Dans les griffes de la momie
Royaume-Uni : 1966
Titre original : The Mummy’s Shroud
Réalisation : John Gilling
Scénario : John Gilling, Anthony Hinds
Acteurs : André Morell, John Philips, David Buck
Éditeur : Tamasa Diffusion
Durée : 1h31
Genre : Fantastique, Horreur
Date de sortie cinéma : 19 juin 1968
Date de sortie DVD/BR : 31 octobre 2023
1920, à Mezzera, Egypte, un lieu entouré de mystère et de magie ancienne. Une expédition archéologique est sur le point de virer au carnage, elle doit faire face à une violence meurtrière à laquelle très peu vont échapper. L’archéologue Sir Basil Walden et son équipe sont en route pour retrouver la tombe perdue du pharaon Kah-to-Bey. Ayant ignoré les avertissements concernant une malédiction de mort, l’expédition découvre la sépulture du pharaon, avec des conséquences terribles. Un esprit vengeur a été libéré, et il a soif de chair et de vengeance…
Le film
[3,5/5]
Dans le petit monde de la Hammer Films, les films consacrés au personnage de la « Momie » (hérité des classiques de la Universal Monsters) possèdent une caractéristique singulière : les quatre films de momie(s) produits par le studio britannique entre 1959 et 1971 ne sont absolument pas liés entre eux. Il ne s’agit ainsi pas de « suites » à proprement parler, mais davantage de variations sur un même thème, et si l’on excepte La Momie sanglante et son personnage de momie féminine incarné par Valerie Leon, on pourrait presque affirmer qu’ils se ressemblent tous un peu.
Pour autant, en dépit de son classicisme forcené, Dans les griffes de la momie n’en demeure pas moins un sympathique représentant du savoir-faire de la Hammer : l’ensemble développe une atmosphère solide, les personnages sont intéressants et globalement bien définis, le production design est de toute beauté, et la structure narrative nous réserve quelques petites surprises des plus amusantes, principalement grâce au personnage de la voyante, incarnée à l’écran par Catherine Lacey. Pour le reste, le déroulement du film reste assez classique, avec une dernière demi-heure qui s’apparente qui suit le destin de plusieurs personnages qui se font éliminer un par un par une impitoyable momie dans un cadre relativement fermé.
Les costumes et les décors ont fait l’objet d’un soin certain, de même que le maquillage de la momie. John Gilling et son directeur photo Arthur Grant nous proposent une série de meurtres délicieusement sinistres, prenant le plus souvent place dans des lieux exigus qui exigent un sens du cadre et des éclairages assez inhabituels dans les productions Hammer. Mais ce qui permettra surtout à Dans les griffes de la momie de se démarquer de ses prédécesseurs La Malédiction des pharaons (1959) et Les Maléfices de la momie (1964), ce sont les acteurs, vraiment excellents : si André Morrell est rapidement écarté de l’action, Catherine Lacey nous livre une prestation hallucinée dans le rôle de la diseuse de bonne aventure, et John Phillips s’avère tellement antipathique et méprisant dans celui de Preston qu’on en finit par avoir hâte que la momie lui botte le cul. Comme toujours, c’est également un grand plaisir de retrouver Michael Ripper, un des piliers de la Hammer, qui apparaît ici dans le rôle de Longfellow, l’homme à tout faire de Preston.
Dans l’ensemble, Dans les griffes de la momie s’avère donc un film plein de charme et tout à fait sympathique, même s’il lui manque sans doute un petit je-ne-sais-quoi qui lui aurait permis de devenir un incontournable de la Hammer. Quoi qu’il en soit, on aurait tort de bouder notre plaisir…
Le Blu-ray
[4,5/5]
À ce jour, Dans les griffes de la momie est uniquement disponible en Blu-ray au sein du coffret Hammer 1966-1969 – l’Âge d’Or, disponible chez Tamasa Diffusion depuis le 31 octobre. Ce coffret est disponible en édition limitée et numérotée à 2000 exemplaires, et nous propose sept films produits par le studio Hammer dans les années 60, dans de superbes versions restaurées. Le coffret contient par ailleurs une poignée de goodies, telles que des cartes reproduisant les affiches originales des 7 films et un livret inédit de 52 pages avec documents, illustrations, photos et affiches. Si vous commandez le coffret sur le site de l’éditeur Tamasa Diffusion, vous pourrez peut-être également recevoir un décapsuleur aux couleurs de la Hammer ainsi qu’un jeu de 3 sous-bocks. Attention, quantités limitées !
