Les Chèvres !
France : 2024
Réalisation : Fred Cavayé
Scénario : Fred Cavayé, Sarah Kaminsky, Nicolas Slomka, Matthieu Rumani
Acteurs : Dany Boon, Jérôme Commandeur, Marie-Anne Chazel
Éditeur : Pathé
Durée : 1h36
Genre : Comédie
Date de sortie cinéma : 21 février 2024
Date de sortie DVD : 26 juin 2024
Saviez-vous qu’au 17ème siècle, les animaux pouvaient être jugés pour avoir commis un crime ? Maître Pompignac, risée du barreau, pense avoir trouvé l’affaire de sa vie : défendre la jeune et innocente Josette, accusée à tort du crime d’un maréchal… Mais c’était sans compter sur son adversaire, le redoutable et réputé Maître Valvert, et surtout sur Josette, qui s’avère n’être autre qu’une chèvre…
Le film
[3/5]
La « comédie historique » peut parfois mettre en évidence certains détails peu connus et absurdes de l’Histoire, même si elle tend souvent à le faire par le biais de l’exagération. On pense notamment à un film tel que Monty Python : La Vie de Brian, qui en dépit de son propos volontiers « hérétique », mettait en évidence une poignée de faits historiques bien réels, tels que la profusion de messies auto-proclamés se jouant hypocritement de la crédulité de leurs adorateurs.
Pour son retour à la comédie, Fred Cavayé signe donc avec Les Chèvres une autre comédie d’apparence absurde, mais beaucoup plus documentée qu’elle n’y parait : en effet, jusqu’à la moitié du 18ème Siècle, il était possible, en France, d’intenter un procès à un animal. Ainsi, au Moyen Âge et bien après, on condamna à la potence ou au bûcher des cochons, des truies, ou des vaches. De même, l’Église étendit ses excommunications des hommes aux animaux : rats, mouches, sauterelles, taupes, poissons ; tout membre de la faune pouvait y succomber.
Ainsi, aussi absurde que puisse paraitre aujourd’hui le postulat de départ des Chèvres, au 17ème Siècle où se déroule le film, les animaux pouvaient être, comme les humains, condamnés dans des affaires civiles ou criminelles. Dès qu’un animal commettait un méfait (vols, pillages, homicides, infanticides, accidents…), l’autorité compétente se saisissait de la cause, un procès-verbal était dressé, et on se livrait à une enquête très minutieuse. Le fait étant bien établi, l’officier du ministère public, près la justice seigneuriale, requérait la mise en accusation de l’inculpé. Toutes les formalités de la procédure étaient observées, la sentence était signifiée à l’animal lui-même dans sa prison, après quoi, le bourreau était appelé, parfois de très loin, pour procéder à l’exécution. L’exécution de ces arrêts se faisait publiquement et avec la même solennité que pour les criminels.
Bien entendu, Fred Cavayé et ses coscénaristes utilisent le scénario de leur film afin de dresser des parallèles pas si absurdes avec la société contemporaine : par conséquent, Les Chèvres sera également l’occasion pour ses auteurs de dénoncer, de façon parfois assez inspirée, la peur de l’étranger – qui nous valent de nombreuses saillies sur les « Savoisiens », habitants du duché de Savoie, qui ne deviendra français qu’en 1860. Le film sera également l’occasion de mettre en évidence le manque d’hygiène générale qui, à l’époque, réduisait considérablement l’espérance de vie des français (Dany Boon y est présenté comme un homme de 27 ans), la traditionnelle opposition entre Paris et la province ou encore, bien entendu, la place occupée par les femmes dans la société du 17ème Siècle.
On n’ira certes pas jusqu’à affirmer que Les Chèvres devrait être intégré au programme d’Histoire des collèges et lycées, mais le fait est que le film de Fred Cavayé bénéficie d’une reconstitution historique parfaitement documentée et tout à fait crédible, que l’on retrouvera jusque dans le souci du détail en ce qui concerne les costumes et les décors. On notera par ailleurs que la fin du film nous propose un petit « twist » narratif dont on ne vous révélera pas la teneur mais qui s’avère non seulement assez malicieux, mais également viable d’un point de vue historique. Pour le reste, le duo composé à l’écran par Dany Boon et Jérôme Commandeur fonctionne plutôt bien, et les duettistes sont épaulés par une poignée de seconds-rôles hauts en couleurs, allant de la révélation Claire Chust aux valeurs sûres Marie-Anne Chazel et Grégory Gadebois. Un bon moment !
Le DVD
[4/5]
Après avoir attiré un peu plus de 182.000 curieux dans les salles obscures, Les Chèvres débarque au format DVD sous les couleurs de Pathé, et cette livraison en définition standard est à l’image des habituelles sorties vidéo d’un éditeur décidément remarquable et parfaitement aguerri au format : la galette propose un impressionnant piqué et un encodage bien maîtrisé, doté de couleurs parfaitement fidèles à la photo du film signée Denis Rouden (36 Quai des Orfèvres, Largo Winch…). En deux mots, le transfert compose parfaitement avec les limites du support DVD (on note certes une granulation un peu excessive durant les scènes nocturnes, mais il s’agit d’une des limites intrinsèques du format) et offre un spectacle très propre, sans écueil majeur à déplorer. Niveau son, le film nous est proposé en Dolby Digital 5.1, avec une nette prépondérance laissée aux voix, qui n’empêche cependant pas une dynamique plus ample sur quelques scènes en particulier. On notera également la présence d’un mixage Dolby Digital 2.0, qui s’avérera plus équilibré et cohérent si vous visionnez Les Chèvres sans avoir recours à un système de spatialisation sonore.
Dans la section suppléments, on trouvera tout d’abord une série d’entretiens avec Fred Cavayé, Dany Boon, Jérôme Commandeur et Claire Chust (19 minutes). Fred Cavayé y reviendra sur sa découverte du projet il y a quelques années, et son désir de revenir à la comédie. Très dissipés, Dany Boon et Jérôme Commandeur partiront régulièrement en fou-rire, et Claire Chust reviendra sur l’Art de la comédie dont fait preuve Cavayé, soulignant la qualité d’OVNI du film. Ces interviews sont accompagnées de deux scènes coupées : une scène de « bras en fer » entre Claire Chust et Alexandre Desrousseaux (2 minutes), et une version allongée de la scène du muret (2 minutes), qui met à nouveau en scène Claire Chust et Alexandre Desrousseaux.