Eh oui, eh oui, on entend déjà les protestations venir ! Ce n’est effectivement pas du tout aujourd’hui que les nominations pour la 45ème édition des César ont été annoncées. La petite cérémonie traditionnelle au Fouquet’s a déjà eu lieu il y a deux semaines, le mercredi 29 janvier, en présence de Alain Terzian, le président de l’Académie des Arts et Techniques du Cinéma, et de Florence Foresti, la maîtresse de la cérémonie qui aura lieu le vendredi 28 février à 21h00 à la Salle Pleyel à Paris et qui sera diffusée en clair et en direct sur Canal +. Elle sera présidée par l’actrice Sandrine Kiberlain, César du Meilleur espoir féminin en 1996 pour En avoir ou pas de Laetitia Masson et de la Meilleure actrice en 2014 pour 9 mois ferme de Albert Dupontel. Nous prenons toutefois le début des séances de rattrapage ce jour au cinéma Les 3 Luxembourg, à raison de trois films par jour pendant deux semaines jusqu’au mardi 25 février, pour prétexte afin d’y revenir.
Car plus rien ne va dans l’univers de la récompense suprême du cinéma français ! Alors que la semaine de l’annonce a été marquée par un tollé médiatique parce que J’accuse de Roman Polanski avait reçu de justesse le plus de nominations, en dépit de la réputation sulfureuse du réalisateur, les esprits ne se sont pas vraiment calmés depuis. Ainsi, malgré l’annonce le week-end dernier de la mise en œuvre de mesures visant à instaurer la parité hommes-femmes au sein de l’Académie du cinéma français – actuellement seul un bon tiers de ses membres sont des femmes – , une tribune rassemblant 227 membres de l’Académie, dont les fraîchement nommés Arnaud Desplechin, Céline Sciamma, Chiara Mastroianni, Karin Viard, Reda Kateb et Roschdy Zem, a réclamé en début de semaine une refonte en profondeur des modes de gouvernance de l’association, accusée d’élitisme. Il serait même question de la nomination d’un médiateur par le puissant CNC, afin de procéder à la modernisation de l’Académie. Sans oublier une lettre ouverte de plusieurs associations féministes, publiée ce jour, qui appelle à ne pas voter pour le film sur l’affaire Dreyfus. Tout cela sent donc bon la fin de règne de Alain Terzian, en poste depuis 2003.
Sans être véritablement scandaleux, les choix préliminaires pour le meilleur de l’année 2019 de l’Académie du cinéma français manquent tout de même d’audace. Non seulement ils ressemblent de près à ceux de l’Académie des Lumières, qui a d’ores et déjà fini avec ses trophées depuis plus de deux semaines. Ils se reposent de surcroît sur un groupe assez restreint de suspects habituels. Du côté des réalisateurs, on retrouve des cinéastes nommés à de nombreuses reprises dans le passé, comme Arnaud Desplechin, qui est désormais à dix-sept citations, quoique à un seul César de la Meilleure réalisation en 2016 pour Trois souvenirs de ma jeunesse, et François Ozon, encore plus mal aimé avec ses seize nominations cumulées sans le moindre César, ni hier, ni demain en toute probabilité. En comparaison, le controversé Roman Polanski compte parmi les favoris de l’Académie du cinéma français depuis ses deux premiers César en 1980 pour Tess, suivis depuis par six autres, le dernier en date en 2014 pour la Meilleure réalisation de La Vénus à la fourrure.
Même constat du côté de l’interprétation, où l’on a l’impression de croiser, année après année, les mêmes noms, tels que Adèle Haenel qui est déjà à sa septième nomination et la troisième consécutive après celles pour 120 battements par minute de Robin Campillo et En liberté de Pierre Salvadori, Karin Viard et sa treizième nomination à la suite de son troisième César dans la catégorie de la Meilleure actrice dans un second rôle pour Les Chatouilles de Andréa Bescond et Eric Métayer l’année dernière, Daniel Auteuil en lice pour la quatorzième fois, vingt ans après son dernier sacre pour La Fille sur le pont de Patrice Leconte et Vincent Cassel et sa septième nomination, couronné en 2009 pour le diptyque autour de Mesrine de Jean-François Richet, Mais il y a également quelques bonnes surprises à signaler, comme par exemple la première nomination en tant que Meilleure actrice pour Chiara Mastroianni, vingt-six ans après sa nomination de Meilleur espoir féminin pour Ma saison préférée de André Téchiné, voire la première nomination tout court pour Eva Green. De même, Melvil Poupaud et Roschdy Zem peuvent célébrer leur première nomination comme Meilleur acteur, après respectivement deux nominations comme Meilleur espoir masculin pour le premier et trois dans des seconds rôles pour le deuxième.
