Critique Express : Anna

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Anna

Italie, France : 2023
Titre original : –
Réalisation : Marco Amenta
Scénario : Marco Amenta, Anna Mittone
Interprètes : Rose Aste, Daniele Monachella, Marco Zucca
Distribution : Les films de l’Atalante
Durée : 1h58
Genre : Drame
Date de sortie : 5 mars 2025

3.5/5

Synopsis : Anna, trentenaire solitaire, élève ses chèvres dans une partie sauvage et préservée de la Sardaigne. Mais son exploitation est menacée le jour où un vaste projet de complexe touristique commence à s’installer sur ses terres. Malgré la pression du reste du village, très favorable à ce développement économique, Anna va se battre pour sauver tout ce qui lui reste.

Un combat inégal ?

6 ans après La sicilienne, un excellent premier long métrage de fiction du sicilien Marco Amenta, un film qui racontait le combat mené contre la Mafia par Rita, une jeune sicilienne, c’est un peu plus au nord, en Sardaigne, que nous amène ce même réalisateur dans Anna. Il s’agit de nouveau d’un combat d’une jeune femme, un peu plus âgée que Rita, mené cette fois ci contre des bétonneurs à la recherche de terrains pour construire un complexe touristique et contre la municipalité de son village qui, loin de défendre les activités locales, se félicite à l’avance du développement économique qui découlera de ce développement touristique. Quelques années auparavant, Anna avait épousé Toni, un homme de son village, et elle l’avait suivi à Milan. Elle n’avait pas supporté la vie dans cette grande ville, elle avait encore moins supporté Toni, un homme qui la battait régulièrement au point de tuer le fils dont elle était enceinte. Rentrée dans son village de Sardaigne, elle avait investi le terrain sur lequel son père avait toujours vécu et elle s’était lancée dans l’élevage d’un troupeau de chèvres et la fabrication de fromages qu’elle vendait sur le marché et dans la supérette locale, une vie qui convenait parfaitement à cette jeune femme éprise de liberté. Pendant longtemps, son seul souci s’était limité aux problèmes que, certaines nuits, des sangliers posaient à ses chèvres avec lesquelles elle a un rapport presque maternel. Jusqu’au jour où une immense statue de la vierge suspendue à un hélicoptère est passée au dessus d’elle et a été posée à terre à proximité de sa ferme, très vite suivie par l’apparition d’engins de chantier.

Le choc est brutal lorsqu’elle se rend compte qu’une entreprise est en train de commencer à construire un vaste complexe touristique sur son terrain. Son terrain ? Ce n’est pas ce que dit le cadastre et Anna n’a aucun titre de propriété pour prouver le contraire, l’acquisition du terrain par son père s’étant faite à « une époque où la propriété se transmettait oralement avec une poignée de main ». Anna étant une jeune femme au caractère bien trempé, pas question pour elle d’accepter la situation sans se battre et c’est à ce combat du pot de terre contre le pot de fer que le film nous permet d’assister. Elle a presque tout le village contre elle, les habitants voyant dans le projet lancé sur le terrain d’Anna la possibilité de trouver du travail pendant la construction et, ensuite, lorsqu’il s’agira de faire fonctionner le complexe touristique. Son commerce fait plus que s’en ressentir. Elle se montre le plus souvent très injuste envers le « petit » avocat local qu’elle a engagé pour défendre sa cause face au « grand » cabinet qui défend la partie adverse. L’argent qu’on lui propose pour abandonner la partie, pas question pour elle de l’accepter et, lors des réunions contradictoires, elle ne peut s’empêcher d’adopter un comportement excessif dont on sent qu’il ne plaide pas en sa faveur. Que voulez vous, elle est comme cela, Anna, et cela ne nous empêche pas d’avoir pour elle toute notre sympathie. Et puis, n’oublions pas que Anna est sarde, et, que, pour les sardes, « les paroles valent plus qu’un bout de papier et que tout l’argent que peuvent nous offrir des étrangers ». Et puis, n’oublions pas ce mécanisme du droit civil ayant pour nom l’usucapion !

Au fait : un troupeau de chèvres, un terrain magnifiquement situé qui est convoité pour un projet immobilier, la Sardaigne, la Corse, la bergère et le berger qui, chacun à sa façon, s’opposent au projet, cela ne vous dit rien ? Oui, les situations de départ de Anna et de Le mohican, le film de Frédéric Farrucci sorti il y a 3 semaines, sont très similaires. Rien d’étonnant d’ailleurs, la Sardaigne et la Corse étant deux îles magnifiques sur lesquelles lorgnent des intérêts financiers auxquels s’opposent souvent des autochtones qui souhaitent conserver l’authenticité de leur territoire. Dans le traitement de l’histoire, les 2 films prouvent qu’on peut avoir de grandes différences avec des situations de départ très similaires. Si on tient à chercher la petite bête, on pourra trouver que Anna souffre de quelques longueurs inutiles, mais, face à ce qui est malgré tout un très beau film, on ne manquera pas de se féliciter d’avoir fait la connaissance d’une jeune comédienne de très, très grand talent, Rose Aste, l’interprète d’Anna.

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