Parlez-moi de vous
France : 2012
Titre original : Parlez-moi de vous
Réalisateur : Pierre Pinaud
Scénario : Véronique Heuchenne
Acteurs : Karin Viard, Nicolas Duvauchelle, Nadia Barentin
Distribution : Diaphana Distribution
Durée : 1h29
Genre : Comédie dramatique
Date de sortie : 11 janvier 2012
Globale : [rating:4.5][five-star-rating]
Karin Viard fait parti de ces actrices dont on connaît forcément le visage sans pour autant connaître le nom. Pourtant en quelques années elle est devenue une comédienne française incontournable, s’associant à Klapisch, Thompson, Gavras ou encore Ozon. On l’a vue dans pas moins de quatre films l’année dernière allant du très bon (Polisse) au très moyen (Rien à déclarer). À peine 2012 vient de démarrer qu’on la retrouve à l’affiche du premier long métrage de Pierre Pinaud, jeune réalisateur déjà primé six fois pour le court Les Miettes, notamment aux prestigieux (ou pas) César. Pour son premier film il s’intéresse au thème de l’asociabilité lié à l’abandon. Alors, paris réussi?
Synopsis : À 40 ans, Mélina est la voix la plus célèbre de France. Animatrice à la radio, la nuit à l’antenne elle résout les problèmes affectifs et sexuels des auditeurs avec impertinence, humour et sans tabou. Tout le monde connaît sa voix, mais personne ne connaît son visage. Dans la vie, elle évite tout contact et vit comme une vieille fille dans les beaux quartiers. Partie à la recherche d’une mère qu’elle n’a jamais connue, elle découvre que celle-ci vit au sein d’une famille nombreuse, en banlieue. Elle décide de s’approcher d’elle, incognito…
Une comédie dramatique
Ne laissons pas planer le suspens: oui ce premier film est réussi et d’ailleurs bien au-delà de nos espérances tant on ressort de la salle impressionné et ému. Mais commençons par le commencement…
Professionnellement, Mélina a tout pour elle: présentatrice vedette de sa radio, elle prodigue à ses auditeurs tous les soirs ses conseils de vie, elle est chaleureuse, humaine, sûre d’elle. Dans la vie c’est plus compliqué pour Claire, son alter-ego. Froide et distante, elle vie recluse dans son appartement du 16e où elle n’a pour seule compagnie que son chien, et dort dans un placard. Il est évidemment ironique de penser que cette femme qui vit à côté de sa vie y connaît quelque chose dans les conseils qu’elle donne. Pourtant cela lui fait du bien d’écouter les autres, et le « parlez-moi de vous » est un exutoire pour éviter de parler d’elle, et vivre quelque part par procuration.
Le ton est bon enfant, les situations d’inconfort dans lesquels Claire se met donnant lieu à quelques scènes comiques où on rit de bon cœur. On devine que derrière cette femme névrosée se cache une blessure: le fait d’avoir été abandonnée à la naissance. Et là le film prend un virage inattendu. Le ton reste léger tout en apportant une certaine gravité au propos. Elle va essayer de se rapprocher de cette femme qui est sa mère, apprendre à la connaître, savoir qu’elle l’aime tout simplement. Il y a une vraie pudeur dans la façon de raconter cette histoire mais également une vraie force. Un portrait de femme comme on aimerait en voir plus souvent: avec des cassures, dans tout sa perfectible imperfection. On se moque gentiment d’elle dans ses tocs, dans ses inaptitudes en société. Pourtant on ressent tout son malaise et on à peine pour elle. On comprend cette femme car elle est humaine malgré tout.
Saluons également le reste du casting, excellent: Nicolas Duvauchelle en amoureux transit, et la regrettée Nadia Barentin.
Un réalisateur de talent
Pour un premier film, Pierre Pinaud nous laisse coi. Faisant preuve d’une grande maturité dans sa façon de donner vie à cette histoire, il épate par la sobriété et la finesse de sa mise en scène. Si Karin Viard illumine incontestablement cette histoire, derrière la caméra cet homme n’est pas en reste. Il démontre une vraie maîtrise du gros plan, notamment dans l’une des dernières scènes du film, à la radio, où son actrice nous fait passer du rire aux larmes avec une telle force dans le visage et une puissance dans le regard. Le scène est magnifique et très simplement constitué d’un gros plan sur elle. Seul le subtil travelling vient nous rappeler toute la magie du cinéma.
Pour être néanmoins un peu tatillon, la fin ne plaira pas à tout le monde. Le réalisateur choisit l’ellipse, et le spectateur pourra librement interpréter comme il le voudra. C’est un choix discutable mais après tout c’est à lui de voir. Le métrage qu’il signe a suffisamment de maîtrise pour qu’on lui pardonne ce type d’appréciation subjective.
Résumé
[youtube]http://www.youtube.com/watch?v=MG9q_KES13g[/youtube]