Dans les deux catégories consacrées aux seconds rôles, on croise également quelques noms familiers. Du côté féminin, il y a Fanny Ardant, nommée une première fois comme Meilleure actrice dans La Femme d’à côté de François Truffaut en 1982, Hélène Vincent, déjà César de la Meilleure actrice dans un second rôle en 1989 pour La Vie est un long fleuve tranquille de Etienne Chatiliez, ainsi que Josiane Balasko et son César d’honneur quelque peu prématuré de l’an 2000, précédé quatre ans plus tôt par celui du Meilleur scénario pour Gazon maudit. Parmi les messieurs, trois pourraient gagner leur deuxième César : les Meilleurs espoirs masculins de 2006, Louis Garrel dans Les Amants réguliers de Philippe Garrel, et de 2012, Grégory Gadebois dans Angèle et Tony de Alix Delaporte, ou bien le Meilleur acteur de 2018, Swann Arlaud dans Petit paysan de Hubert Charuel.
Meilleur Film
La Belle époque de Nicolas Bedos, produit par François Kraus et Denis Pineau-Valencienne
Grâce à Dieu de François Ozon, produit par Eric Altmayer et Nicolas Altmayer
Hors normes de Eric Toledano et Olivier Nakache, produit par Nicolas Duval Adassovsky
J’accuse de Roman Polanski, produit par Alain Goldman
Les Misérables de Ladj Ly, produit par Toufik Ayadi et Christophe Barral
Portrait de la jeune fille en feu de Céline Sciamma, produit par Bénédicte Couvreur
Roubaix Une lumière de Arnaud Desplechin, produit par Pascal Caucheteux et Grégoire Sorlat
Meilleure réalisation
Nicolas Bedos pour La Belle époque
Arnaud Desplechin pour Roubaix Une lumière
Ladj Ly pour Les Misérables
François Ozon pour Grâce à Dieu
Roman Polanski pour J’accuse
Céline Sciamma pour Portrait de la jeune fille en feu
Eric Toledano et Olivier Nakache pour Hors normes
Meilleure actrice
Anaïs Demoustier dans Alice et le maire
Eva Green dans Proxima
Adèle Haenel dans Portrait de la jeune fille en feu
Chiara Mastroianni dans Chambre 212
Noémie Merlant dans Portrait de la jeune fille en feu
Doria Tillier dans La Belle époque
Karin Viard dans Chanson douce
Meilleur acteur
Daniel Auteuil dans La Belle époque
Damien Bonnard dans Les Misérables
Vincent Cassel dans Hors normes
Jean Dujardin dans J’accuse
Reda Kateb dans Hors normes
Melvil Poupaud dans Grâce à Dieu
Roschdy Zem dans Roubaix Une lumière
Meilleure actrice dans un second rôle
Fanny Ardant dans La Belle époque
Josiane Balasko dans Grâce à Dieu
Laure Calamy dans Seules les bêtes
Sara Forestier dans Roubaix Une lumière
Hélène Vincent dans Hors normes
Meilleur acteur dans un second rôle
Swann Arlaud dans Grâce à Dieu
Grégory Gadebois dans J’accuse
Louis Garrel dans J’accuse
Benjamin Lavernhe dans Mon inconnue
Denis Ménochet dans Grâce à Dieu
Meilleur scénario original
La Belle époque par Nicolas Bedos
Grâce à Dieu par François Ozon
Hors normes par Eric Toledano et Olivier Nakache
Les Misérables par Ladj Ly, Giordano Gederlini et Alexis Manenti
Portrait de la jeune fille en feu par Céline Sciamma
Meilleur scénario adapté
Adults in the Room par Costa-Gavras
J’accuse par Roman Polanski et Robert Harris
J’ai perdu mon corps par Jérémy Clapin et Guillaume Laurant
Roubaix Une lumière par Anraud Desplechin et Léa Mysius
Seules les bêtes par Dominik Moll et Gilles Marchand
Meilleur Film étranger
Douleur et gloire (Espagne) de Pedro Almodovar
Le Jeune Ahmed (Belgique) de Jean-Pierre et Luc Dardenne
Joker (États-Unis) de Todd Phillips
Lola vers la mer (Belgique) de Laurent Micheli
Once Upon a Time in Hollywood (États-Unis) de Quentin Tarantino
Parasite (Corée du Sud) de Bong Joon-ho
Le Traître (Italie) de Marco Bellocchio
Meilleur Documentaire
68 Mon père et les clous de Samuel Bigiaoui, produit par Rebecca Houzel et Camille Laemlé
La Cordillère des songes de Patricio Guzman, produit par Renate Sachse
Lourdes de Thierry Demaizière et Alban Teurlai, produit par Stéphanie Schorter, Thierry Demaizière, Alban Teurlai, Stéphane Célérier et Valérie Garcia
M de Yolande Zauberman, produit par Charles Gillibert, Yolande Zauberman et Fabrice Bigio
