Test Blu-ray : Le Mangeur d’âmes

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Le Mangeur d’âmes

France : 2024
Titre original : –
Réalisation : Julien Maury, Alexandre Bustillo
Scénario : Ludovic Lefebvre, Annelyse Batrel
Acteurs : Virginie Ledoyen, Paul Hamy, Sandrine Bonnaire
Éditeur : Blaq Out
Durée : 1h51
Genre : Thriller, Policier, Fantastique
Date de sortie cinéma : 24 avril 2024
Date de sortie DVD/BR : 23 octobre 2024

La commandante Élisabeth Guardiano est chargée d’aller enquêter sur un double meurtre d’une rare brutalité dans une petite commune des Vosges. Sur place, elle rencontre le capitaine de gendarmerie Franck de Rolan qui fait face à une série de disparitions d’enfants. Impuissants face à un village hostile, ils vont être contraints d’unir leurs forces pour découvrir la vérité, une vérité terrifiante empreinte de légendes occultes…

Le film

[4/5]

Duo de cinéastes s’acharnant depuis une quinzaine d’années à œuvrer dans le cinéma de genre made in France, Julien Maury et Alexandre Bustillo en auront chié des ronds de chapeau avant de se voir enfin respectés à leur juste valeur par la critique française. Le premier long-métrage du duo, À l’intérieur, sorti sur les écrans en 2007, s’était imposé avec le recul comme l’un des films les plus réussis et les plus incontournables de la vague de « New French Extremism » initiée par Haute Tension en 2003. Pour autant, la critique de l’époque n’avait pas été tendre avec Alexandre Bustillo et Julien Maury, et la situation empirerait encore avec leurs deux films suivants, Livide (2011) et Aux yeux des vivants (2014), qui furent sacrifiés par leur distributeur SND et furent l’objet de toutes les insultes et de tous les quolibets de la part de la critique française mainstream.

Il faudrait finalement attendre 2017 et leur première expérience américaine (Leatherface) pour que la critique prenne enfin le duo de cinéastes un peu plus au sérieux, et finisse par remarquer la cohérence de leur univers, depuis toujours très marqué par l’imaginaire (conte de fées, folklore) et très enclin au « mélange des genres ». De fait, s’ils ne sont pas les auteurs du scénario de leur dernier film Le Mangeur d’âmes, on retrouve néanmoins dans l’écriture de Ludovic Lefebvre et Annelyse Batrel non seulement l’essence du roman d’Alexis Laipsker dont il est l’adaptation, mais également la « patte » d’Alexandre Bustillo et Julien Maury… Et pour cause : les suppléments du Blu-ray édité par Blaq Out nous apprendront en effet que les deux scénaristes / réalisateurs ont remanié le Shooting Script ou dernier jet du scénario pour que celui-ci colle davantage à la direction dans laquelle ils voulaient aller avec Le Mangeur d’âmes.

Le film de Julien Maury et Alexandre Bustillo s’inscrit dans une tradition du polar à la française initiée par Les Rivières pourpres de Mathieu Kassovitz, à savoir celle d’un thriller teinté de mystère et/ou de fantastique tourné « à l’américaine » tout en restant très ancré dans un cadre extrêmement « français », en termes de géographie ou d’institutions. L’écriture d’Alexis Laipsker, auteur du roman d’origine, est ainsi assez proche, dans sa tonalité et ses thématiques, de celles de Maxime Chattam ou Jean-Christophe Grangé, et naturellement, Le Mangeur d’âmes évoquera d’autres œuvres évoluant dans la même veine, telles que les mini-séries Glacé, créée par Gérard Carré, Pascal Chaumeil et Caroline Van Ruymbeke en 2017, ou Anthracite : Le mystère de la secte des Écrins, créée par Fanny Robert et Maxime Berthemy en 2024.

