A force de suivre l’actualité politique de trop près, on pourrait croire que la France toute entière aille encore à l’école. Alors que le poste ministériel à l’éducation nationale n’a jamais été une partie de plaisir et que les personnes l’ayant occupé au fil des gouvernements n’ont que très rarement fait l’unanimité, le tollé médiatique soulevé par la nomination de la nouvelle ministre et les préférences manifestes de cette dernière pour les établissements privés sont quand même d’un autre ordre.
A tel point qu’on pourrait presque se demander qui arrivera à son terme le premier, le nouveau cycle de LaCinetek ou le mandat d’Amélie Oudéa-Castéra rue de Grenelle ? Puisque les pronostics politiciens ne relèvent nullement de notre domaine, on se contentera de vous confirmer que vous avez encore près de quatre semaines, jusqu’au vendredi 9 février, pour retourner à l’école par le biais de dix formidables films, aussi ludiques que passionnants.
Cerise sur le gâteau : la plateforme cinéphile inaugurée par Pascale Ferran, Laurent Cantet et Cédric Klapisch en novembre 2015 vient de lancer une offre de promotion sur son site, qui vous permet d’y souscrire jusqu’à lundi prochain, le 22 janvier 2024, au prix défiant toute concurrence d’un euro symbolique pour trois mois ! En temps normal, l’abonnement mensuel est à 4€99, tandis que l’annuel vous coûte un peu moins de cinquante euros. En plus de la sélection du mois, toujours d’une exceptionnelle qualité éditoriale, il vous permet de profiter – en illimité – de certains coups de cœur temporaires de la Cinémathèque des cinéastes.
Y compris quelques films du cycle céleste précédent qui jouent les prolongations pendant un mois supplémentaire pour Les Aventures du Baron de Münchausen de Terry Gilliam et Rencontres du troisième type de Steven Spielberg, voire jusqu’à la mi-mars pour Le Ciel est à vous de Jean Grémillon et Nostalgie de la lumière de Patricio Guzman.
La grande rétrospective trimestrielle est consacrée, quant à elle, au monument du cinéma italien l’acteur Marcello Mastroianni. Dans la rubrique des « Trésors cachés », vous pourriez découvrir quatre films issus de la collection Télévision de chambre, lancée au milieu des années 1980 par l’INA, signés Chantal Akerman, Jean-Claude Brisseau, Arthur Joffé et André Téchiné. Et enfin, la carte blanche accordée au réalisateur Dominik Moll (La Nuit du 12) se compose de trois films pour le moins complémentaires : le court-métrage muet de Alice Guy Les Résultats du féminisme, le policier américain Les Flics ne dorment pas la nuit de Richard Fleischer et le plus grand succès commercial de Moll Harry Un ami qui vous veut du bien, qui avait valu à Sergi Lopez le César du Meilleur acteur en 2001.
Avec deux des films de la sélection du mois réalisés par les fondateurs de LaCinetek et surtout une écrasante majorité de productions françaises, on pourrait croire que les programmateurs n’aient guère fait preuve de zèle, ni d’originalité dans leurs choix. Pourtant, c’est le propre du regroupement de ces films plus ou moins connus sous forme de cycle, qui sera à même d’en dégager de nouveaux axes de réflexion.
A commencer par un trio prodigieux de documentaires, qui s’intéressent, chacun à sa manière, à la vie des élèves et des profs sur la durée. Que ce soit une école en Suisse au début des années 1960 dans Quand nous étions petits enfants de Henry Brandt ou bien des cadres pédagogiques plus proches de notre vécu pour la maternelle dans Être et avoir de Nicolas Philibert et le lycée dans Entre les murs de Laurent Cantet, l’immersion y est aussi totale que passionnante.
C’est davantage le point de vue des élèves – pour la plupart des cancres, disons-le clairement –, qui prévaut du côté de la fiction. Un magnifique prétexte de revoir toute une génération d’acteurs français à leurs débuts, de Romain Duris et Vincent Elbaz dans Le Péril jeune de Cédric Klapisch jusqu’à Léa Seydoux, Louis Garrel et Grégoire Leprince-Ringuet dans La Belle personne de Christophe Honoré. A moins de remonter encore plus loin vers les origines de la tradition de l’école au cinéma, à travers les classiques incontournables que sont l’œuvre fondatrice de la Nouvelle Vague Les 400 coups de François Truffaut et Zéro de conduite de Jean Vigo.
Ailleurs, des réalisateurs aux préoccupations artistiques aussi diamétralement opposées que l’Iranien Abbas Kiarostami et l’Américain Greg Mottola se sont également fait leurs petites idées sur ce drôle de microcosme engoncé entre deux sonneries avec respectivement le poétique Où est la maison de mon ami ? et le plus joliment cru SuperGrave.
La sélection « A l’école » du mois de janvier 2024
Les 400 coups (France / 1959) de François Truffaut, avec Jean-Pierre Léaud et Claire Maurier – Prix de la Mise en scène au Festival de Cannes en 1959
La Belle personne (France / 2008) de Christophe Honoré, avec Louis Garrel et Léa Seydoux
Diablo menthe (France / 1977) de Diane Kurys, avec Eléonore Klarwein et Odile Michel
Entre les murs (France / 2008) de Laurent Cantet, avec François Bégaudeau – Palme d’or au Festival de Cannes en 2008 et César du Meilleur scénario adapté en 2009
Être et avoir (France / 2002) de Nicolas Philibert – César du Meilleur montage en 2003
Où est la maison de mon ami ? (Iran / 1987) de Abbas Kiarostami, avec Babek Ahmed Poor et Ahmed Ahmed Poor
Le Péril jeune (France / 1994) de Cédric Klapisch, avec Romain Duris et Vincent Elbaz
Quand nous étions petits enfants (Suisse / 1960) de Henry Brandt
SuperGrave (États-Unis / 2007) de Greg Mottola, avec Jonah Hill et Michael Cera
Zéro de conduite (France / 1933) de Jean Vigo, avec Jean Dasté et Robert Le Flon
