Critique : Wajma, une fiancée afghane

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Wajma afficheWajma, une fiancée afghane

Afghanistan, france : 2013
Titre original : Wajma, An afghan Love Story
Réalisateur : Barmak Akram
Scénario : Barmak Akram
Acteurs : Wajma Bahar, Mustafa Abdulsatar, Haji Gul Aser, Breshna Bahar
Distribution : ASC Distribution
Durée : 1 h 26
Genre : Drame
Date de sortie : 27 novembre 2013

Globale : [rating:3.5][five-star-rating]

5 ans après L’enfant de Kaboul, un premier long métrage très prometteur, le réalisateur afghan Barmak Akram nous revient avec Wajma, une fiancée afghane, un film sur une famille afghane de la classe moyenne, installée dans une situation délicate, entre modernité et respect d’une tradition étouffante. Arrivé en France comme réfugié politique en 1981, à l’âge de 15 ans, Barmak Akram a tenu coûte que coûte à ce que son film soit 100% afghan ce qui l’a conduit, finalement, à tout financer lui-même. Ce film a obtenu le prix du meilleur scénario international au Festival de Sundance avant d’être présenté à Cannes 2013 dans la sélection ACID. Il sera le représentant de l’Afghanistan pour les Oscars 2014.

Synopsis : Wajma, adolescente afghane, vit librement à Kaboul et se prépare à des études supérieures lorsqu’elle tombe sous le charme de Mustafa, jeune serveur qui semble très amoureux d’elle. Ils sont espiègles et passionnés, mais aussi prudents face aux règles de la société qu’ils enfreignent. Mais un jour, une nouvelle remet en cause leur relation et provoque le retour du père de Wajma…

wajma 1

Une jeune fille afghane

Wajma est une jeune fille afghane bien dans sa peau, une jeune fille qui fait des études et qui vit dans une famille aimante et, apparemment, assez moderne. Le père est le plus souvent absent : il travaille comme démineur dans le sud du pays. En son absence, c’est la mère qui tient les rênes du foyer, avec amour, avec douceur. Wajma a un frère dont les seuls sujets d’intérêt sont les pigeons et les combats de chien ; elle a aussi une grand-mère, particulièrement peu loquace. Quand Wajma tombe amoureuse de Mustafa, un jeune serveur un peu plus âgé qu’elle, l’histoire d’amour n’a presque rien de particulier. Certes, on est en Afghanistan et certaines précautions sont indispensables : éviter tout contact physique lorsque les deux amoureux sont dans la rue, tout faire pour ne pas être vue lorsque Wajma rend visite à Mustafa. Sinon, le téléphone leur donne les moyens de se contacter facilement, ils sont jeunes, ils s’aiment, ils sont insouciants. Toutefois, lorsque Wajma se retrouve enceinte, on comprend vite que cette insouciance, vu le contexte, est allée trop loin. D’autant plus que Mustafa refuse d’épouser Wajma, prétextant qu’elle n’a pas saigné lors de leur rapport, qu’elle n’était donc pas vierge et qu’il n’est probablement pas le père. Retour précipité du père, qui monte dans les tours et parle de tuer et sa fille et Mustafa ; retour de la tradition dans une famille qu’on avait cru moderne, retour de la prédominance de l’homme sur la femme, retour de la vertu ancestrale chez Wajma qui considère qu’avorter serait un crime.

Wajma 2

Un pays entre tradition et modernité

Dès le début du film, l’Afghanistan que nous montre Barmak Akram nous apparaît très différent de ce à quoi on s’attendait : Wajma est une jeune fille et elle fait des études, elle s’habille en jean, elle est libre dans ses déplacements en ville. Kaboul apparaît comme une grande ville quasiment « normale »et les quelques touches rappelant la guerre qu’a connue ce pays et la prégnance de l’islam sont presque subliminales. Cela a pour effet, bien entendu, de donner encore plus de force au tremblement de terre qui va secouer la famille de Wajma lorsque celle-ci va se retrouver enceinte. Par ailleurs, l’éloignement presque permanent du père lui permet d’accabler son épouse et son fils de reproches : la première a été trop permissive en son absence, le second n’a pas rempli le rôle dont il l’avait chargé, veiller sur sa sœur. La honte s’est abattue sur la famille, le père se doit de faire quelque chose, sa foi et la tradition, dont il est manifestement prisonnier, lui ordonnent, tout au moins dans un premier temps, d’afficher un comportement très dur envers sa fille. Et puis, petit à petit, on comprend que se livre chez cet homme, non dénué d’humanité, un dur combat intérieur entre deux sentiments paternels contradictoires, celui qui lui vient du cœur et celui que lui dictent des siècles d’obscurantisme religieux. Chez la mère, le sentiment qui vient du cœur est forcément vainqueur et le film est, à ce titre, un vibrant hommage à la femme afghane, elle qui subit les violences masculines, elle qui se doit d’arriver vierge au mariage alors que rien n’est exigé de la sorte de la part de l’homme, elle qui sera dans son pays, espérons le, l’avenir de l’homme.

Wajma Bahar (Wajma)

Les atouts d’une équipe très réduite

Réalisateur de documentaires, de clips et de films de fiction, parolier de chansons, plasticien, compositeur de musique, Barmak Akram a presque tout fait dans Wajma, une fiancée afghane : écriture du scénario, mise en scène, photographie, production du film, participation au montage ainsi qu’à l’écriture de la musique du film. L’équipe de tournage n’était constituée que de 5 personnes et tous les participants faisaient plusieurs choses. C’est ainsi que Mustafa Abdulsatar s’occupait du maquillage en plus d’interpréter le rôle de Mustafa. Cette équipe très réduite a favorisé les liens entre les comédiens, tous non professionnels ou peu expérimentés, et leur a permis d’exprimer plus librement toute les facettes de leurs personnages. Wajma Bahar campe une Wajma mélange d’affirmation et de fragilité. Dans le rôle de son père, on retrouve Haji Gul Azer qui jouait le rôle principal dans , L’enfant de Kaboul, le film précédent de Barmak Akram.

Résumé

Face à Wajma, il faut commencer par éviter un premier écueil : le confondre avec Wadjda, le film saoudien sorti au début de cette année, et croire qu’on l’a déjà vu ! Ce serait une erreur car Wajma, une fiancée afghane nous apporte beaucoup d’éléments sur l’Afghanistan, un pays dont on a beaucoup parlé mais qu’on connaît peu. Un pays qui, d’après ce film, apparaît sur le fil du rasoir, prêt à se rapprocher de la modernité mais loin d’être totalement débarrassé de ses traditions étouffantes.

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