Cannes 2014 : Adieu au langage

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adieu au langage affAdieu au langage

France : 2014
Titre original : Adieu au langage
Réalisateur : Jean-Luc Godard
Scénario : Jean-Luc Godard
Acteurs : le chien Roxy Godard, Héloïse Godet, Zoe Bruneau
Distribution : Wild Bunch
Durée : 1h10
Genre : Expérimental
Date de sortie : 21 mai 2014

Note : 4/5

Qu’est-ce que la 3D ? Avec ce film iconoclaste où il renonce une nouvelle fois à toute forme de narration classique, Jean-Luc Godar3d dynamite cette nouvelle technologie en la maltraitant avec un plaisir d’enfant déluré, avec toujours le même goût pour l’aphorisme, les citations littéraires et cinématographiques et les calembours les plus éhontés.

Synopsis : Le propos est simple. Une femme mariée et un homme libre se rencontrent. Ils s’aiment, se disputent, les coups pleuvent. Un chien erre entre ville et campagne. Les saisons passent. L’homme et la femme se retrouvent. Le chien se trouve entre eux. L’autre est dans l’un. L’un est dans l’autre. Et ce sont les trois personnes. L’ancien mari fait tout exploser. Un deuxième film commence. Le même que le premier. Et pourtant pas. De l’espèce humaine on passe à la métaphore. Ça finira par des aboiements. Et des cris de bébé.

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Bouleverser la 3D

Le synopsis officiel, signé Jean-Luc Godar3d himself est un peu un trompe-l’oeil. Adieu au langage raconte-t-il vraiment cette histoire résumée en quelques phrases par le dernier grand nom de la Nouvelle Vague encore en activité et doyen de la compétition ? Jean-Luc Godar3d est de plus en plus insaisissable, entre éloge (moqueur) de lui-même, art de la poésie en lettres majuscules et propos philosophiques obscurs (avec une bonne dose d’aimable scatologie) ou jeux de mots délicieusement consternants. Ah dieux oh langage !

Après le galop d’essai que fut son segment pour le film 3X3D (signé avec le portugais Edgar Pêra et l’anglais Peter Greenaway), il nous propose un film révolutionnaire dans l’utilisation du relief. Alors qu’il possède sans le moindre doute une grande maîtrise de cet outil, il feint l’amateurisme en le bousculant avec un bonheur non feint. Il en utilise les multiples richesses formelles comme personne d’autre ne l’avait fait avant lui. Il ne s’agit pas de prétendre qu’il s’agit ici de la meilleure utilisation de la 3D mais certainement d’un usage unique, sans égal.

L’arlésien suisse, une nouvelle fois absent en chair et en os de Cannes, casse son jouet, le détruit, le secoue comme un bébé pourrait secouer son hochet sans crainte des conséquences. Avec ce nouveau stylo pour sa caméra, il invente des plans inédits, dont deux séquences qui perturbent notre vision par un effet que l’on pourrait qualifier de split-screen en 3D dans une confusion de corps nus entremêlés.

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La caméra pinceau

Jean-Luc Godard utilise les lignes verticales pour mettre à mal la 3D, en souligner la possible laideur. Son rapport est trouble avec la 3D. Son sketch de 3X3D s’intitulait Les 3 Désastres et ici il lâche un ‘ 3D malheur historique ‘. En manipulateur éclairé, ce maître de l’image nous rappelle qu’il est autant à l’aise avec les technologies modernes que ne le fut son aîné Chris Marker, qui en était un autre grand détourneur. Il s’amuse à couper du cadre des têtes d’intervenants, joue avec les reflets, les flous, dénature le premier et l’arrière-plan, joue avec les palettes chromatiques surchargées et explosées (une forêt blanche avec quelques touches de couleur, comme du pointillisme adapté au numérique ou des feuilles de toutes les couleurs). Ses plus beaux plans, à l’image de ceux de Mike Leigh dans un autre film de la compétition du Festival de Cannes 2014, Mr Turner, sont dignes de tableaux mais qu’il s’ingénie à rendre presque laids. Sous un faux-semblant d’opposition totale à l’art pictural, Jean-Luc Godar3d signe l’un des longs-métrages les plus riches visuellement de la compétition 2014, dont on retiendra encore une séquence en voiture démente, un bonheur pour ceux qui recherchent l’inédit en rentrant dans une salle de cinéma.

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De l’absence de Godard à Cannes

Ceci n’est plus un film bien que ce soit mon meilleur… une simple valse, mon cher président, avec quoi je vous souhaite d’y trouver le vrai faux raccord avec votre prochaine destinée ‘ énonce notamment Jean-Luc Godard dans sa vidéo d’excuses pour justifier sa non-venue à Cannes, à voir sur le site du Festival.

 

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Résumé

Jamais pris à défaut de vouloir tenter quelque chose de différent, l’on devra à Jean-Luc Godard cette année l’une des plus belles réactions de salles (avec It follows à la Semaine de la Critique) grâce à son nouvel opus avant-gardiste et surtout d’un humour étonnant. Le père du faux raccord comme grand art n’arrêtera jamais de chercher et c’est assez passionnant. Jean-Luc Godard viole la 3D mais ce n’est pas si grave : il lui a fait un très bel enfant.

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