Vous n’avez encore rien vu – la critique pour
France : 2011
Titre original : –
Réalisateur : Alain Resnais
Scénario : Laurent Herbiet, Alain Resnais
Acteurs : Mathieu Amalric, Pierre Arditi, Sabine Azéma, Anny Duperey, Hippolyte Girardot, Denis Podalydès, Michel Piccoli
Distribution : StudioCanal
Durée : 1h55
Genre : Drame
Date de sortie : 26 septembre 2012
Globale : [rating:4][five-star-rating]
Et si le cinéma était une véritable cure de jouvence ! En tout cas pour les réalisateurs : cette semaine, sortent sur nos écrans Gebo et l’ombre, le nouveau film de Manuel de Oliveira, bientôt 104 ans, et Vous n’avez encore rien vu d’Alain Resnais, « seulement » 90 ans. Un film qui, en plus, s’avère très facétieux et d’une grande inventivité, un film qui, disons le, respire la vraie jeunesse, celle de l’esprit.
Synopsis:
Antoine d’Anthac, célèbre auteur dramatique, convoque par-delà sa mort, tous les amis qui ont interprété sa pièce « Eurydice ». Ces comédiens ont pour mission de visionner une captation de cette œuvre par une jeune troupe, la compagnie de la Colombe. L’amour, la vie, la mort, l’amour après la mort ont-ils encore leur place sur une scène de théâtre ? C’est à eux d’en décider. Ils ne sont pas au bout de leurs surprises…
Un début en fanfare
Il est certain que tout le monde ne ressentira pas Vous n’avez encore rien vu de la même façon, mais il est probable que, pour beaucoup, trois sentiments se succéderont au cours des 115 minutes que dure le film. Pour commencer, le sentiment de partir sur les bases d’un chef d’œuvre. En effet, pour le générique de début, Alain Resnais reprend de façon magistrale un procédé déjà utilisé par Sacha Guitry dans La vie d’un honnête homme, le coup de téléphone aux acteurs qui vont se succéder à l’écran. Un appel avec leurs vrais noms d’acteur. Dans le film de Resnais, c’est au majordome d’Antoine d’Anthac, un auteur de théâtre, qu’incombe cette tâche : il doit annoncer à ces comédiens qu’Antoine d’Anthac, leur ami, vient de mourir et, qu’avant de décéder, il a demandé à ce qu’ils viennent tous dans sa maison de Peillon, pour une raison bien précise qu’ils ne découvriront que sur place. Cette séquence, ainsi que l’arrivée des comédiens dans la maison de Peillon et leur accueil par le majordome, respirent le cinéma tel qu’on l’aime, le cinéma qui fait vibrer, le cinéma qui caresse les neurones dans le sens du poil.
Mais pourquoi sont-ils là?
Une fois ce petit monde installé, le majordome va pouvoir dévoiler la raison de ce rendez-vous : avant de mourir accidentellement, donc bêtement, à cause d’un fusil chargé, l’auteur avait enregistré une représentation de sa pièce Eurydice par la Compagnie de la Colombe, une troupe de jeunes comédiens, et il hésitait à décider s’il devait, ou pas, accorder à cette troupe les droits de s’approprier la pièce. Or, tous les comédiens convoqués avaient été dans le passé les interprètes de cette pièce, montée plusieurs fois par Antoine d’Anthac lui-même, d’où la décision de leur demander leur avis. Commence donc alors, devant ce cénacle, la représentation filmée et, douche froide, pendant 20 minutes, on est en droit de penser que les choses se gâtent : on voit et on entend les répliques de la vidéo, interprétées par les jeunes comédiens de la Compagnie de la Colombe, et ces répliques sont systématiquement reprises une ou deux fois par les spectateurs, les comédiens du passé. Franchement, au début, c’est très dur ! Et puis, petit à petit, on s’y fait, les reprises deviennent de moins en moins systématiques, on se concentre davantage sur les « vieux » comédiens, la magie d’Alain Resnais s’impose à nouveau.
Théâtre filmé et cinéma
On sait depuis longtemps qu’Alain Resnais aime le théâtre : nombre de ses films sont des adaptations de pièces de théâtre et parler à son sujet de théâtre filmé n’a jamais été pour lui une injure. Avec Resnais, on comprend très vite qu’il peut y avoir énormément de qualités cinématographiques dans ce genre trop souvent méprisé. Grâce à lui, des auteurs comme Henry Bernstein ou Alan Ayckbourn ont été (re)mis en valeur. Cette fois ci, c’est Jean Anouilh qui est à l’honneur puisque la représentation théâtrale qu’on voit et qu’on entend et qui est attribuée à Antoine d’Anthac, est en fait une adaptation de deux pièces du dramaturge français, Eurydice et Cher Antoine ou l’amour raté. Quel plaisir de retrouver des comédiens d’âge mûr, voire plus, se mettre dans la peau de jeunes jouvenceaux et jouvencelles ! Bien entendu, on y remarque plus particulièrement les deux couples interprétant les rôles d’Orphée et d’Eurydice : d’un côté, Pierre Arditi et Sabine Azéma, de l’autre Lambert Wilson et Anne Consigny. En plus du plaisir, il y a un côté didactique à suivre le jeu de ces grands acteurs : on perçoit facilement, en quelques secondes, comment un seul et même rôle peut être sculpté différemment selon le comédien qui l’interprète. Ici, la comparaison est particulièrement intéressante concernant l’interprétation du rôle d’Eurydice, entre Sabine Azéma, plus vive, et Anne Consigny, plus sensible. En plus de ce quatuor, Alain Resnais a fait appel à une bonne partie du gratin du cinéma français, mélangeant habitués de son cinéma et « petits nouveaux » : Mathieu Amalric (peut-être son meilleur rôle!), Anny Duperey, Hippolyte Girardot, Michel Piccoli, Michel Robin, Michel Vuillermoz, Denis Podalydès, etc. C’est d’ailleurs à Denis Podalydès qu’il a demandé de mettre en scène et de capter la représentation de la compagnie de la Colombe.
Résumé
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