Wonder Boy Olivier Rousteing né sous X de Anissa Bonnefont, produit par Anissa Bonnefont
Meilleur Premier Film
Atlantique de Mati Diop, produit par Judith Lou Lévy et Eve Robin
Au nom de la terre de Édouard Bergeon, produit par Christophe Rossignon et Philip Boëffard
Le Chant du loup de Antonin Baudry, produit par Jérôme Seydoux et Alain Attal
Les Misérables de Ladj Ly, produit par Toufik Ayadi et Christophe Barral
Papicha de Mounia Meddour, produit par Patrick André, Xavier Gens et Grégoire Gensollen
Meilleur long-métrage d’animation
La Fameuse invasion des ours en Sicile de Lorenzo Mattotti, produit par Valérie Schermann et Christophe Jankovic
Les Hirondelles de Kaboul de Zabou Breitman et Eléa Gobbé-Mévellec, produit par Reginald De Guillebon
J’ai perdu mon corps de Jérémy Clapin, produit par Marc Du Pontavice
Meilleur espoir féminin
Luana Bajrami dans Portrait de la jeune fille en feu
Céleste Brunnquell dans Les Éblouis
Lyna Khoudri dans Papicha
Nina Meurisse dans Camille
Mama Sané dans Atlantique
Meilleur espoir masculin
Anthony Bajon dans Au nom de la terre
Benjamin Lesieur dans Hors normes
Alexis Manenti dans Les Misérables
Liam Pierron dans La Vie scolaire
Djebril Zonga dans Les Misérables
Meilleure photo
La Belle époque – Nicolas Bolduc
J’accuse – Pawel Edelman
Les Misérables – Julien Poupard
Portrait de la jeune fille en feu – Claire Mathon
Roubaix Une lumière – Irina Lubtchansky
Meilleur montage
La Belle époque – Anny Danché et Florent Vassault
Grâce à Dieu – Laure Gardette
Hors normes – Dorian Rigal-Ansous
J’accuse – Hervé De Luze
Les Misérables – Flora Volpelière
Meilleure musique originale
Atlantique – Fatima Al Qadiri
J’accuse – Alexandre Desplat
J’ai perdu mon corps – Dan Lévy
Les Misérables – Marco Casanova et Kim Chapiron pour le groupe Pink Noise
Roubaix Une lumière – Grégoire Hetzel
Meilleurs décors
La Belle époque – Stéphane Rozenbaum
Le Chant du loup – Benoît Barouh
Edmond – Franck Schwarz
J’accuse – Jean Rabasse
Portrait de la jeune fille en feu – Thomas Grézaud
Meilleurs costumes
La Belle époque – Emmanuelle Youchnovski
Edmond – Thierry Delettre
J’accuse – Pascaline Chavanne
Jeanne – Alexandra Charles
Portrait de la jeune fille en feu – Dorothée Guiraud
Meilleur son
La Belle époque – Rémi Daru, Séverin Favriau et Jean-Paul Hurier
Le Chant du loup – Nicolas Cantin, Thomas Desjonquères, Raphaël Mouterde, Olivier Goinard et Randy Thom
J’accuse – Lucien Balibar, Aymeric Devoldère, Cyril Holtz et Niels Barletta
Les Misérables – Arnaud Lavaleix, Jérôme Gonthier et Marco Casanova
Portrait de la jeune fille en feu – Julien Sicart, Valérie De Loof et Daniel Sobrino
Meilleur court-métrage
Beautiful Loser de Maxime Roy, produit par Alice Bloch
Le Chant d’Ahmed de Foued Mansour, produit par Rafael Andrea Soatto
Chien bleu de Fanny Liatard et Jérémy Trouilh, produit par Nérimen Hadrami
Nefta Football Club de Yves Piat, produit par Justin Pechberty et Damien Megherbi
Pile poil de Lauriane Escaffre et Yvonnick Muller, produit par Emmanuel Wahl et Adrien Bretet
Meilleur court-métrage d’animation
Ce magnifique gâteau ! de Emma De Swaef et Marc James Roels, produit par Jean-François Le Corre et Mathieu Courtois
Je sors acheter des cigarettes de Osman Cerfon, produit par Emmanuel-Alain Raynal et Pierre Baussaron
Make it soul de Jean-Charles Mbotti Malolo, produit par Amaury Ovise
La Nuit des sacs plastiques de Gabriel Harel, produit par Amaury Ovise
César du public
Au nom de la terre de Édouard Bergeon, produit par Christophe Rossignon et Philip Boëffard (1 971 386 entrées)
Hors normes de Eric Toledano et Olivier Nakache, produit par Nicolas Duval Adassovsky (2 095 810 entrées)
Les Misérables de Ladj Ly, produit par Toufik Ayadi et Christophe Barral (1 947 874 entrées)
Nous finirons ensemble de Guillaume Canet, produit par Alain Attal (2 799 189 entrées)
Qu’est-ce qu’on a encore fait au bon dieu ? de Philippe De Chauveron, produit par Romain Rojtman (6 783 450 entrées)