Le Mangeur d’âmes prend donc place dans une petite ville isolée des Vosges, et met en scène la rencontre entre deux flics que tout oppose : la commandante de police Élisabeth Guardiano (Virginie Ledoyen), et le capitaine de gendarmerie Franck de Rolan (Paul Hamy). Elle a été dépêchée de la « grande ville » pour enquêter sur un crime passionnel particulièrement violent, lui est littéralement obsédé par une affaire de disparitions d’enfants dans le secteur. Les deux enquêteurs se retrouvent sur la même scène de crime, et les ramifications de l’affaire ne tarderont pas à remuer des souvenirs douloureux dans leurs passés respectifs. Mais cette sordide affaire les mènera vers une effrayante légende profondément ancrée dans la région…

La frontière entre le polar et le fantastique est ténue au cœur de l’intrigue du Mangeur d’âmes, et le récit ne basculera qu’occasionnellement – et finalement très tardivement – dans le surnaturel pur et dur. Pour autant, le soin apporté par Alexandre Bustillo et Julien Maury à la construction et au développement d’une atmosphère oppressante, lourde, teintée de secrets tenaces et de croyances irrationnelles, est assez remarquable. C’est d’autant plus réussi que les duettistes s’étaient jusqu’ici concentrés sur des films assez courts, d’une durée comprise entre 80 et 90 minutes. Avec Le Mangeur d’âmes, ils signent cette fois un film considérablement plus long (1h51), et parviennent à négocier ce virage important dans leur carrière en conservant un rythme soutenu, ne provoquant jamais le moindre ennui.

Porté par les prestations solides de Paul Hamy (Jessica Forever, Le Dernier voyage), de la trop rare Virginie Ledoyen mais également de Sandrine Bonnaire dans un rôle clairement inattendu, Le Mangeur d’âmes s’avère donc une jolie réussite, qui parvient, en dépit d’évidentes contraintes budgétaires, à maintenir un bon rythme et à se créer une identité propre, restant à la lisière entre le polar très noir et le fantastique pur jusqu’à une scène extrêmement graphique qui le fait définitivement basculer et permet à Julien Maury et Alexandre Bustillo de signer un dernier acte complètement fou. Pour les amateurs de la carrière du duo, on notera également la présence au générique de Francis Renaud, Emmanuel Lanzi et Chloé Coulloud, trois habitués de leur univers. Un excellent moment !

Le Blu-ray

[4/5]

Distribué sur un tout petit circuit de 80 salles, Le Mangeur d’âmes a réuni un peu plus de 24.000 français dans les salles de cinéma au printemps dernier – le film aurait certes mérité mieux, mais il s’offre aujourd’hui une seconde chance au format Blu-ray grâce à Blaq Out. Bien rôdé en matière d’encodage sur support Haute Définition, l’éditeur confirme tout le bien que l’on pensait de lui avec ce Blu-ray du Mangeur d’âmes, qui s’offre un traitement HD littéralement impeccable. La définition est au taquet, sans le moindre défaut apparent de compression, l’image affiche un piqué d’une précision époustouflante et les couleurs explosent littéralement à l’écran. Côté son, le mixage DTS-HD Master Audio 5.1 joue la carte de l’ambiance, en utilisant de façon très fine l’ensemble des canaux arrière ; il sait également en imposer pendant les passages qui l’exigent, jouant la carte d’un dynamisme échevelé durant les passages les plus « agités » du film, et notamment sur son dernier acte. Du grand Art. On notera par ailleurs que Blaq Out nous propose également une piste DTS-HD Master Audio 2.0, qui s’avérera naturellement plus cohérente si vous n’utilisez pas de « Home Cinema ».

Du côté des suppléments, on commencera par un passionnant entretien avec Alexandre Bustillo et Julien Maury (42 minutes). Détendus et sans langue de bois, ils reviendront sur le fait que leur producteur Fabrice Lambot leur ait proposé d’adapter « Le Mangeur d’âmes » d’Alexis Laipsker. Pris par le tournage de The Deep House, ils n’ont pu le signer eux-mêmes, mais ont travaillé aux côtés des deux scénaristes et ont finalement remanié le dernier jet du scénario afin de l’adapter à leurs repérages dans les Vosges et pour le faire s’intégrer pleinement à leur univers, dans un souci de cohérence générale vis-à-vis de leur filmographie. Ils évoqueront également le casting du film, en particulier Virginie Ledoyen et Sandrine Bonnaire, qui s’inquiétait un peu de tourner dans un film de genre – ses filles l’ont encouragé à se lancer dans l’aventure. Ils insisteront également sur le fait d’avoir voulu tourner « en région », et reviendront sur les difficultés qu’implique le fait de tourner dans des lieux préexistants. On terminera le tour des suppléments avec une poignée de scènes coupées (8 minutes), ayant peut-être été écartées du montage final pour des questions de rythme.

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