La Couleur des sentiments
USA : 2011
Titre original : The Help
Réalisateur : Tate Taylor
Scénario : Tate Taylor
Acteurs : Emma Stone, Viola Davis, Bryce Dallas Howard
Distribution : The Walt Disney Company France
Durée : 2h27
Genre : Drame
Date de sortie : 26 octobre 2011
Globale : [rating:4.5][five-star-rating]
Pour son deuxième long-métrage, Tate Taylor choisit d’aborder au cinéma un thème encore douloureux pour tous les afro-américains : la ségrégation. Pour cela, il choisit d’adapter le best-seller The Help écrit par sa meilleure amie d’enfance, Kathryn Stockett. Pour mettre en scène son film de presque 2h30, il fait appel à des actrices qui ne sont pas encore tout à fait grandes vedettes à Hollywood, mais tout de même talentueuses, dont Emma Stone (Crazy, Stupid, Love).
Synopsis : Dans la petite ville de Jackson, Mississippi, durant les années 60, trois femmes que tout devait opposer, vont nouer une incroyable amitié. Elles sont liées par un projet secret qui les met toutes en danger, l’écriture d’un livre qui remet en cause les conventions sociales les plus sensibles de leur époque. De cette alliance improbable va naître une solidarité extraordinaire. A travers leur engagement, chacune va trouver le courage de bouleverser l’ordre établi, et d’affronter tous les habitants de la ville qui refusent le vent du changement.
Un sujet douloureux parfaitement maîtrisé
On a tous appris à l’école l’histoire douloureuse de la ségrégation. Le fait qu’il n’y a pas 50 ans, les blancs bourgeois croyaient que les noirs développaient des maladies particulières, que l’homosexualité se soignait grâce à un sirop… Quand on regarde ce film, on se dit : « heureusement que les choses ont changé et que ces mentalités à la con ont évolué ! »
Heureusement, tout ceci a changé grâce à des fortes têtes qui se sont battues pour l’égalité des noirs : Martin Luther King, Rosa Parks, … Le film évoque avec légèreté et conviction cette lutte en faveur du changement.
C’est une histoire qui se déroule dans les années 60, donc forcément il faut replacer le spectateur dans le contexte : toutes ces figures, les lois racistes de Jim Crow, mais aussi les situations terribles de la guerre froide sont évoqués, sans prendre non plus trop de place dans cette romance. On assiste plus ici à une histoire fictive et romancée qu’à un documentaire historique sur la ségrégation. Et c’est plutôt plaisant. Évidemment, on ressent cette tension de révolte, ce monde terrorisé… mais cette ambiance est parfaitement équilibrée pour qu’on n’assiste pas à un film d’angoisse.
Forcément, lorsqu’on évoque un sujet aussi douloureux au cinéma, on ne peut que s’orienter vers une tonalité dramatique. La Couleur des sentiments est un film qui parle de révolte, mais avant tout de courage et d’ambition. Mais jamais le film ne tendra vers le mélodrame, l’hyperbolisme des plaintes… On ne pose pas les bonnes en victimes : on dénonce les faits. Ce qui est agréable, c’est qu’on ne pleure pas durant le film car les personnages sont présents pour alléger et donner une tonalité humoristique aux situations. La bonne humeur est donc au rendez-vous malgré une situation dramatique, qui, heureusement, évolue.
Pour permettre au spectateur de se replacer dans le contexte des années 60, le réalisateur Tate Taylor a fait appel au chef décorateur de Julie et Julia, Mark Ricker, pour trouver le cadre idéal. Le film a été tourné dans le Mississippi, un état très touché aussi bien culturellement que socialement dans les années 60. Tous ces décors, donc, correspondent à l’univers de chaque personnage. Grâce à des décors à la fois naturels et artificiels, Mark Ricker sait retracer la ville fermée de Jackson. Chaque costume est en accord avec les personnalités. Quant à l’image, elle est toujours aussi vive, kitsch et très plaisante pour les yeux. Les années 60 sont ainsi très bien représentées.
Des personnages touchants, poignants, justes, humains
Dans La Couleur des sentiments, les personnalités qui ont symbolisé la décennie sont présentes : la bourgeoise à la mentalité étriquée, la bonne noire touchante et forte, la féministe femme d’affaires, la petite bourgeoise qui veut faire évoluer les injustices, … On remarque donc dans ce film un florilège de personnages qui ont marqué les années 60. A travers l’histoire douloureuse, La Couleur des sentiments mise d’abord sur le jeu de ses personnages. Et c’est plutôt réussi…
Les six actrices (Emma Stone, Jessica Chastain, Octavia Spencer, Allison Janney, Viola Davis, Bryce Dallas Howard) s’investissent au maximum dans leur rôle, et se forment dans l’originalité. Les personnages sont frais, intriguants, touchants et intéressants à étudier. A commencer par Skeeter, qui livre une jolie performance. Celle-ci est aux antipodes de la femme idéale de son époque : elle veut travailler et ne montre aucun intérêt pour le mariage et les enfants. C’est une femme forte ambitieuse et cultivée qui se forge ses propres idées, en marge de la société. C’est une belle personne qui veut faire bouger les choses, dans son intérêt mais aussi dans l’intérêt de ses camarades.
Elle doit faire face à certains obstacles pour poursuivre ses rêves d’écrivain : elle se coupe de ses amies frivoles et méchantes, et lorsqu’elle rencontre enfin l’amour, elle s’oppose à cet homme qui va à l’encontre de son travail. On salue son courage et ses ambitions novatrices malgré les obstacles.
Un manque de crédibilité cependant, concernant son physique. Son jeu d’actrice est exemplaire, mais dans l’histoire elle est censée avoir un physique un peu plus ingrat (car elle s’en plaint). Or, dans le film, cette fille (et c’est objectif) est vraiment belle. Pour pousser en crédibilité, les maquilleuses auraient dû l’amocher un tout petit peu plus, et ne pas s’arrêter qu’aux cheveux.
Les bonnes sont à l’image que l’on peut avoir d’elles dans les années 60 : courageuses, justes, droites, battantes, fortes et croyantes. On ressent la souffrance de la perte du fils d’Abileen, qui reprend confiance grâce aux enfants qu’elle élève. Elle exerce même la méthode Coué avec certains d’entre eux, afin qu’ils ne deviennent pas comme leur parents. Minny, elle, est forte et loyale, a un gros caractère mais sait être drôle, et on ne se lasse pas de sa performance. Ces bonnes savent qu’elles prennent des risques, et la sortie du livre va bouleverser leur vie.
Quant à Jessica Chastain, on la redécouvre, après un rôle profondément dramatique dans The Tree Of Life. Elle est touchante, excentrique et marginale dans le rôle de Celia, une jeune femme naïve et peu débrouillarde.
Résumé :
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