une fois dans la tradition américaine mais cette fois pour la pirater de l’intérieur.

Le film ne réinvente pas complètement la roue certes et on pourrait lui reprocher de surfer sur des thématiques de société actuelles sans avoir grand chose à en dire. C’est être bien cruel car le spectacle, lui, est bien au rendez-vous.

Emilia Perez est sublime dans ces chorégraphies, dans son rythme. Il est un peu grotesque par sa bien pensance, par ses couleurs un peu douteuses et par cette manière qu’à son réalisme magique de fédérer tous les symboles comme si le monde entier tenait sur un geste de son Emilia Perez. Une histoire très habile, originale, cocasse, brouillonne certes, mais stupéfiante dans ces vrais moments de cinéma.

Audiard est sans doute plus à l’aise pour imiter que pour dénoncer. Mais les moyens de cinéma qu’il utilise sont tellement maîtrisés et son talent de metteur en scène tellement évident, qu’il laisse ici de sacrées images qui valent le grand écran.

Synopsis : Sylvia est une assistante sociale qui mène une vie simple et structurée. Cette vie est bouleversée lorsque Saul la suit chez elle après leur réunion d’anciens élèves. Leur rencontre surprise aura un impact profond sur eux deux.

Conclusion

Alors que les grands spectacles se font de plus en plus aseptisés, Audiard aura enfin réussi enfin à imprimer vraiment sa patte sur un film américain. Ce Emilia Perez restera une étrangeté réjouissante, un film plus esthétique que politique mais qui est unique par la seule impossibilité de le ranger dans une case.

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