Le Rôle de ma vie
Etats-Unis,2014
Titre original : Wish I Was Here
Réalisateur : Zach Braff
Scénario : Adam Braff, Zach Braff
Acteurs : Zach Braff, Kate Hudson, Mandy Patinkin
Distribution : Wild Bunch Distribution
Durée : 1h47
Genre : Comédie dramatique
Date de sortie : 13 août 2014
Note : 3/5
Synopsis : Aidan Bloom, 35 ans, a toujours rêvé d’être acteur mais sa carrière est au point mort (rien depuis une publicité pour un shampoing antipelliculaire quelques mois plus tôt) malgré le soutien sans failles de sa femme Sarah qui fait bouillir la marmite avec un emploi de bureau peu valorisant. Le père d’Aidan lui annonce soudain que son cancer dont il espérait être guéri est désormais à un stade avancé. Il doit placer ses économies dans un traitement expérimental coûteux et ne peut plus payer les frais de scolarité des deux enfants d’Aidan, Grace et Tucker. Son frère qui vit en ermite dans une caravane au bord de la mer ne veut pas revoir ce père dont il ne supporte plus les reproches incessants.
Dix ans après Garden State, le comédien Zach Braff signe sa deuxième réalisation où les membres d’une même famille cherchent à trouver le sens de leur vie..
Dur dur d’être un acteur
Zach Braff avec son frère Adam a écrit le scénario de cette chronique familiale personnelle à défaut d’être autobiographique où ils évoquent la difficulté de vivre une vie d’artiste, le rapport à la religion juive, le sens des responsabilités et ce que l’on peut transmettre à ses enfants. Les plus jolis moments de cette plaisante comédie dramatique sont ces instants volés par Aidan joué par Zach Braff lui-même avec ses enfants, les attachants Joey King et Pierce Gagnon, lors d’une balade buissonnière sur les routes. Elle est une petite juive orthodoxe avec une affiche de E.T. en hébreux, son frère se promène partout avec une perceuse ! Contraint de les retirer de leur école hébraïque privée faute de moyens, il tente de leur donner des cours à la maison mais n’est pas très doué et les emmène dans un voyage qui va former leur jeunesse, une odyssée pour resserrer des liens un peu trop distendus avec ses enfants qu’il veut mieux connaître, avec de belles scènes dans le désert californien.
Aidan peine à vivre son rêve de comédien, au désespoir de son père qui voudrait le voir dans une situation professionnelle plus stable. Zach Braff évoque la difficulté du métier d’acteur, les auditions humiliantes et les concessions à accepter dans sa vie de bohème. Il croise à cette occasion dans deux courtes scènes Jim Parsons, déjà présent dans Garden State et devenu depuis une vedette de télévision lui aussi grâce à The Big Bang Theory mais aussi le temps d’une audition pour un Othello le comédien James Avery qui fut l’oncle de Will Smith dans Le Prince de Bel-Air et disparu lui au début de cette année.
S’il a eu plus de chance que son personnage, sa carrière a elle aussi souffert entre hauts très hauts et bas très bas. Ainsi, malgré le succès de Garden State avec Natalie Portman, son premier long-métrage en tant que réalisateur en 2004, Zach Braff, reconnu comme acteur grâce à la série comique médicale Scrubs, n’a trouvé le financement que grâce à la générosité de ses nombreux fans via le site kickstarter, trouvant plus de deux millions de dollars indispensables pour tourner le projet dont il rêvait. Les acteurs portent pour la plupart leurs propres vêtements pour éviter les dépenses inutiles !
Un père maladroit
Mandy Patinkin (les séries Chicago Hope, Esprits criminels, Homeland) évite la caricature dans son portrait de patriarche intraitable et parvient à faire comprendre ses angoisses pour ses enfants qui ne mènent pas la vie dont il avait rêvé pour eux. Il ne cherche pas à minimiser sa rudesse mais compose ainsi un portrait de père rare au cinéma, pas vraiment aimable tout en restant humain, notamment dans son aveu de rêve déçu de partager sa carrière professionnelle d’universitaire aux côtés de son autre fils, devenu un ermite asocial qui vit dans une caravane au bord de la mer. Saul Bloom transmet son trône de patriarche à sa belle-fille jouée avec justesse par Kate Hudson qui s’évade enfin des comédies romantiques sans intérêt dans lesquelles elle s’est longtemps égarée avec ce rôle de mère et d’épouse courage, l’un des plus beaux dans sa carrière qui avait bien besoin de cette révolution qui tranche avec une longue série de films dénués de la moindre ambition artistique. Son personnage est d’ailleurs subtil, admettant dans une jolie scène à deux avec son mari qu’elle n’a pas de rêve professionnel, sans en être trop meurtrie, admettant surtout être lassée des conditions déplaisantes dans lesquelles elle exerce son métier peu valorisant.
Ce road-movie entre rires et larmes aurait gagné à être plus resserré et à évacuer quelques intrigues secondaires comme la visite du frère à un salon de bandes dessinées ou le harcèlement dont est victime l’épouse d’Aidan par un collègue de bureau pour se concentrer sur sa difficile quête du bonheur et sa tentative de réunir ses proches dans l’adversité.
Résumé
Malgré quelques maladresses de style et un message un peu moralisateur avec cette idée que le protagoniste principal doit enfin comprendre que le rôle de sa vie c’est celui de père, de fils, de frère et de mari, cette comédie dramatique souligne la sensibilité d’auteur de Zach Braff déjà aperçue dans Garden State. Il possède une jolie capacité à mêler le drame et la comédie dans un équilibre juste, même si cette deuxième réalisation n’est pas aussi marquante et si sa bande-son ne devrait pas susciter le même enthousiasme que la précédente, l’une des compilations de musique de films les plus pertinentes du cinéma contemporain. En espérant néanmoins que sa prochaine réalisation nous parvienne dans moins de dix ans…