Any Day Now
Finlande : 2020
Titre original : Ensilumi
Réalisation : Hamy Ramesan
Scénario : Hamy Ramesan, Antti Rautava
Interprètes : Aran-Sina Keshvari, Shahab Hosseini, Shabnam Ghorbani
Distribution : Urban Distribution
Durée : 1h22
Genre : Drame
Date de sortie : 8 décembre 2021
3.5/5
Fuyant la guerre Irak-Iran alors qu’il n’avait que 7 ans, la famille du réalisateur finno-iranien Hamy Ramezan est établie en Finlande depuis 1990 après être passée par Istamboul et Belgrade avant d’arriver à Helsinski. Diplômé de l’UCA (University Of Creative Arts) de Farnham, en Angleterre, Hamy a réalisé plusieurs court-métrages dont Listen, coréalisé avec la réalisatrice zambienne Rungano Nyoni, présenté en avant-première à Cannes en 2014 et couvert de récompenses un peu partout dans le monde. Any Day Now, présenté dans la sélection Generation Kplus de la Berlinade 2021, est son premier long métrage.
Synopsis : Au cœur de la Finlande, Ramin Mehdipour, 13 ans, et sa famille iranienne se voient refuser leur demande d’asile. Après un dernier recours et malgré la menace d’expulsion, le jeune garçon goûte aux joies des vacances et de la rentrée scolaire, où chaque moment d’insouciance s’avère précieux.
Une famille iranienne dans l’expectative
Un matin comme les autres : Mahtab réveille en douceur Bahman, son mari, et leurs deux enfants, Ramin, 13 ans, et Danya, une fillette de 8 ans. Cette famille, la famille Mehdipour, est iranienne et elle vit actuellement en Finlande, dans ce qui, à l’écran, s’apparente à un confortable petit appartement d’un centre d’accueil de migrants en attente de régularisation. Certes, il y a dans le bâtiment quelques problèmes de voisinage, il y a surtout, la menace d’un rejet de leur demande d’asile, mais, par ailleurs, la population finlandaise se montre très accueillante et les 2 enfants sont scolarisés. Ramin est même le seul à pourvoir lire un courrier en finnois et c’est lui qui traduit à ses parents la lettre leur annonçant le rejet de leur demande. Une décision motivée par l’absence de certains documents dans la demande mais tempérée par la possibilité d’un appel auprès du tribunal.
Même si le film ne perd pas des yeux le reste de la famille, Mahtab, manifestement très pieuse, Bahman, qui ne participe pas aux prières effectuées par son épouse et qui boit de l’alcool, Danya, très malicieuse et qui fait chaque matin la course avec son père lors du lavage de dents, il est quand même surtout consacré à suivre les journées de Ramin : Ramin au collège, Ramin avec Helena, une finlandaise âgée, et sa passion pour les plantes, Ramin avec Jigi, son meilleur ami, Ramin, qui tombe amoureux d’une jeune finlandaise qui le dépasse en taille. « Comment on parle aux filles ? », demande Ramin à son père. « Regarde simplement la fille dans les yeux et souris. C’est tout, le reste suivra ! », répond le père. Ramin qui est à un âge où on peut encore être insouciant tout en étant tout à fait conscient de la menace qui pèse sur sa famille, qui pèse sur son avenir.
Une vision idyllique ?
Ce film sur une famille de migrants qui vit dans l’attente de l’acceptation de leur demande d’asile dans un pays européen ne ressemble en rien aux films qu’on a déjà vus, traitant d’un sujet similaire. La Finlande est-elle vraiment ce pays idyllique qui, en étant tout sauf laxiste en matière d’acceptation des demandes d’asile, sait accueillir dignement les migrants qui arrivent chez elle ? Des logements très décents et pas des tentes démolies par les forces de police, des enfants scolarisés, des parents à qui sont proposés des cours de finnois, des forces de police qui se conduisent avec civilité et dont on sent la gêne lorsqu’elles doivent opérer une mission délicate, une population qui aborde le phénomène de l’immigration avec beaucoup de sérénité et qui sait ce que le mot fraternité veut dire, vous savez, le 3ème item de la devise de la République Française qui semble beaucoup trop oublié dans notre pays. Est-on en plein rêve ou ce que l’on voit est-il proche de la réalité finlandaise ? Et puis, connaissant la réputation dont jouit la Finlande en matière de système éducatif, on prête bien sûr un œil attentif aux scènes se déroulant dans le cadre de la scolarité de Ramin et de Donya, et … l’on ne voit pas de différence sensible avec ce qui se passe chez nous.
Le casting
Concernant le casting de son film, Hamy Ramesan avait un problème majeur : trouver un jeune adolescent aux origines iraniennes maitrisant parfaitement le finnois, qui soit attachant et capable de jouer. C’est en partant d’un groupe de 30 candidats possibles que le choix s’est porté sur Aran-Sina Keshvari qui fait des premiers pas très réussis devant la caméra. Bahman, son père, est interprété avec beaucoup de justesse par un remarquable comédien iranien que les cinéphiles connaissent dorénavant très bien : Shahab Hosseini, qu’on a pu voir et apprécier dans 3 des plus grands films de Asghar Farhadi : A propos d’Elly, Une séparation et Le client, ainsi que dans Au revoir de Mohammad Rasoulof. Pour Shabnam Ghorbani, l’interprète de Mahtab, il s’agit de son premier rôle dans un film de cinéma mais elle est une actrice de théâtre confirmée et elle a participé à de nombreux téléfilms et à des séries télévisées. En ajoutant la petite Kimiya Eskandari, l’interprète de Donya, Hamy Ramesan a ainsi reconstitué sa propre famille, le film étant en partie inspiré par ce qu’il a vécu en arrivant en Finlande. Ce film tout en délicatesse a été joliment photographié par un Directeur de la photographie finlandais, Arsen Sarkisiants, qui a su faire un très bon usage du format 2.39 : 1, celui qui fut popularisé par le Cinémascope.
Conclusion
Pour son premier long métrage, le très prometteur réalisateur finno-iranien Hamy Ramezan propose un film touchant sur les bonheurs et les problèmes rencontrés par un jeune adolescent dont la famille, des migrants iraniens, vit avec la peur de ne pas être acceptée dans le pays qu’ils ont atteint après ce qu’on suppose être un long périple.