Critique : A second chance

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A second chance

Danemark, 2014
Titre original : En chance til
Réalisateur : Susanne Bier
Scénario : Anders Thomas Jensen et Susanne Bier
Acteurs : Nikolaj Coster-Waldau, Maria Bonnevie, Ulrich Thomsen
Distribution : KMBO
Durée : 1h42
Genre : Drame
Date de sortie : 13 janvier 2016

Note : 2,5/5

Quelle misère ! La réalisatrice Susanne Bier continue de faire de la misère, extrême et amère, son fond de commerce. Les revers tragiques du destin se multiplient ainsi dans son nouveau film, qui s’attaque une fois de plus à la destruction en règle du monde faussement préservé au Danemark. Le bonheur familial du personnage principal, initialement perçu comme un justicier humble et sans reproche, ne tarde pas à voler en éclats sous le rouleau compresseur de la narration selon Susanne Bier. La surenchère des revirements radicaux finit alors par lasser, aussi à cause du refus manifeste de la narration d’y introduire le moindre élément de désescalade. Au moins, l’interprétation de Nikolaj Coster-Waldau dans le rôle d’un père prêt à tout pour sauver son couple dispose de suffisamment de retenue pour rendre le conflit intérieur de son personnage fascinant, quoique pas forcément crédible.

Synopsis : Le jeune inspecteur Andreas vient d’avoir un fils, Alexander, avec sa femme Anna. Les premiers mois des nouveaux parents s’avèrent exceptionnellement éprouvants parce que leur bébé peine à trouver le sommeil. Lors d’une intervention avec son collègue et ami Simon, Andreas recroise le chemin de Tristan, un toxicomane violent qu’il avait déjà mis derrière les barreaux. Il habite désormais avec Sanne et leur bébé Sofus dans des circonstances épouvantables. Quand Alexander meurt subitement en pleine nuit, Andreas prend une décision lourde de conséquences.

Le masochisme à l’état pur

Nous cultivons des réserves jamais démenties à l’égard des films de Susanne Bier non pas parce qu’ils manqueraient d’ambition, mais au contraire en raison de leur incapacité plus ou moins flagrante de rendre les excès dramatiques de leur intrigue saisissants d’un point de vue cinématographique. Dans A second chance, la réalisatrice semble vouloir nous emmener dans la reconstitution d’un puzzle, dont des pièces disparates sont montrées pendant le générique. La caméra toujours aussi fébrile nous conduit dans le monde coupé en deux du héros, avec d’un côté son travail et ses fréquentations peu recommandables, et de l’autre une vie privée qui s’apparente à une publicité outrancièrement idéalisée, tant il ne manque presque rien pour parfaire le bonheur de Andreas au sein de son cocon familial. Bien sûr, l’image d’Epinal du couple épanoui montre rapidement ses premières fissures. Mais au lieu d’intensifier sa force d’expression pour accompagner comme il se doit cette dégringolade grandiloquente, la mise en scène persévère dans son style approximatif. Même l’option du mélodrame excessif ne paraît pas séduire Susanne Bier, puisque elle lui préfère visiblement le genre de réalisme misérabiliste et terne qui avait déjà rendu la plupart de ses films précédents si éprouvants.

Un héros en difficulté

Dans ce marasme des coups de théâtre abusifs, le jeu de Nikolaj Coster-Waldau dénote agréablement. Le retour au cinéma de son pays d’origine réussit à l’acteur principalement connu pour ses films et séries américains, grâce à sa volonté de confronter son image de bellâtre fort et courageux aux exigences plus rugueuses d’un scénario qui ne lui fait pourtant aucune faveur. Son personnage se trouve ainsi sans cesse face à des choix impossibles, descendant pas à pas vers une impasse sociale, morale et psychologique. Rester crédible dans de telles circonstances, avec de surcroît une narration fétichiste d’un vocabulaire visuel artificiellement contemplatif, cela relève presque du grand art dramatique. En tout cas, Nikolaj Coster-Waldau s’acquitte admirablement de sa tâche, laissant en fait la seule et unique impression positive de ce film qui tente beaucoup, mais qui ne réussit hélas pas grand-chose. A ses côtés, l’autre figure de proue du cinéma danois Ulrich Thomsen fait plutôt pâle figure. La faute à l’élaboration poussive de son personnage, qui fait le chemin existentiel de son coéquipier en sens inverse, selon la philosophie toujours trop lourde de sens du cinéma de Susanne Bier.

Conclusion

Le nouveau film de Susanne Bier nous inspire au mieux des sentiments mitigés. Alors que nous sommes toujours aussi réticents à sa façon de filmer, nerveuse et prétentieuse, nous devons toutefois lui reconnaître une certaine habilité dans la direction d’acteurs. Le jeu relativement subtil de Nikolaj Coster-Waldau dans un rôle pour le moins difficile, voire ingrat, sauve ainsi tant soit peu un film pas avare en exagérations tragiques.

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