Astérix – Le Domaine des Dieux
France, 2014
Titre original : –
Réalisateur : Alexandre Astier, Louis Clichy
Scénario : Alexandre Astier, Jean-Rémi François, Philip LaZebnik, d’après l’oeuvre de Albert Uderzo et René Goscinny
Acteurs : Roger Carel, Guillaume Briat, Lorànt Deutsch
Distribution : SND
Durée : 1h25
Genre : Animation
Date de sortie : 26 novembre 2014
Note : 4/5
Après les déceptions des deux dernières adaptations live des aventures d’Astérix (… aux Jeux olympiques de Frédéric Forestier et Thomas Langmann, Au service de Sa Majesté de Laurent Tirard), il était peut-être bienvenu de refaire une adaptation animée des héros créés par René Goscinny et Albert Uderzo. Alexandre Astier, le créateur a pris en charge cette relecture originale mais respectueuse de l’oeuvre d’origine.
Synopsis : En Armorique, une poignée d’irréductibles gaulois doit affronter un nouveau plan diabolique de l’infâme Jules César qui veut construire une résidence de luxe sobrement nommée Le Domaine des Dieux pour ses élites en rasant la forêt qui entoure leur village. Astérix, Obélix, Idéfix, Panoramix et leurs amis ne vont pas leur faciliter la tâche, avec ou sans potion magique…
Une adaptation réussie
Vingt ans après les dernières aventures animées des héros créés par Goscinny et Uderzo (le décevant Astérix et les Indiens), Alexandre Astier, le créateur de la série Kaamelott, signe l’une des adaptations les plus réussies de la célèbre bande dessinée, réalisée avec l’animateur Louis Clichy. Le texte et l’esprit iconoclaste d’origine sont respectés mais ils ne se laisse pas pour autant enfermer par les scènes attendues (le rapport d’Obélix à son obésité, le chanteur que l’on empêche de chanter, les romains expédiés à coups de poings dans le ciel, la chasse aux sangliers…) mais les revisite en amoureux sincère de ce classique sans pour autant effacer sa personnalité. Il mêle astucieusement humour et parfois gravité, comme il l’avait fait dans sa réinvention de l’histoire des Chevaliers de la Table Ronde pour M6 comme lorsque les gaulois se laissent corrompre moralement par l’argent qui soudain coule à flot, ce qui désarçonne les aspirations du noble Astérix.
Il n’est pas toujours aisé de distinguer ce qui vient du texte d’origine des modifications contemporaines (même si certaines sont évidentes comme Travaillerpluspourgagnerplus) et l’on retrouve l’appétence d’Astier pour les discussions alambiquées qui s’éternisent pour rien, comme dans ses aventures du roi Arthur avec des personnages qui ne s’écoutent pas ou ne se comprennent pas les uns les autres. Si le Mission Cléopâtre réalisé par Alain Chabat (présent ici dans la distribution en sénateur douteux) avait été un succès critique et publique, son univers humoristique écrasait celui de Goscinny & Uderzo, Astérix et Obélix devenant des seconds rôles oubliables. Alexandre Astier impose lui son style sans écraser celui des créateurs de la série. Et surtout il fait ce que peu d’autres ont fait avant lui dans ces adaptations en dessins animés : de la mise en scène. Il dirige ses personnages pourtant créés par ordinateur comme s’ils étaient de chair et de sang, les légionnaires étant particulièrement réussis dans leur caractérisation, et s’autorise de vrais plans de cinéma, ainsi que quelques citations visuelles, la poursuite d’un sanglier par Astérix et Obélix rappelant une séquence du Retour du Jedi sur la planète des Ewoks.
Le rythme est sur les chapeaux de roue et l’animation est de qualité malgré un graphisme numérique qui détonne avec le style à l’ancienne des précédentes productions. Le montage est fluide mais il faut un peu de temps aux nostalgiques pour s’adapter à cette évolution visuelle. Heureusement le scénario évite l’énergie factice et prend le temps de laisser exister ses personnages et de faire vivre les joyeuses péripéties de la troupe d’Astérix & co, avec des seconds rôles qui ont de la consistance, avec un faible pour l’esclave mielleux et content de l’être interprété avec un certain génie comique par Laurent Lafitte particulièrement hilarant.
Le retour de Roger Carel
La relation entre le petit blond et le grand gros de notre enfance est d’autant plus touchante que ce huitième Astérix animé est toujours doublé par Roger Carel qui signe son grand, mais hélas dernier, retour. À 86 ans, ce pionnier du doublage a annoncé interpréter la voix du héros fétiche pour la dernière fois. Titulaire de sa voix depuis Astérix le Gaulois en 1967, il mériterait à ce titre de recevoir un bien mérité César d’honneur. Il lui prête sa voix de râleur qui grommelle et ses emportements restent mémorables, mais toujours avec une pointe de drôlerie.
Pour succéder au regretté débonnaire Pierre Tornade disparu en 2012 qui avait repris le rôle d’Obélix en 1985 avec Astérix et la Surprise de César, Astier n’a pas engagé une star de cinéma mais a choisi l’un de ses fidèles, le roi Burgonde dans Kaamelot. Guillaume Briat est comme une évidence à ce poste. D’autres acteurs de la série sont présents aux côtés de Lorànt Deutsch en architecte agressif, Philippe Morier-Genoud dans celui de César, Alain Chabat en sénateur, Élie Semoun en légionnaire hystérique (l’une de ses meilleures prestations comiques car maîtrisée par le cadre rigoureux du scénario), Géraldine Nakache et le regretté Artus de Penguern les premiers Romains désignés pour aller vivre au Domaine des Dieux.
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Résumé
En adaptant le 17e album des aventures d’Astérix, Alexandre Astier semble avoir trouvé la potion magique pour revisiter cette franchise qui ne surprenait plus depuis longtemps. L’énergie burlesque enlevée rappelle dans ses meilleures séquences les cartoons délirants de Tex Avery et l’on pense (enfin) un bon moment au cinéma au compagnie de nos bons vieux gaulois.