Critique : Amel & les fauves

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Amel & les fauves

Tunisie : 2022
Titre original : Streams
Réalisation : Mehdi Hmili
Scénario : Mehdi Hmili
Interprètes : Afef Ben Mahmoud, Zeineb Sawen, Iheb Bouyahia
Distribution : La vingt-cinquième heure
Durée : 2h02
Genre : Drame, thriller
Date de sortie : 26 avril 2023

3.5/5

Synopsis : Amel est ouvrière dans une usine à Tunis. Son patron la met en relation avecun homme d’affaires qui peut permettre à son fils d’intégrer le club de foot local. Profitant de la situation, l’homme tente d’abuser d’elle. La police les surprend mais c’est Amel qui est finalement déclarée coupable d’attentat à la pudeur et d’adultère. À sa sortie de prison, elle part à la recherche de son fils dans les nuits underground de Tunis, peuplées de prédateurs et d’une jeunesse en quête de liberté.

La Tunisie post Révolution du jasmin

Qu’une mère éprouve une grande affection pour son fils de 17 ans, une affection d’autant plus grande que celle qu’elle a peut-être éprouvée, un jour, pour son mari est en chute libre, quoi de plus normal. Que cette femme, Amel, ouvrière et déléguée syndicale dans une usine, profite du fait qu’elle rencontre souvent son patron pour lui demander de la mettre en relation avec un homme d’affaires influent qui pourrait permettre à son fils, Moumen, bon gardien de but, d’intégrer un club prestigieux de Tunis, comment lui reprocher ? Que cet homme d’affaires invite Amel au restaurant pour avoir cette discussion, c’est plutôt sympathique, ne trouvez vous pas ? Qu’il aille jusqu’à lui proposer de la ramener chez elle en voiture, plutôt que de prendre un taxi, c’est vraiment classe ! Qu’il profite de la situation pour la conduire, non pas chez elle, mais dans un endroit plus ou moins désert et qu’il commence à abuser d’elle dans la voiture, en proférant les trop classiques « Laisse toi faire, je sais que tu en as envie », rien ne va plus ! Que la police débarque et emmène le duo au poste de police, serait-ce un coup de chance pour Amel ? Que seule Amel soit considérée comme coupable d’adultère et d’outrage à la pudeur et se retrouve condamnée à 6 mois de prison, alors que son violeur peut repartir libre comme l’air, là, c’est proprement révoltant !

Dès sa sortie de prison, Amel va chercher à retrouver un fils qui, suite à la condamnation de sa mère, a perdu pied et vit dorénavant dans le milieu de la nuit fréquenté par une frange de la jeunesse tunisienne, un milieu dans lequel évoluent de nombreux travestis, un milieu qui vit en banlieue, qui vit dangereusement dans une sorte d’exaltation factice et dont le gagne-pain provient principalement de la prostitution et du trafic de drogue. Amel, qui a eu du mal à retrouver du travail, est également dans un milieu de la nuit, un autre milieu qui ne rencontre pas celui de Moumen, celui des cabarets de Tunis.

C’est un film avec beaucoup d’éléments autobiographiques que nous propose Mehdi Hmili. Jeune, il faisait du football à haut niveau, sa mère a fait de la prison pour des motifs similaires à ceux de Amel. L’histoire qu’il raconte dans Amel & les fauves, il aurait voulu qu’elle fasse l’objet de son premier long métrage mais Ben Ali était encore au pouvoir et il s’est orienté vers un autre sujet qui a finalement pris la forme de Thala mon amour, un film de 2016 jamais sorti en France, un film qui raconte le destin d’un prisonnier politique qui s’est échappé et qui cherche à retrouver sa fiancée. L’histoire que raconte Amel & les fauves a offert à Mehdi Hmili l’opportunité de parler de quatre sujets qui lui tiennent particulièrement à cœur : la famille, en mettant particulièrement l’accent sur le courage des femmes tunisiennes, la culpabilité, la rédemption et, bien entendu, la corruption. Dans sa peinture des mondes de la nuit tunisiens, on se prend un peu trop souvent à maugréer intérieurement face à une certaine complaisance et, surtout, face à des scènes trop étirées dans le temps, des scènes dont on ne peut s’empêcher d’y trouver les travers récurrents du cinéma d’Abdellatif Kechiche. Bingo, car Mehdi Hmili fait référence à 3 réalisateurs dans le dossier de presse, Pialat, Cassavetes et … Kechiche, et, en plus, Ghalya Lacroix, la monteuse d’Amel & les fauves s’avère être la compagne de Kechiche, la monteuse de nombre de ses films ainsi que la coscénariste de certains d’entre eux ! Quant aux 3 têtes d’affiche de la distribution, si chacune d’entre elles contribuent à enrichir le film, elles ont des profils très différents : comédienne confirmée pour Afef Ben Mahmoud, l’interprète d’Amel, débutant pour Iheb Bouyahia, qui interprète Moumen, grande réputation comme chanteuse pour Zeineb Sawen qui débute au cinéma dans le rôle de l’amie de Moumen.

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