
L’acteur anglais Jeremy Irons sera le président du jury du 70ème Festival de Berlin, qui se déroulera du 20 février au 1er mars prochains dans la capitale allemande. C’est ce que le nouveau directeur artistique du festival Carlo Chatrian a annoncé jeudi dernier, le 9 janvier. Irons succède à sa partenaire à l’écran dans le sulfureux Fatale de Louis Malle, l’actrice française Juliette Binoche, dont le jury avait attribué l’Ours d’or en février dernier au film français Synonymes de Nadav Lapid.

C’est à peu près jusqu’au pénultième film de Louis Malle, sorti fin 1992, que la carrière de Jeremy Irons (* 1948) a été extraordinairement intéressante et exigeante. Au cours de ses dix premières années de présence au cinéma, depuis La Maîtresse du lieutenant français de Karel Reisz, l’acteur avait en effet multiplié les rencontres artistiques passionnantes, entre autres avec Jerzy Skolimowski (Travail au noir), Volker Schlöndorff (Un amour de Swann), Roland Joffé (Mission – Palme d’or au Festival de Cannes en 1986), David Cronenberg (Faux-semblants), Barbet Schroeder (Le Mystère von Bulow) et Steven Soderbergh (Kafka). Par la suite, la liste de ses collaborateurs n’était certes pas moins prestigieuse, puisqu’on y trouve des réalisateurs aussi célèbres que Bille August (La Maison aux esprits), John McTiernan (Une journée en enfer), Bernardo Bertolucci (Beauté volée), Wayne Wang (Chinese box) et Adrian Lyne (Lolita). Mais au plus tard depuis le début du siècle, ce sont avant tout des productions (très) commerciales qui rythment la filmographie de Jeremy Irons, comme Donjons & dragons de Courtney Solomon, Vengeance secrète de John Irvin, La Machine à explorer le temps de Simon Wells, And now ladies and gentlemen de Claude Lelouch, Callas forever de Franco Zeffirelli, Le Marchand de Venise de Michael Radford, Being Julia de Istvan Szabo, Kingdom of Heaven de Ridley Scott, Casanova de Lasse Hallström, Inland Empire de David Lynch – une rare exception à la règle, admettons-le – , Eragon de Stefen Fangmeier, La Panthère rose 2 de Harald Zwart, ainsi que plus récemment High-rise de Ben Wheatley, La Couleur de la victoire de Stephen Hopkins, Batman v Superman L’Aube de la justice et Justice League de Zack Snyder, Assassin’s Creed de Justin Kurzel et Red Sparrow de Francis Lawrence. Parmi ses rôles les plus récents à la télévision, on peut citer la série « Watchmen » qui a été diffusée l’automne dernier sur OCS.
Jeremy Irons n’est guère un habitué de la Berlinale à proprement parler, puisqu’il y a fait escale une première fois seulement en 2011, afin d’y présenter en compétition Margin Call de J.C. Chandor, suivie par une deuxième visite deux ans plus tard, lors de la projection hors compétition de Night Train to Lisbon de Bille August. Il avait par contre siégé au jury sous la présidence de Luc Besson au Festival de Cannes en l’an 2000, qui avait attribué sa Palme d’or à Dancer in the Dark de Lars von Trier. Côté prix, il en a obtenu l’essentiel en 1991 pour son rôle principal de Claus von Bulow dans Le Mystère von Bulow : l’Oscar, le Golden Globe, ainsi que les prix des critiques de Los Angeles et de la National Society of Film Critics. Les critiques de New York l’avaient déjà récompensé deux ans plus tôt pour Faux-semblants. Enfin, en France, il a obtenu un César d’honneur en 2002 des mains de Fanny Ardant (voir le lien ci-dessous).

Depuis qu’il dispose d’une compétition, le Festival de Berlin a fait preuve d’une sélection hautement anglophile dans le choix de ses présidents. Jeremy Irons est en effet le douzième sujet de sa majesté à occuper ce poste prestigieux, après entre autres les actrices Sylvia Syms, Charlotte Rampling et Tilda Swinton, le réalisateur Mike Leigh, le producteur Jeremy Thomas et son confrère et partenaire à l’écran dans Trahisons conjugales de David Hugh Jones Ben Kingsley. En comparaison, le Festival de Cannes avait adopté un état d’esprit Brexit avant l’heure, puisque seuls deux présidents britanniques figurent dans ses annales, l’acteur Dirk Bogarde en 1984 et le réalisateur Stephen Frears en 2007. Enfin, la Biennale de Venise se montre tout aussi réticente à l’égard des présidents de jury anglais, puisque elle en a choisi deux également : le réalisateur John Boorman en 2004 et le réalisateur Sam Mendes en 2016.