Comme dans le cas du coffret Hammer 1970-1976 – Sex & Blood sorti en novembre 2020, on a choisi d’évoquer la sortie de ce coffret majeur en revenant sur chaque film de façon individuelle, dans une série d’articles qui paraîtront dans les jours à venir. Le coffret Hammer 1966-1969 – l’Âge d’Or contient donc sept films, qui étaient tous sortis en France au format DVD en 2005, chez Metropolitan Vidéo, dans la collection « Les Trésors de la Hammer ». Il s’agit des films suivants : Dracula prince des ténèbres (1966), Raspoutine le moine fou (1966), L’Invasion des morts-vivants (1966), La Femme reptile (1966), Dans les griffes de la momie (1967), Frankenstein créa la femme (1967) et Les Vierges de Satan (1968).
Côté Blu-ray, le travail éditorial fourni par Tamasa Diffusion sur les films composant le coffret Hammer 1966-1969 – l’Âge d’Or est d’une solidité à toute épreuve. Même si des taches et autres petits défauts apparaissent de façon occasionnelle, même si les scènes nocturnes et/ou à effets affichent de légères pertes de définition, le grain argentique a globalement été scrupuleusement préservé, la définition est accrue et les couleurs s’avèrent assez sublimes. Les films bénéficient donc indéniablement d’un joli upgrade Haute-Définition, surtout lorsqu’on les compare à leurs équivalents au format DVD. Bref, le résultat s’avère vraiment excellent. Côté son, chaque film du coffret est proposé en VOST uniquement et Dolby Digital 2.0 (mono d’origine). Le rendu acoustique s’avère, dans chaque cas, parfaitement clair, net et sans bavures. On pourra néanmoins regretter la disparition des versions françaises, qui étaient en revanche disponibles sur la plupart des galettes DVD de 2005.
Du côté des suppléments, chaque Blu-ray nous propose, en plus de la traditionnelle bande-annonce, une présentation du film par Nicolas Stanzick, qui s’avère incontestablement « LE » grand spécialiste français de la Hammer, puisqu’il est l’auteur de l’ouvrage de référence Dans les griffes de la Hammer (éditions Bord de l’Eau, 2010). Un deuxième module est présent sur tous les Blu-ray du coffret : il s’agit d’une analyse de séquence par Mélanie Boissonneau, docteure en études cinématographiques, spécialiste de la figure de la « pin-up » au cinéma. Enseignante à l’Université Paris 3 Sorbonne-Nouvelle et à L’École de la Cité, elle travaille également sur le cinéma d’horreur, le sport au cinéma et les super-héroïnes.
Sur le Blu-ray de Dans les griffes de la momie, on trouvera donc tout d’abord une présentation du film par Nicolas Stanzick (« Un Bis désenchanté », 27 minutes). Tout en revenant sur les autres films produits par la Hammer autour du personnage de la Momie, il qualifiera le film de John Gilling de « pas de côté conservateur » pour la Hammer, dans le sens où l’intrigue du film ne sort jamais réellement des sentiers battus et s’avère un peu plus « banale » qu’à l’accoutumée. Il reviendra enfin sur la distance que prend John Gilling vis-à-vis de son film, avec notamment la scène mettant en scène André Morell face à la boule de cristal, qu’il voit comme une façon astucieuse du cinéaste de souligner que l’on a déjà vu ce genre de scène des dizaines de fois auparavant. Intéressant ! On terminera enfin avec la traditionnelle analyse de séquence par Mélanie Boissonneau (« À tombeaux ouverts », 9 minutes), qui reviendra sur la séquence du réveil de la momie. Elle soulignera de façon assez fine le fait que John Gilling joue énormément sur la notion d’enfermement dans sa mise en scène, qui tend à coincer ses personnages dans des espaces fermés. On notera qu’un oiseau s’est invité sur le tournage de la séquence – il s’agit probablement d’une alouette, ou d’un pipit, qui turlute à tout bout de champ pendant l’intervention de Mélanie Boissonneau, au point d’en devenir un poil trop envahissant. Ainsi, si vous l’ignoriez, vous saurez dorénavant que l’alouette, le pipit et le courlis sont des oiseaux qui turlutent.