Test Blu-ray 4K Ultra HD : The Crow

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The Crow

États-Unis : 2024
Titre original : –
Réalisation : Rupert Sanders
Scénario : Zach Baylin, William Josef Schneider
Acteurs : Bill Skarsgård, FKA twigs, Danny Huston
Éditeur : Metropolitan Vidéo
Genre : Fantastique
Durée : 1h51
Date de sortie cinéma : 21 août 2024
Date de sortie DVD/BR/4K : 19 décembre 2024

Eric et sa fiancée Shelly sont sauvagement assassinés par un gang de criminels. Mais une force mystérieuse ramène Eric d’entre les morts, qui, doté de pouvoirs surnaturels, entreprend de se venger pour sauver son véritable amour…

Le film

[4/5]

A l’origine, le comic book The Crow est une œuvre très personnelle, au cœur de laquelle James O’Barr s’inspirait d’Edgar Allan Poe afin d’exorciser sa douleur vis-à-vis du décès de sa compagne, fauchée par un chauffard à la fin des années 70. Entamé en 1981, dessiné en noir et blanc, le comic book se servait de l’imagerie gothique propre aux groupes de rock du début des 80’s, et notamment à Siouxsie and the Banshees, Sisters of Mercy, ou encore, évidemment, The Cure. Depuis sa publication en 1989, The Crow de James O’Barr est devenu un classique du comics indépendant, en grande partie grâce à son adaptation cinématographique, réalisée par Alex Proyas en 1994, et mettant en scène Brandon Lee qui, malheureusement, décédera sur le tournage du film. Le succès de cette adaptation permit au personnage de devenir une icône de la culture gothique des années 90, et The Crow ne tarderait pas à devenir une véritable « franchise ».

Les comics The Crow se multiplient à partir de 1996, chez différents éditeurs, faisant parfois l’objet de crossovers inattendus (à l’image du one-shot « The X-Files/The Crow : Conspiracy »), et inspirant plusieurs grands noms de l’industrie du comic book (John Wagner, Alexander Maleev, Charlie Adlard…). En parallèle, trois nouveaux films, un téléfilm et une série TV verront le jour entre 1996 et 2005, ainsi qu’une petite dizaine de romans et un jeu PlayStation. Ces trente dernières années, une demi-douzaine d’autres projets de films The Crow entrèrent en développement, sans finalement jamais voir le jour : James O’Barr en voulait une version féminine, Rob Zombie désirait en faire un chasseur de primes immortels dans un monde futuriste, DMX désirait en faire une version transposée dans le monde du rap, et de nombreux acteurs furent approchés au fil des années pour reprendre le rôle, de Mark Wahlberg à Bradley Cooper, en passant par Luke Evans ou encore Jason Momoa. Le moins que l’on puisse dire, c’est que The Crow a eu plusieurs vies ; comme Batman, Conan ou Sherlock Holmes avant lui, le personnage embrase toutes les imaginations.

Le romancier / réalisateur britannique Clive Barker, qui, tout comme James O’Barr avec The Crow, a vu son œuvre et ses personnages déclinés sur énormément de supports, expliquait ce phénomène en ces termes : « Dès que l’on crée une histoire ou une image qui trouve la faveur du public, on la perd. Elle vous quitte, la petite salope ; elle devient la propriété des fans. Ce sont eux qui élaborent leur propre mythologie autour d’elle ; eux qui conçoivent des suites et des prologues ; eux qui vous signalent les points faibles de votre récit. Il n’existe pas de plus beau compliment à mes yeux. (…) Après Hellraiser est venu Hellraiser II, dans lequel le scénariste Peter Atkins et le réalisateur Tony Randel ont tissé leur propre suite à partir du premier épisode. Ce n’était pas le film que j’aurais tourné, mais il était extrêmement intéressant de voir comment d’autres esprits et d’autres talents traitaient ces idées ; comment ils exploraient des prolongements que je n’avais même pas envisagés lorsque j’avais pris la plume. (…) Mais j’en suis néanmoins très fier. Pas seulement parce que des créateurs aussi doués ont été suffisamment séduits par les concepts de Hellraiser pour prolonger son univers fictif avec leurs propres récits, mais parce que – voyez ! – ce salaud de petit film que j’ai tourné a désormais sa propre vie. »

Mais les réseaux sociaux – ou notre époque en général – n’ont pas la sagesse de Clive Barker, et semblent bel et bien avoir décidé qu’il n’y avait qu’un seul The Crow, et qu’il s’agissait du film d’Alex Proyas. Cette décision arrive un peu tard – grosso modo 28 ans et des dizaines d’histoires dérivées trop tard – mais la Cancel Culture n’a pas de limites, à tel point qu’on en oublierait presque aussi le comic book de James O’Barr. De ce fait, avant même la sortie du film, la nouvelle adaptation de The Crow signée Rupert Sanders en 2023 a pris cher sur les réseaux, tous ses partis pris artistiques – aussi bien formels que narratifs – étant critiqués comme étant des « non-sens absolus » par des réseaux devenus ayatollahs de la pensée unique. Même Alex Proyas a eu l’indélicatesse de tirer sur l’ambulance avec la meute des Trolls du Net et des chiens de la casse, pointant du doigt l’aspect mercantile du projet, puis, plus tard, les mauvaises critiques dont cette nouvelle version était la cible : une attitude d’autant plus déplorable qu’il y a un peu moins de dix ans, le même Alex Proyas chouinait sur les réseaux quand la critique démolissait son Gods of Egypt

