Critique : A Different Man (Deuxième avis)

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A Different Man

États-Unis : 2024
Réalisation : Aaron Shimberg
Scénario : Aaron Shimberg
Acteurs : Sebastian Stan, Renate Reinsve, Adam Pearson
Distribution (US): A24
Genre : Comédie, Drame
Durée : 1h52

3/5

C’est avec un mauvais esprit revigorant que je me suis beaucoup amusé devant “A different man”. C’était une projection d’autant plus amusante que son humour noir très clivant, sert un peu de thermomètre quant à la réception du deuxième degré d’une salle de cinéma. Les premiers rires étaient comme traqués, accompagnés de réprimandes discrètes, à voix basse. Heureusement que le film contamine son public de son quarantième degré en renvoyant les sensibilités trop rigides à l’idée qu’au fond: “on n’y comprend rien de toute façon….”

Synopsis : Edward cherche à prendre un nouveau départ. Après une opération de chirurgie réparatrice du visage, il fait une fixation sur un homme qui joue son rôle dans une production théâtrale basée sur son ancienne vie.

Pourtant, son protagoniste misérable, incapable de s’accomplir tant il est condamné à une nevrose permanente, n’est pas original en soit. Le cinéma de Charlie Kaufman ou même de Woody Allen des débuts, charriait déjà cet humour typique ashkénaze new-yorkais, frôlant en permanence avec l’absurde et la confusion de l’identité. La différence de ce “different man” se situe ici dans sa différence physique, cette neurofibromatose, si inévitable qu’elle rend invisible les tourments intérieurs.

C’est à l’aune de ce paradoxe que le scénario apporte un regard original et sans complaisance sur notre rapport à l’autre. Ici, pas de place pour la pitié ou les commisérations. Le personnage bien amusant d’Adam Pearson, véritablement atteint de la maladie, rend toute récupération politique de l’humour du film complètement inopérant.

Le thème de la confusion identitaire se fait encore plus complexe quand le handicap qui nous est montré est ridiculisé par un acteur véritablement atteint de la maladie. Dans la différence entre l’effet spécial de cinéma et cette réalité inaltérable, les effets spéciaux deviennent un artifice qui ne se cache plus.

Sans vous gâcher les énièmes rebondissements pathétiques dignes, pour certains, de lignes de Kafka, j’ai eu du plaisir à ce que le film réussit drôlement à exprimer le trouble de son personnage et même de le réconcilier avec lui-même une fois qu’il aura constaté bien misérablement que son problème n’est pas son apparence physique et ne l’a jamais été d’ailleurs.

La question de l’humour est toujours subjective mais il faut dire qu’on est sur un créneau vraiment clivant. Moi je suis hilare mais je sentais bien que c’était glissant. En tout cas vive le clivage!  Je vous garantis que le film vous marquera, ne serait- ce que par contraste avec les comédies actuelles!

Si le film pèche un peu pour moi, c’est par son intellectualisme un peu trop psychanalytique. Je sens que le film se veut une critique d’un petit entre soi du théâtre new yorkais, néanmoins, il en est trop proche pour rendre cette critique efficace.

Plutôt que de s’arrêter à un traitement neutre du rapport au handicap (il a une neurofibromatose et c’est comme ça, ce n’est pas le sujet), le réalisateur s’en sert pour plutôt critiquer le rapport que les autres ont avec ce handicap, jusqu’au titre du film qui renvoie ainsi à notre propre relation à l’image et à la représentation.

Conclusion

Bien, même très rejouissant que cet humour noir même si l’on aurait aimé un film un  peu plus ouvert sur son spectateur. Quelque chose ici, à force de s’amuser de l’incommunicabilité du monde, ne cherche plus vraiment à se faire comprendre.

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