Objectivement, il ne nous parait pas surhumain à priori de considérer The Crow 1994 et The Crow 2024 comme deux œuvres distinctes. Le film de Rupert Sanders n’est pas fait pour remplacer celui d’Alex Proyas, il ne va pas le « Cancel », et pour être tout à fait honnête, on voit vraiment mal comment on pourrait être suffisamment débile pour avoir dans l’idée de comparer les deux films, tant ils diffèrent l’un de l’autre en termes de partis pris esthétiques, de traitement du récit et des idées tirées du comics de James O’Barr. Exit l’Harlequin romantique en moule-bite de cuir et l’architecture gothico-baroque du film de Proyas, The Crow arbore ici l’allure d’un Hooligan roumain semi-clodo avançant sans relâche, tel un zombie, et trimbalant avec lui non pas son chagrin d’amour mais un mal-être et une douleur inextinguibles, lancinantes, qui lui collent littéralement à la peau (« Cry now, Cry later ») depuis toujours, et dont il ne parviendra à se débarrasser que par un seul moyen : la mort.

Sauf que la mort n’attend pas notre pauvre Eric (Bill Skarsgård) au bout du chemin dans cette version de The Crow : elle lui est refusée par Kronos, un singulier « gardien » des mondes incarné à l’écran par Sami Bouajila, qui le garde prisonnier de cet « entre-deux » abandonné aux corbeaux. Le manipulant dans un premier temps, Kronos le forcera à travailler pour lui en explorant encore un peu plus profondément les arcanes de l’horreur et de la violence, qui se déchaînera littéralement à l’écran dans l’extraordinaire dernier acte du film. Quittant en chemin l’intensité du « film de vengeance », The Crow transforme le personnage central non pas réellement en justicier mais plutôt en mercenaire, dans le sens où il n’agit finalement que pour trouver cette paix à laquelle il aspire. Habile, le scénario de Zach Baylin et William Schneider explore des chemins hérités du fantastique assez originaux et inédits au cœur de la franchise, que Rupert Sanders illustre à l’écran avec une bonne dose de poésie.

Cette poésie, volontiers urbaine, se retrouvera d’ailleurs dans la plupart des partis pris esthétiques du cinéaste : qu’il s’agisse des choix visuels ou musicaux, The Crow cuvée 2024 délaisse en effet le style gothique / metal / industriel pour une représentation plus contemporaine, mélangeant les genres et les influences visuelles et musicales. La photo du film, signée Steve Annis, qui avait déjà collaboré avec Rupert Sanders sur la série Foundation, est absolument magnifique, le soin apporté aux cadrages et à la mise en scène est remarquable, et l’ambiance musicale s’avère régulièrement étonnante, allant de l’électro underground à l’opéra en passant par un classique de Joy Division et, bien sûr, un morceau de FKA Twigs, qui incarne Shelly dans le film. La bande originale en elle-même a été composée par Volker Bertelmann, également connu sous le pseudonyme de Hauschka.

Le Blu-ray 4K Ultra HD

[4,5/5]

Par nature, et en raison de son esthétique léchée et de sa facture visuelle ultra chiadée, le film de Rupert Sanders s’imposait d’entrée de jeu comme un des films à surveiller en 4K en cette fin d’année. Le résultat est à la fois sans surprise et sans appel : le Blu-ray 4K Ultra HD de The Crow édité par Metropolitan Vidéo s’avère un exemple époustouflant de l’excellence du support UHD en matière d’immersion et de confort de visionnage, surtout en ce qui concerne ce type de films à grand spectacle. Pas la peine de chercher la petite bête, le transfert que nous propose aujourd’hui l’éditeur est littéralement sublime et ne pourra être pris en défaut : la galette nous propose en effet un piqué, des textures et des couleurs d’une richesse impressionnante. Même sur les plans larges, c’est impeccable, irréprochable, avec des noirs profonds et une profondeur de champ exceptionnelle, le tout étant encore renforcé par l’apport des technologies HDR10 + Dolby Vision. Un sans-faute absolu ! Côté enceintes, c’est également un festival de ouf malade : l’éditeur nous propose en effet un feu d’artifice sonore ininterrompu et époustouflant avec deux mixages Dolby Atmos (VF/VO) dans les deux cas, le mixage en envoie plein les esgourdes et fait littéralement trembler les murs pendant les scènes d’action – on appréciera tout particulièrement l’énorme moment de bravoure que constitue la scène de l’opéra, et qui nous propose une spatialisation remarquable. Le caisson de basses ne connait pas le repos, les effets multicanaux rivalisent de puissance et de finesse : c’est du grand Art. Pour les cinéphiles non équipés, ces deux pistes seront décodées en Dolby TrueHD 7.1, et feront vrombir votre salon comme si vous étiez dans un festival de tuning.

Du côté des suppléments, on se régalera d’abord d’un long making of (1h06), extrêmement complet, qui nous plongera au cœur des différentes étapes de la création du film, depuis la décision de réadapter le récit de James O’Barr jusqu’à la sortie du film. A travers de nombreuses interviews des acteurs et de l’équipe, on évoquera les choix de casting, la conception des personnages, des costumes et de la production, les décors, le tournage et la mise en place des différentes cascades… Très intéressant ! On aura également droit à un focus sur la musique du film (11 minutes) avec le compositeur Volker Bertelmann, ainsi qu’à un autre revenant sur la création du générique d’ouverture (2 minutes), impressionnant et plein d’effets spéciaux. Enfin, on terminera avec un hommage au producteur Edward R. Pressman (11 minutes), quatre scènes coupées (6 minutes) et la traditionnelle bande-annonce.

On notera également que le Blu-ray 4K Ultra HD de The Crow édité par Metropolitan est présenté dans un superbe SteelBook aux couleurs du film.

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